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long, ce fatal délai, & vous allez l'apprendre.

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Le jour que Madame de Rosoi devoit m'écrire, mon pere me dépêcha un Courier : il m'ordonnoit de partir fur le champ, & de me rendre auprès de lui; il n'y avoit rien de plus dans fa lettre. Cette brièveté m'allarma ; je n'ofai jamais me flatter que ce rappel précipité, & dont on me taifoit le fujet, m'annonçât quelque chofe d'heureux. J'arrive, j'entre. Mon pere, en m'embraffant tendrement, me couvrit le vifage de larmes, en me difant, après avoir été un moment fans pouvoir parler Ah! mon fils, quelle nouvelle ai-je à vous apprendre? Mon pere! m'écriaije avec un effroi mortel, qu'avez'vous à me dire? Mon fils, repritil en me ferrant toujours dans fes bras, armez-vous de toute votre

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fermeté, vous en avez besoin : il n'eft plus d'Alix pour vous ! Qu'entends - je, dis-je en reculant ! Jufte Ciel! Alix feroit-elle morte? Oui, mon fils, me repliqua mon pere, elle eft morte pour vous mais hélas! l'infortunée

vivra pour un autre ! Alix eft enlevée..... Alix eft enlevée, repris-je! Hé! quel eft fon infolent Raviffeur? Nommez-le moi. Robert de Dammartin vient de vous la ravir, repartit mon pere. Alix eft morte pour vous, mon fils! ce rapt a rendu pour jamais cette refpectable fille, indigne de Roger. Hélas! on nous l'enleve à tous deux!on nous porte également un coup mortel: Mais, mon fils, par pitié pour un pere qui vous aime uniquement, aïez plus de force que moi: foïez affez grand pour foutenir ce coup fatal: n'augmentez pas ma douleur: foiez

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touché du trifte état où je fuis. Mon pere me voiant renverse dans un fauteuil, les yeux égarez me prit tendrement les mains, & me dit: Mon fils, mon cher Roger, refpectez ma vieilleffe; que les tendres fentimens de la nature moderent un désefpoir, qui me mettroit au Tombeau fi vous vous y abandonniez! Mon pere eut le tems de parler autant qu'il voulut ; ma douleur & ma rage ne me laiffoient pas la liberté de l'interrompre. Après avoir long-tems gardé morne filence, je m'écriai: Alix eft enlevée! Robert m'arrache un bien fi précieux! Hé bien! arrachons-lui la vie, ou qu'il me délivre de celle que je détefte fans Alix. Où eft-il? Où a-t'il conduit cette infortunée victime de fa violence? Courons le chercher, Que je la vange! Que je.

meure, ou qu'il périffe: Mon pere voïoit, avec une fenfible affliction, le cruel état où j'étois; mais il ne chercha plus à calmer mes tranfports. Il me laiffa gémir, m'emporter, jurer la perte de Robert, & former mille projets extravagans, fans s'y oppofer il voulut attendre que je fuffe en état de l'écouter; enfin, je tombai dans l'accablement où il me défiroit. Je lui demandai alors, d'une voix baffe & étouffée comment Mademoifelle de Rofoi avoit été enlevée : après m'avoir inftruit de tout ce qui s'étoit paffé depuis le jour de fon arrivée, comme je vous l'ai raconté, voici ce qu'il m'apprit.

Le jour qui précéda celui où Madame de Rofoi devoit vous écrire, me dit mon pere, elle alla chez la Reine Mère: elle Y

refta jufqu'à minuit. En se retirant avec fa fille, elle fut arrêtée par dix ou douze hommes armez. Alix effraïée, fe jetta dans les bras de fa mere, d'où ces perfides l'arracherent, & difparurent dans le moment.

On fçut d'abord, par la démarche de Renaud, que Robert de Dammartin étoit le Ravisseur de la malheureuse Alix. Renaud vint fe jetter aux pieds du Roi pour fe juftifier, & le supplier de ne pas le croire complice du crime de fon frere : il affirma même avec ferment, qu'il n'avoit eu aucune connoiffance de fa téméraire entreprise.

Le Roi, qui veut qu'on ref pecte les Loix, touché de votre malheur, & offenfé de la violence que le Comte de Dammartin a ofe commettre, aux portes mêmes de fon Palais, a promis

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