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pris. Quoique Mademoiselle de Rofoi aime tendrement ceux à qui elle doit le jour, felon moi, les juftes leçons du pere ont fait plus d'impreffion für elle, que celles de fa mere; avantage pour Alix, qui rejaillira fur vous: car voilà, mon fils, l'époufe que le Seigneur de Rosoi & moi vous deftinons, fi vos cœurs fe déclarent en faveur l'un de l'autre. Tous deux tendres peres, & tous deux occupez du bonheur de nos enfans, nous ne nous fommes promis de les unir, qu'aux conditions qu'ils le défireroient. Hélas dis-je, je crains bien que Mademoiselle de Rofoi ne prenne pour une tendre fimpathie, le défir feul de plaire à fon pere. Que je ferois à plaindre, ajoutaije vivement, fi je la poffedois, fans poffeder fon cœur Mon pere ne put s'empêcher de fourire

de mon exclamation. Cette crain

te, me dit-il, m'affure que les

charmes de Mademoiselle de Rofoi vous ont touché; efperons, mon fils, que vous ne lui déplairez pas : je m'en fie bien à vous, pour lui demander fon cœur de bonne grace. Puifque le vôtre, pourfuivit-il, vient de fe déclarer felon mes défirs, je vais vous faire connoître les avantages que vous trouverez dans ce mariage. Rofoi eft un des plus grands Seigneurs de toute la Province : fes Terres font magnifiques, elles confinent aux miennes, elles font même trop voifines pour être fous deux différens maîtres; ce mariage va les réunir. J'écoutai ces dernieres paroles avec peu d'attention ; les vûës d'interêts, & de grandeur ne pouvoient déja plus trouver de place dans mon ame. En peu de jours, je fus épris

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de la plus forte paffion. J'étois fans ceffe occupé du défir de plaire à la divine Alix, de celui de paroître digne d'elle aux yeux de fon pere, & de mériter l'amitié de Madame de Rofoi. Je partageois mes foins & mes empreffemens, entre la mere & la fille: j'avois le plaifir de m'appercevoir, que la plus fimple attention pour Madame de Rofoi, l'arrachoit à un air penfif & diftrait, qu'elle avoit pris peu de jours après notre arrivée. Il fallut partir ce fut avec une douleur proportionnée à ma passion, que je quittai Alix, après avoir refté quinze jours chez le Seigneur de Rofoi. J'eus le bonheur de lui infpirer, dans ce peu de tems, une amitié peu différente de celle que mon pere a pour moi.

Quand je fus à Rethel, mon

pere

pere me dit, que le bon Rofoi, quoique très-prévenu en ma faveur, ne vouloit rien preffer. Il craint, ajouta-t'il, que la foumiffion de fa fille ne lui voile fes véritables fentimens ; il veut fe donner le tems de les développer à fonds: mais, mon fils, vous avez la permiffion de donner tous vos foins à Mademoiselle de Rofoi, & nous retournerons dans peu de jours chez fon pere; car je vois bien que le féjour de Rethel va vous paroître infupportable.

Nous ne reftâmes que huit jours à Rethel; mais que ce peu de tems me parut long! que j'en partis avec plaifir! La vûë de Mademoifelle de Rofoi me caufa cette tendre émotion, que l'amour feul fait fentir. Je la voïois tous les jours, & à tous les momens : nos peres nous laiffoient une honnête liberté.Alix ne me fuïoit Tome I. G

point lorfque je lui difois des choses où ma tendreffe fe laifloit entrevoir d'une maniere refpeAueufe, elle baiffoit les yeux, & ne me répondoit rien. Comme ma paffion augmentoit à chaque inftant, elle s'allarmoit d'une pudeur, qui me déroboit la connoiffance des vrais fentimens du cœur d'Alix. Je tremblois qu'elle ne fût infenfible à ma tendreffe ; quelquefois auffi, je regardois cette pudeur, comme l'effet d'une paffion naiffante, qu'elle n'ofoit encore s'avouer à elle-même.

Un jour que nous étions feuls, je lui dis: La permiffion que vous avez, Mademoifelle, de ne me point hair, ne vous donne-t'elle pas celle deme laiffer voir,fi jefuis affez heureux pour que votre cœur ne murmure point contre la volonté d'un pere? Volant qu'elle rougiffoit, que fon embarras étoit

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