DORANTE. Je me trompe moi-même, ou quelqu'un s'y découvre. PHILISTE. J'avance; approchez-vous, mais sans suivre mes pas, DORANTE, parlant à Cliton, après que Philiste s'est éloigné. CLITON. S'il prend l'occasion qui vous est préparée, DORANTE. Que de confusion et de trouble en mon âme! ELITON. Allez prêter l'oreille aux discours de la dame; SCÈNE V. T MÉLISSE, LYSE, à la fenêtre; PHILISTE, DORANTE, Ah! que j'en suis ravie! Que mon sort cette nuit devient digne d'envic! PHILISTE. Manquerais-je à venir où j'ai laissé mon cœur? › Garder le mulet, attendre à une porte avec impatience, s'ennuyer à attendre. 2 Tout est manqué. (V.) MÉLISSE. Qu'ainsi je sois aimée ! et que de vous j'obtienne PHILISTE. Ah! s'il en est besoin, j'en jure, et par vos yeux. Vous revoir en ce lieu m'en persuade mieux; CLITON. A l'aide! MÉLISSE. J'ois du bruit. CLITON. A la force! au secours! PHILISTE. C'est quelqu'un qu'on maltraite; excusez si j'y cours. CLITON, s'éloignant toujours derrière le théâtre. Au meurtre ! On m'égorge, on me tue. PHILISTE. Il est déjà dans la prochaine rue. DORANTE. C'est Cliton; retournez, il suffira de moi. C'est plutôt quelque ivrogne, ou quelque autre sottise Tu flattes mes désirs '. MÉLISSE. 1 C'est encore pis; cette Mélisse qui prend Philiste son amant pour Dorante, ce Cliton qui crie au secours, font tomber la pièce. (V.) SCÈNE VI. DORANTE, MÉLISSE, LYSE. DORANTE. Madame, ce n'est rien : Des marauds, dont le vin embrouillait la cervelle, (bas.) Si Cliton m'entendait, il compterait pour quatre. MÉLISSE. Vous n'avez donc point eu d'ennemis à combattre? DORANTE. Un coup de plat d'épée a tout fait écouler. MÉLISSE. Je mourais de frayeur, vous y voyant aller. DORANTE. Que Philiste est heureux! qu'il doit aimer la vie! MÉLISSE. Vous n'avez pas sujet de lui porter envie. DORANTE. Vous lui parliez naguère en termes assez doux. MÉLISSE. Je pense d'aujourd'hui n'avoir parlé qu'à vous. DORANTE. Vous ne lui parliez pas avant tout ce vacarme? Vous ne lui disiez pas que son amour vous charme, Qu'aucuns feux à vos feux ne peuvent s'égaler ? MÉLISSE. J'ai tenu ce discours, mais j'ai cru vous parler. DORANTE. Oui, je le suis, madame, Le malheureux témoin de votre peu de flamme. Ce qu'un moment fit naître, un antre l'a détruit; Et l'ouvrage d'un jour se perd en une nuit. MÉLISSE. L'erreur n'est pas un crime; et votre aimable idée, Régnant sur mon esprit, m'a si bien possédée, Que dans ce cher objet le sien s'est confondu, En sa place tout autre eût passé pour vous-même : DORANTE. N'en parlons plus, de grâce, et parlons de Philiste; MÉLISSE. Dites qu'il m'importune, et non pas qu'il me sert; N'en craignez rien. Adieu, j'ai peur qu'il ne revienne. DORANTE. Où voulez-vous demain que je vous entretienne? Je dois être élargi. MÉLISSE. Je vous ferai savoir Dès demain chez Cléandre où vous me pourrez voir. DORANTE. Et qui vous peut sitôt apprendre ces nouvelles? MÉLISSE. Et ne savez-vous pas que l'amour a des ailes? DORANTE. Vous avez habitude avec ce cavalier? MÉLISSE. Non, je sais tout cela d'un esprit familier. Soyez moins curieux, plus secret, plus modeste, Comme elle est ma maîtresse, elle m'a fait leçon, DORANTE. Sachant fort peu la ville, et dans l'obscurité, Comme je sais un peu ce que c'est que l'amour, PHILISTE. A quelque mille pas, Je l'ai rencontré seul tombé sur des plâtras. DORANTE. Maraud, ne criais-tu que pour nous mettre en peine? CLITON. Souffrez encore un peu que je reprenne haleine. DORANTE. Quand il est nuit sans lune, et qu'il fait temps couvert, Connaît-on les couleurs? tu donnes une bourde. CLITON. Ils portaient sous le bras une lanterne source. C'était fait de ma vie, ils me traînaient à l'eau ; Mais, sentant du secours, ils ont craint pour leur peau, PHILISTE. Si j'eusse pu les joindre, ils me l'eussent payée |