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grets fuperflus. Ses vaftes connoiffances lui faifoient prévoir les événemens les moins attendus & les plus reculez. Quelque cachées qu'en fuffent les caufes elles n'échappoient point à fa pénétration: fa politique prévenoit quelques-uns de ces événemens, fa fageffe portoit le remede convenable aux autres ; le fuccès répondoit prefque toujours aux deffeins d'un homme fi éclairé & fi judicieux. Enguerrand étoit fier, ambitieux, hazardant de tomber plutôt que de ne pas renverser tout ce qui le choquoit. Jaloux de la confiance de fon Roi, qu'il méritoit,& que peu de perfonnes méritoient autant que lui, on le regardoit comme le fléau de ceux qui, dans le gouvernement des affaires, étoient plus attentifs à leurs intérêts qu'à ceux de l'Etat : enfin il étoit Tome I.

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affez grand, pour préferer la dif grace à la faveur, s'il eût fallu l'acheter aux dépens de la gloire de fon Roi. Il avoit pour principe qu'un Miniftre en répond à l'Univers; que comme il la par tage avec fon Souverain, il doit rougir comme lui, quand quelque chofe la bleffe. Il accordoit rarement fon amitié; le feul homme de la Cour qui l'avoit entierement acquife, étoit Henri de Rethel, oncle de Roger.: Ceux qui ne connoiffoient pas, parfaitement ces deux hommes. illuftres, devoient être étonnez d'une union fi intime.

La vertu d'Enguerrand le faifoit craindre & admirer; celle de Henri le faifoit chérir & refpecter. Henri étoit doux & bienfaifant, lent à blâmer, prompt louer, égal dans le commerce de fes amis, brave fans oftentation,

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experimenté dans l'art de laGuerre, tranquile dans les revers modefte au fein de la Victoire, toujours, par cet heureux caractere, en etat de profiter ou de réparer: il étoit à la Cour comme dans fon domeftique, fimple & d'un abord facile; il voyoit, fans nul chagrin, les ambitieux, ardens à fe pouffer, à demander, & à obtenir : il falloit que les graces vinffent au-devant de lui; & quand il en recevoit, il les regardoit plutôt comme un effet de la bonte de fon Souverain, que comme la récompenfe de fes fervices. Rien ne pouvoit ni l'humilier, ni lui donner de vanité. Jamais il ne fut foupçonné d'un orgueil rafiné, & caché fous des manieres fi fimples : les hommes, dans une longue vie, paffée à la Cour, fe démafquent dans quelques occafions; la ré

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putation de Henri, ni l'idée qu'on avoit d'un caractere si rare, ne fouffrirent jamais la moindre altération. Voilà les Gouverneurs que le fang & une tendreffe paternelle donnerent à Roger & à Raoul. Ce font ces exemples domeftiques & journaliers qui mirent en valeur leur heureux naturel; c'étoit cet heureux naturel qui leur faifoit recevoir avec modeftie, les marques que le Duc de Bourgogne & toute fa Cour, leur donnoient d'une eftime finguliere. Les grandes qualitez de l'un & de l'autre avoient frappé ce Prince, & avoient réuni en leur faveur tous les fuffrages. Les femmes les trouvoient aimables, & les hom mes les trouvoient vertueux. Sur tout le Duc de Bourgogne admiroit avec quelle rapidité Roger avoit marché fur les tra

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ces de fon oncle, ce qui l'avoit rendu digne neveu de Henri, & digne fils de Thibault, que l'on aura occafion de connoître dans la fuite.

Si Roger de Rethel & Raoul de Couci, avoient prévenu en leur faveur le Duc de Bourgogne; le Maréchal du Mez & le Comte des Barres lui parurent dignes de l'accueil qu'ils en reçûrent. Il n'attribua point leur voïage à la fimple curiofité; il penfa qu'ils étoient tous deux chargez, de la part de Philippe, d'examiner fi fes forces étoient capables de refifter aux entreprifes de la France. Comme elles pouvoient le défendre & le maintenir dans fes Etats, il vit fans chagrin arriver le Maréchal du Mez & le Comte des Barres. La valeur du dernier, déja connuë par plus d'une action d'éclat, &

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