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route de Bourgogne; mais ce Camp, où les plaifirs commentent le jour & le finiffent, eft pour moi un exil, que je ne fupporte qu'avec une inquiétude & des allarmes continuelles. Peu de jours après mon arrivée, je fus inftruit par Mademoiselle de Rocheville, que Madame de Rofoi avoit mené fa fille à la Cour où fa beauté avoit autant charmé que furpris tout le monde. Si ma vanité fut flattée dans ce moment, ma tendreffe fut allarmée; mais le fouvenir du caractere d'Alix eut bien-tôt diffipé cette injuricufe inquietude. Mademoifelle de Rocheville m'apprit auffi, que le Roi m'avoit tenu parole. Ce Prince dit à Madame de Rofoi, lorfqu'elle lui préfenta Alix, qu'il la prioit de ne pas difpofer, fans le confulter, d'une héritiere qui joignoit à cet avantage, ceux

d'une grande naiffance, & d'une beauté fi parfaite; puis il ajoûta en hauffant la voix, pour être fans doute entendu des jeunes Courtifans qui entouroient & la mere & la fille, que Mademoiselle de Rofoi n'aïant plus de pere, il vouloit lui en tenir lieu, & qu'à ce titre il faifoit fon affaire de lui choifir un époux digne d'elle.

Quelques jours après, le Roi voïant Alix un peu éloignée de fa mere, à qui la Reine Adelaïde parloit, s'approcha d'elle, & lui dit bas: Mademoiselle, nous veillons enfemble à la confervation de deux chofes bien précieufes pour le Comte de Rethel; je lui garde votre main & vous lui gardez votre cœur. Qu'il fera heureux quand il poffedera l'un & l'autre ! Votre Majefté, répondit Mademoifelle

de Rofoi, avec une noble modeftie, ne s'occupe que du foin de faire des heureux.

La fidelle & zelée Rocheville m'écrit tous les jours. Ses Lettres m'affûrent que Madame de Rofoi eft ferme dans le deffein de tout facrifier au bonheur de fa fille; qu'elle la traite avec une bonté & une douceur fans exem ́ple. De pareilles affûrances, & les bontez du Roi devroient me donner une pleine confiance; cependant, mon cher Raoul, je n'ofe encore me flatter! la paffion de Madame de Rofoi & fon caractere me font toûjours trembler. Alix, dont rien ne peut alterer la tendresse pour fa mere, penfe autrement: elle croit toucher au moment où nous de vons être heureux. Jugez-en par ces mots mis de fa main dans la derniere Lettre de Rocheville, fa tendre amie.

Nos

Nos malheurs finiront. Je prévois un avenir qui nous fera ou blier nos maux paffez. Oui! cher Comte, nous ferons heureux : Oui! Les bontez & la tendresse de ma mc" re nous en affûrent ! & quand nous le ferons, nous le ferons plus que tout l'Univers ensemble. Ah ! cher Comte, quelle eft ma joie ! il ne m'est plus défendu de vous aimer, & je fuis fûre de votre cœur.

Que j'aime Mademoiselle de Rofoi, s'écria le Sire de Couci ! Oui, c'eft une fille adorable! Que vous êtes heureux, mon cher Roger d'en être aimé, & que je yous trouverois à plaindre, fi contre toutes les apparences Madame de Rofoi vous trahiffoit! Je n'ofe juger quelle fera fa conduite. Je crains de lui faire injure, je crains de lui faire grace: le paffé me fait trembler pour l'avenir je n'ofe enfin

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vous faffurer; cependant je prévois que vous triompherez, plus tard, fi Madame de Rofoi vous trompe; mais vous triompherez. Elle a à combattre, pour vaincre les obftacles qu'elle voit, & ceux qu'elle ne voit pas. La fermeté d'Alix, la pénétration de votre amie qui étudie fans ceffe fes mouvemens ; le peu de tems qu'il faut pour vous en inftruire & pour vous rendre à Paris ; le Roi lui-même qui veille à vos intérêts; tout cela doit vous raffûrer. Je l'avouë, mon cher Raoul, repliqua Roger ; cepen dant je ne fuis pas tranquile. Je ne crains plus, qu'un autre poffede Alix, du moins tant que je refpirerai; la prudence ordinaire du Roi s'y oppoferoit, j'en ferois averti, & je ferois une barriere difficile à renverfer, pour arriver jufqu'à Mademoiselle de

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