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ce, comme un courageux Athléte, qui ne doit refpirer que la gloire. C'eft pourquoi elle a engendré d'abord en nos ames une paffion invincible pour tout ce qui nous paroît de plus grand & de plus divin. Auffi voyons-nous que le monde entier ne fuffit pas à la vaste étendue de l'efprit de l'homme. Nos pensées vont fouvent plus loin que les cieux, & pénétrent au-delà de ces bornes qui environnent & qui terminent toutes choses.

(1) Et certainement fi quelqu'un fait un peu de réflexion fur un homme dont la vie n'ait rien eu dans tout fon cours que de grand & d'illuftre, il peut connoître par là à quoi nous fommes nés. Ainfi nous n'admirons pas naturellement de petits ruiffeaux, bien que l'eau en foit claire & tranfparente, & utile même pour notre ufage; mais nous fommes véritablement furpris quand nous regardons le Danube, le Nil, le Rhin, & l'Océan fur tout. Nous ne fommes pas fort étonnés de voir une petite flamme, que nous avons allumée, conferver long-tems fa lumiere pure: mais nous fommes frappés d'admiration, quand nous contemplons (2) ces feux qui s'allument quelquefois dans le Ciel, bien que pour l'ordinaire ils s'évanouiffent en naiffant : & nous ne trouvons rien de plus étonnant dans la nature, que ces fournailes du Mont Etna, qui quel quefois jette du profond de ses abîmes

Des pierres, des rochers, & des fleuves de flammes. De tout cela il faut conclure, que ce qui eft utile, & même néceffaire aux hommes, fouvent n'a rien

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& fait réflexion qu'on préfere toujours en toutes chofes le fur prenant & le grand, au mi

(1) Et certainement. Le texte Grec a été ici corrompu: & c'eft la caufe pourquoi M. Boileau n'a pas bien réuffignon & au bean, il pourra dans la traduction de ce paf- auffitôt connoître par là, à quoi fage. 1 eût du dire: Et cer- nous fommes nés. TOLLIUS. tainement fi quelqu'un confidere

(2) Ces feux qui s'allude toutes parts la vie humainê, Į ment. ] Ce font ici le Soleil

de merveilleux, comme étant ailé à acquérir : mais que tout ce qui eft extraordinaire, est admirable & furprenant.

& la Lune, dont notre Au- 1 quelquefois par des Eclipfes teur parle, qui s'obscurciflent | TOLLIUS.

CHAPITRE X X X.

Que les fautes dans le Sublime fe peuvent excufer.

A L'EGARD donc (1) des

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le Sublime & le Merveilleux fe rencontre joint avec l'utile & le néceffaire, il faut avouer qu'encore que ceux dont nous parlions, n'ayent point été exempts de fautes, ils avoient néanmoins quelque chofe de furnaturel & de divin. En effet, d'exceller dans toutes les autres parties, cela, n'a rien qui paffe la portée de l'homme : mais le Sublime nous éléve prefque auffi haut que Dieu. Tout ce qu'on gagne à ne point faire des fautes, c'eft qu'on ne peut être repris: mais le Grand fe fait admirer. Que vous dirai-je enfin un feul de ces beaux traits & de ces penfées fublimes, qui font dans les Ouvrages de ces excellens Auteurs, peur payer tous leurs défauts. Je dis bien plus ; c'est que fi quelqu'un ramaffoit ensemble toutes les fautes qui font dans Homere, dans Démosthéne, dans

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(1) Al'égard donc des grands leux, il ne me paroît pas pofOrateurs. Le texte Grec eft fible, qu'il joigne ici ce mer entiérement corrompu en cet veilleux avec ce néceflaire & endroit, comine M. le Févre cet utile. Cela étant, je croi l'a fort bien remarqué. Il me que la reftitution de ce paffa. Lemble pourtant que le fens ge n'eft pas fi difficile que l'a que M. Defpreaux en a tiré crû M. le Févre; & quoique ne s'accorde pas bien avec ce- ce fçavant homme ait défef lui de Longin. En effet ce péré d'y arriver fans le fe Rhéteur venant de dire à la å cours de quelque Manufcrit, fin du Chapitre précédent je ne laifferai pas de dire ici qu'il eft aifé d'acquérir l'utile ma penfée. Il y a dans le tex& le néceffaire, qui n'ont te, ip' vix it iw the xprices rien de grand ni de merveil&c. Et je ne doute point que

Platon, & dans tous ces autres célébres Héros, elles ne feroient pas la moindre ni la milliéme partie des bonnes chofes qu'ils ont dites. C'eft pourquoi l'envie n'a pas empêché qu'on ne leur ait donné le prix dans tous les fiécles, & perfonne jufqu'ici n'a été en état de leur enlever ce prix, qu'ils confervent encore aujourd'hui, & que vrai-femblablement ils conferveront toujours,

Tant qu'on verra les eaux dans les plaines courir,
Et les bois dépouillés au Printems refleurir.

On me dira peut-être qu'un Coloffe, qui a quelques défauts, n'eft pas plus à estimer qu'une petite ftatue achevée; comme, par exemple, le foldat de Polycléte. A cela je réponds, que dans les Ouvrages de l'Art, c'est le travail & l'achèvement que l'on confidere, au lieu que dans les Ouvrages de la Nature, c'eft le Sublime & le Prodigieux. Or difcourir, c'eft une opération naturelle à l'homme. Ajoutez, que dans une ftatue on ne cherche que le rapport & la reffemblance: mais dans le dif cours, on veut, comme j'ai dit, le furnaturel & le divin. Cependant, pour ne nous point éloigner

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de ce que nous avons établi d'abord, (1) comme c'est le devoir de l'Art d'empêcher que l'on ne tombe, & qu'il eft bien difficile qu'une haute élévation à la longue fe foutienne, & garde toujours un ton égal; il faut que l'Art vienne au fecours de la Nature; parce qu'en effet c'eft leur parfaite alliance qui fait la fouveraine perfection. Voilà ce que nous avons crû être obligés de dire fur les questions qui fe font préfentées. Nous laiffons pourtant à chacun fon jugement libre & entier.

colligendum, pronuntiandumque eft.

(1) Comme c'eft le devoir de l'Art d'empêcher, &c.] Au lieu de vineρoxx év, on lifoit dans l'an cien Manufcrit τὸ δ' ἐν ὑπεροχή

,

conftruction eft beaucoup plus

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CHAPITRE X X X I.

Des Paraboles, des Comparaifons,

des Hyperboles.

OUR retourner à notre difcours, (1) les Pa raboles & les Comparaifons approchent fort des Métaphores, & ne différent d'elles (2) qu'en un

(1) Les paraboles & les com- quelque chofe de ce que Lon. paraifons. Ce que Longin di- gin difoit de la jufte borne des foit ici de la différence qu'il y hyperboles, & jufques où il a des comparaifons aux mé- eft permis de les pouffer. La taphores est entiérement per- fuite & le paffage de Demofdu; mais on en peut fort bien théne, ou plutôt d'Hégéfippe fuppléer le fens par Ariftote, fon Collégue, font aflez comqui dit comme Longin, qu'el- prendre quelle étoit fa penles ne différent qu'en une cho- fée. Il eft certain que les hyfe, c'est en la feule énoncia-perboles font dangereufes; & tion par exemple, quand comme Ariftote l'a fort bien Platon dit, que la tête est une remarqué, elles ne font pref eitadelle, c'est une metaphore, que jamais fupportables que dont on fera aifément une dans la paffion. DACIER, comparaison, en disant, que la tête eft comme une citadelle. Il manque encore après cela Tome II,

(2) Qu'en un feul point. ] Cet endroit eft fort défec tueux & ce que l'Auteur F

feul point

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(1) Telle eft cette Hyperbole : Supposé que votre efprit foit dans votre tête, & que vous ne le fouliez pas fous vos talons. C'eft pourquoi il faut bien prendre garde jufqu'où toutes ces Figures peuvent être pouffées; parce qu'affez fouvent, pour vouloir porter trop haut une Hyperbole on la détruit. C'eft comme une corde d'arc, qui, pour être trop tendue, fe relâche, & cela fait quelquefois un effet tout contraire à ce que nous cherchons.

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Ainfi Ifocrate dans fon Panégyrique, par une fotte ambition de ne vouloir rien dire (2) qu'avec emphafe, eft tombé , je ne fçai comment, dans une faute de petit écolier. Son deffein, dans ce Panégyrique, c'eft de faire voir que les Athéniens ont rendu plus de fervice à la Gréce; que ceux de Lacédémone : & voici par où il débute: Puifque le Difcours a naturellement la vertu de rendre les chofes grandes, petites, & les petites, grandes; qu'il fait donner les graces de la nouveauté aux chofes les plus vieilles,& qu'il fait paroître vieilles celles qui font nouvellement faites. Eft-ce ainfi, dira quelqu'un, ô Ifocrate , que vous allez changer toutes chofes à l'égard des Lacédémoniens & des Athéniens ? En faifant de cette forte l'éloge du Discours, il fait

ayoit dit de ces Figures, manque tout entier. BOILEAU.

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en effet très-vicieufe; car un efprit foulé fous les talons, eft (1) Telle eft cette hyperbo- une chofe bien étrange. Cepen le: Supposé que votre esprit foir dant'Hermogéne n'a pas laiflé dans votre tête que vous de la louer, Mais ce n'eft pas ne le fouliez pas fous vos tafeulement par ce passage, que lons. C'eft dans l'Oraifon de l'on peut voir que le jugeHalonefo, que l'on attribuement de Longin eft fouvent vulgairement à Démofthéne, plus fûr que celui d'Hermo quoiqu'elle foit d'Hégéfippe géne, & de tous les autres fon Collégue, Longin cite ce Rhéteurs. paffage fans doute pour en Condamner l'hyperbole qui eft

(2) Qu'avec emphase. ] Qu'en exagérant. TOLLIUS,

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