페이지 이미지
PDF
ePub

la victime des artifices de fa mere. D'un côté, Madame de Rofoi appréhende d'être haïe, méprifée du Comte, & de lui être pour jamais un objet odieux : de l'autre, elle penfe pouvoir triompher un jour, à l'aide de fes char、 mes & de fes artifices. Elle fe flatte que les mépris apparens de fa fille, révolteront le pere, & rebuteront le fils: ces idées flatteufes nourriffent dans fon cœur un efpoir, qui l'empêche de prendre aucune résolution violente. Je me rends, Mademoiselle, à vos raisons & à vos craintes, repartit mon pere; je ne dirai rien à Madame de Rofoi, capable de lui faire naître le moindre foupçon, que le motif odieux de fa conduite m'eft connu. Cependant je pourrai bien ôter à fon artifice, l'excufe du prétendu changement de fa fille : alors nous

verrons

verrons de quel prétexte elle pourra fe fervir, pour ne pas tenir des engagemens pris, de fon aveu, avec le Seigneur de Rofoi. Que je vois de rifque pour Alix, dit douloureufement Mademoiselle de Rocheville, dans la réuffite même de ce que vous projettez ! Que je crains pour elle! Je ne puis m'expliquer davantage; mais fi l'on vouloit m'en croire, on attendroit, du tems & de mes confeils, ce que j'en ofe espérer.

[ocr errors]

Je ne puis vous exprimer, mon cher Raoul, quel étoit mon défefpoir, de ne trouver, de tous côtez, que des difficultez infur montables. La timidité de Mademoiselle de Rofoi m'affligeoit fenfiblement. Elle refufoit, avec obftination, de me voir : je regar dai ce cruel refus comme une défiance d'elle-même. Cette idéc

Tome I.

L

augmenta encore le défir que j'avois de lui parler, & me fit redoubler mes inftances pour obtenir cette grace. Enfin, Mademoiselle de Rocheville & plufieurs lettres lui dépeignirent fi vivement ma douleur, qu'elle fe rendit.

C'en eft donc fait, lui dis-je en l'abordant, je vais être la vitime de la réfiftance que vous m'oppofez. Madame de Rofoi va faire un choix pour vous: fa funefte paffion m'en affure, & votre cruelle obéiffance à fes ordres, m'affure auffi que vous irez à l'Autel y jurer ma perte, & peutêtre la vôtre. Ah! vous me faites trembler, s'écria Mademoifelle de Rofoi! Non; ma mere n'ajoutera point cette affreuse violence à celle qu'elle me fait aujourd'hui ! Ne vous flattez pas, lui dit Mademoifelle de Roche

ville, pour l'intimider; le Comte ne prévoit que trop, un coup inévitable: ce malheur vous menace. Jufte Ciel! dit Alix avec transport, ce malheur me menace! Pouvez-vous en douter, repris-je, fi vous reftez au pouvoir de Madame de Rofoi? Ah! divine Alix, poursuivis-je en me jettant à fes pieds, par pitié pour vous-même, arrachez-vous aux perfecutions où vous expose une fauffe délicateffe. Sauvez-moi la vie. Au nom de toute ma tendreffe, ne vous oppofez plus à ce que j'exige de la vôtre. Songez que c'eft un époux que vous fuivrez ; un époux choifi par un pere. Quoi, Mademoiselle, ajoutai-je, voiant qu'elle ne me répondoit rien, pouvez-vous refufer de vous jetter entre les bras du mien? N'est-il pas le vôtre ? Votre amitié ne lui a-t'elle

pas

nez,

donné ce nom que mérite fa tendreffe? Quelle feroit fa joie! Vedivine Alix, lui dis-je vivement, en lui pressant les mains venez: plus de tempête à effuïer, L'Amour, ofez le fuivre, vous cons duit au port. Hé! quel Amour: Il ne differe plus de vos devoirs. Quoi me repliqua-t'elle, je m'arracherois des bras d'une mere! Quoi! je ferois une démarche qui la couvriroit de honte! Non ; fon injuftice même ne pourroit me juftifier; elle en feroit deshonorée, & j'aurois à rougir, en même tems, de voir la gloire & la mienne flêtries à jamais. Quelle cft, Mademoiselle, votre cruau té, repris-je! votre refus eft l'ar rêt de ma mort. L'excès de ma paffion vous eft un garant, que je ne furvivrai pas au coup que Madame de Rofoi me portera par vos propres mains. Raffurez

« 이전계속 »