Immoler à vos pieds sa haine et son orgueil'. Encore une défaite, et dans Alexandrie Je veux que cette ingrate en ma faveur vous prie 2; C'est l'unique bonheur où mes désirs prétendent; C'est trop, c'est trop, seigneur; souffrez que j'en abuse: Vous me rendez le sceptre, et peut-être le jour; Je vous conjure encor, par ses plus puissants charmes, Par un superbe accueil, veut dire ici réception favorable, mais immoler son orgueil par un superbe accueil n'est pas une expression élégante et juste. (V.) 2 Cette ingrate de Rome qui prie dans Alexandrie, et dont un juste respect conduit les regards! On voit combien ce style est forcé. (V.) 3 César qui prend un nouveau cœur à ces douces amorces : quelles expressions! (V.) 4 Il faudrait pour moi; mais, ce qui est bien plus à observer, c'est qu'on fait dire à César avec orgueil ce qu'il dit en effet avec modestie dans la guerre contre Pharnace. Veni, vidi, vici, ne signifiait que le peu de peine qu'il avait eue contre un ennemi presque sans défense. Voy. les Commentaires de César; jamais grand homme ne fut plus modeste. La grandeur romaine ne consista jamais dans de vaines paroles, dans des discours emphatiques; elle ne fut jamais boursouflée des actions fermes, et des paroles simples, voilà le vrai caractère des anciens Romains. Nous y avons été souvent trompés; on a pris plus d'une fois des discours de capitan pour des discours de héros. (V.) Et montre à tous par là que j'ai repris ma place. CÉSAR. Ah! prenez d'autres marques de reine: SCÈNE IV. CÉSAR, CORNÉLIE, CLÉOPATRE, ACHORÉE, ANTOINE, LÉPIDE, CHARMION, ROMAINS. CORNÉLIE. César, prends garde à toi 3 : Ta mort est résolue, on la jure, on l'apprête; A celle de Pompée on veut joindre ta tête. Mes esclaves en sont; apprends de leurs indices CÉSAR. O cœur vraiment romain, Je reconnais là le véritable César, et c'était sur ce ton qu'il devalt toujours parler. (V.) • Que j'ose épargner n'est pas le mot propre, c'est que je daigne épargner. (V.) 3 Que cette scène répare bien la précédente! Que cette générosité de Cornélie élève l'âme! ce n'est point de la terreur et de la pitié, mais c'est de l'admiration. Corneille est le premier de tous les tragiques du monde qui ait excité ce sentiment, et qui en ait fait la base de la tragédie. Quand l'admiration se joint à la pitié et à la terreur, l'art est poussé alors au plus haut point où l'esprit puisse atteindre. L'admiration seule passe trop vite. Boileau dit : Inventez des ressorts qui puissent m'attacher. Que ceux qui travaillent pour la scène tragique aient toujours ce précepte gravé dans leur mémoire. (V.) Et digne du héros qui vous donna la main! Tu te flattes, César, de mettre en ta croyance Si je veux ton trépas, c'est en juste ennemie : Et qu'une digne main par moi-même animée, Aux mânes du héros dont tu venges la mort. Tous mes soins, tous mes vœux hâtent cette vengeance: Ta perte la recule, et ton salut l'avance. Quelque espoir qui d'ailleurs me l'ose ou puisse offrir2, La vengeance éloignée est à demi perdue; Et quand il faut l'attendre, elle est trop cher vendue. Mettre bas ne se dit plus, comme on l'a déjà observé. (V.) Un espoir qui ose offrir, et cette alternative d'ose ou puisse, ne sont ni convenables ni justes. (V.) Le foudre souhaité que je vois en tes mains: Aurait de quoi rougir d'un trop honteux affront3, Au lieu d'un châtiment ta mort serait un crime; Va, ne perds point de temps, il presse. Adieu : tu peux Il y avait d'abord, le foudre punisseur; punisseur était un beau terme qui manquait à notre langue. Puni doit fournir punisseur, comme vengé fournit vengeur. Mais Corneille a mis lui-même à la place le foudre souhaité, épithète qui est bien plus faible.- En tes mains. Comment ce foudre souhaité contre César est-il dans les mains de César? Quelques éditions portent, en ses mains; mais en ses mains ne se rapporte à rien. (V.) — Ce n'est point contre César que Cornélie invoque ici la foudre; au contraire, c'est dans les mains de ce même César qu'elle croit déjà voir la foudre menaçant la tête de Ptolémée, et prête à tomber sur cet assassin. Les vers qui précèdent et qui suivent, lus avec un peu d'attention, expliquent clairement sa pensée. Le vœu de Cornélie est bien que César périsse à son tour; mais auparavant elle veut qu'il punisse l'assassin de Pompée. (P.) 2 On ne voit pas d'abord à quoi se rapporte cet au lieu d'elle; c'est à Ptolémée. (V.) 3 L'adorable front de Rome qui rougirait! Est-ce ainsi que doit s'exprimer la noble douleur d'une femme profondément affligée ? cela n'est-il pas un peu trop recherché? (V.) 4 Ces derniers vers que prononce Cornélie frappent d'admiration, SCÈNE V. CÉSAR, CLÉOPATRE, ANTOINE, LÉPIDE, ACHORÉE, CHARMION. CÉSAR. Son courage m'étonne autant que leur audace. CLÉOPATRE. Je n'ai rien à vous dire : allez, seigneur, allez Venger sur ces méchants tant de droits violés. On m'en veut plus qu'à vous c'est ma mort qu'ils respirent, Leur rage, pour l'abattre, attaque mon soutien, CÉSAR. Oui, je me souviendrai que ce cœur magnanime Ne sont pas gens à vaincre un si puissant destin; Et, pour soldats choisis, envoyer des bourreaux CLÉOPATRE. Ne quittez pas César; allez, cher Achorée, et quand ce couplet est bien réelté, il est toujours suivi d'applaudisse ments. On ne cherche point un passage au trépas par un autre trépas. Cette scène est sans intérêt ; il ne s'agit guère que d'Achillas et de Pho tin: il est triste que l'acte finisse si froidement. (V.) 2 Ce dernier vers est trop obscur: César veut dire que Ptolémée est heureux d'être frère de Cléopâtre, et qu'il sera épargné : mais pardonner un crime au bonheur d'un sang n'est pas intelligible. (V.) |