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des volontez d'un mari, qui, du Tombeau, vous reproche une foibleffe dont je fuis la victime. Alors je me tus ; je regardai fixement Madame de Rofoi. Voïant l'extrême émotion où elle étoit, & qu'elle verfoit quelques larmes: D'où naît, Madame, le défordre où je vous vois, lui dis-je ? Vous répandez des pleurs ? Qui peut vous les arracher? Etesvous fenfible à ma douleur: Eftce un mari dont vous offenfez la mémoire? Eft-ce un Amant à vos pieds, qui vous demande ou Mademoiselle de Rofoi ou la mort? -Eft-ce enfin une fille qui les fait -couler? Parlez, Madame; parlez. Vous ne répondez point? Quel eft donc ce miftere? N'ofezvous prononcer que vous m'accordez ou me refufez Alix? Hé bien! Madame, pourfuivis-je, Je ne quitterai point vos genoux

que vous ne m'aïez appris fi vous me condamnez à vivre ou à mourir. Madame de Rofoi preffée, ne pouvant fans doute plus fe contraindre, appella un Page, & m'ôta, par cette adreffe, la liberté de la preffer davantage : elle fe leva, & fans me regarder ni me répondre, elle paffa dans fon Cabinet. Un moment après, on vint me dire qu'elle me prioit de l'excufer, qu'elle fe trouvoit mal, & qu'elle avoit befoin de repos.

Je n'étois pas encore forti de chez Madame de Rofoi, que fentis la fauffe & dangereufe démarche que je venois de faire. Le défordre, le trouble, le filence, les pleurs de cette artificieuse femme, tout ne m'affuroit que trop que je venois d'irriter fa paffion, en lui montrant l'excès de la mienne. Je fortis de chez elle,

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auffi agité que je la laiffois troublée. Je rêvois à mon imprudence, avec autant de honte que de regret, lorfque tout d'un coup je penfai qu'en ouvrant mon cœur au Roi, qui veut bien, dans les occafions, fe fouvenir que j'ai l'honneur d'être du même fang que la Reine fa mere, je pourrois, par fon autorité, forcer Madame de Rofoi à confentir que je devinffe l'époux d'Alix. A peine eus-je conçû cette idée, que je réfolus de l'exécuter. J'allai chez le Roi; nous devions vous & moi, mon cher Raoul, partir dans peu de jours pour nous rendre à Dijon. Philippe, qui vouloit m'honorer de quelques commiffions fecrétes, m'épargna la peine de lui demander un moment d'audience; en me voïant, il me dit de le fuivre dans fon Cabinet: c'étoit pour me donner

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fes derniers ordres. Il me charde prendre exactement l'état des forces du Duc de Bourgogne ; d'examiner la maniere dont il faifoit ranger fes Troupes en Bataille; d'étudier fon caractere, celui de fes Miniftres, de fes Généraux, de fes Favoris, & de pénétrer s'il eft auffi aimé de fes Sujets, qu'il en eft craint. Je ne puis vous exprimer, mon cher Raoul, combien j'étois affligé de la préférence que le Roi m'avoit donnée, fans la demander, & de la commiffion dont il m'honoroit. Cette commiffion, qui me faifoit fentir toute fon eftime, dans un autre tems m'auroit charmé; mais voulant du moins profiter de cette occafion favorable, pour mettre ce Prince dans mes interêts, je me jettai à fes genoux, en le conjurant de m'écouter, & de m'accorder fa protection. Il

Tome I.

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me fit relever avec bonté, & me permit de parler.

L'attention que le Roi prêtoit à ce que je lui difois, foutenoit ma confiance ; je n'oubliai aucune des circonftances propres à l'intéreffer en ma faveur, en ménageant Madame de Rofoi autant qu'il me fut poffible. Aiant ceflé de parler, voici ce que ce fage & judicieux Prince me répondit, d'un ton affectueux. Rethel, comme votre ami je prends part à vos peines; mais comme votre Roi, je ne puis vous prêter qu'un bien foible fecours. La Puiflance Souveraine doit refpeêter la volonté d'un pere & d'une mere au fujet des établiffemens de leurs enfans. Le Prince peut s'oppofer à une alliance ou peu fortable, ou contraire au bien de l'Etat ; mais il ne doit ni ne peut faire un choix contre le gré d'un

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