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les autres, & fur tout les Anciens, quand il les aura habillés des impropriétés & des baffes de fa traduction.

V

CONCLUSION.

OILA un léger échantillon du nombre infini de fautes, que M. P** a commises en voulant attaquer les défauts des Anciens. Je n'ai mis ici que celles qui regardent Homere & Pindare; encore n'y en ai-je mis qu'une très-petite partie, & felon que les paroles de Longin m'en ont donné l'occafion. Car fi je voulois ramaffer toutes celles qu'il a faites fur le feul Homere, il faudroit un très-gros volume. Et que feroit-ce donc fi j'allois lui faire voit fes puérilités fur la Langue Grecque & fur la Langue Latine; fes ignorances fur Platon, fur DémoAthéne, fur Ciceron, fur Horace, fur Térence, fur Virgile, &c. les fauffes interprétations qu'il leur donne, les folécifmes qu'il leur fait faire, les baffeffes & le galimathias qu'il leur prête ? J'aurois befoin pour cela d'un loifir qui me manque.

Je ne réponds pas néanmoins, comme j'ai déja dit, que dans les éditions de mon Livre, qui pourront fuivre celle-ci, je ne lui découvre encore quelques-unes de les erreurs, & que je ne le faffe peutêtre repentir, de n'avoir pas mieux profité du paffage de Quintilien, qu'on a allégué autrefois fi à propos à (1) un de fes freres fur un pareil fujet. Le voici. Modeftè tamen & circunfpecto judicio de tantis viris pronuntiandum eft, ne quod plerifque accidit damnent quæ non intelligunt. Il faut parler avec beaucoup de modeftie & de circonfpection de ces grands hommes, de peur qu'il ne vous arrive ce qui eft arrivé à plufieurs, de blâmer ce que vous n'entendez pas. M. p** me répondra peut-être ce qu'il m'a déja répondu ; Qu'il a gardé cette modestie, & qu'il n'est (1) Racine dans la Préface d'Iphigénie.

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point vrai qu'il ait parlé de ces grands hommes aveo le mépris que je lui reproche; mais il n'avance fi hardiment cette fauffeté, que parce qu'il fuppofe, & avec raifon, que perfonne ne lit fes Dialogues. Car de quel front pourroit-il la foutenir à des gens qui auroient seulement lû ce qu'il y dit d'Homere.

Il eft vrai pourtant, que comme il ne fer foucie point de fe contredire, il commence fes invectives contre ce grand Poëte, par avouer, qu'Homere eft peut-être le plus vafte & le plus bel efprit qui ait ja mais été. Mais on peut dire que ces louanges forcées qu'il lui donne, font comme les fleurs dont il couronne la victime qu'il va immoler à fon mauvais fens n'y ayant point d'infamies qu'il ne lui dife dans la fuite; l'accufant d'avoir fait fes deux Poëmes fans deffein, fans vûë, fans conduite. Il va même jufqu'à cet excès d'absurdité, de foutenir qu'il n'y a jamais eu d'Homere; que ce n'eft point un feul homme qui a fait l'Iliade & l'Odyffée; mais pluheurs pauvres aveugles, qui alloient, dit-il, de maifon en maison réciter pour de l'argent de petits Poëmes qu'ils compofoient au hazard; & que c'eft de ces Poëmes qu'on a fait ce qu'on appelle les Ouvrages d'Homere. C'eft ainfi que de fon autorité privée il métamorphofe tout à coup ce vafte & bel efprit en une multitude de miférables gueux. Enfuite il employe la moitié de fon Livre à prouver, Dieu fçait comment, qu'il n'y a dans les Ouvrages de ce grand homme ni ordre, ni raifon, ni économie, ni fuite, ni bien-féance, ni noblesse de moeurs que tout y eft plein de baffeffes, de chevilles, d'expreffions groffieres: qu'il eft mauvais Géographe, mauvais Aftro. nome, mauvais Naturalifte: finiffant enfin toute cette critique par ces belles paroles qu'il fait dire à fon Chevalier. Il faut que Dieu ne faße pas grand cas de la réputation de bel efprit, puifqu'il permet que ces titres foient donnés, préférablement au refte du genre humain, à deux hommes, comme Platon & Homere,

Philofophe qui a des vifions fi bizarres, & à un Poëte qui dit tant de chofes fi peu fenfées. A quoi M. l'Abbé du Dialogue donne les mains, en ne le contredifant point, & fe contentant de paffer à la critique de Virgile.

C'eft là ce que M. P** appelle parler avec retenuë d'Homere, & trouver, comme Horace, que ce grand Poëte s'endort quelquefois. Cependant comment peut-il fe plaindre que je l'accufe à faux, d'avoir dit qu'Homere étoit de mauvais fens ? Que fignifient donc ces paroles, Un Poëte qui dit tant de chofes f peu fenfées? Croit-il s'être fuffifamment justifié de toutes ces abfurdités, en foutenant hardiment, com me il a fait, qu'Erasme & le Chancelier Bacon ont par lé avec auffi peu de refpect que lui des Anciens? Ce qui eft abfolument faux de l'un & de l'autre, & fur tout d'Erafme, l'un des plus grands admirateurs de l'Antiquité. Car bien que cet excellent homme fe foit moqué avec raifon de ces fcrupuleux Grammairiens, qui n'admettent d'autre latinité que celle de Ciceron, & qui ne croyent pas qu'un mot foit La tin, s'il n'eft dans cet Orateur : jamais homme au fond n'a rendu plus de justice aux bons Ecrivains de l'Antiquité, & à Ciceron même, qu'Erasme.

M. P** ne fçauroit donc plus s'appuyer que fur le feul exemple de Jules Scaliger. Et il faut avouer qu'il l'allégue avec un peu plus de fondement. En effet, dans le deffein que cet orgueilleux Sçavant s'étoit propofé, comme il le déclare lui-même, de dreffer des autels à Virgile, il a parlé d'Homere d'une maniere un peu profane. Mais outre que ce n'eft que par rapport à Virgile, & dans un Livre qu'il appelle Hypercritique, voulant témoigner par là qu'il y paffe toutes les bornes de la critique ordi naire: il eft certain que ce Livre n'a pas fait d'honneur à fon Auteur, Dieu ayant permis que ce fçavant homme foit devenu alors un M. P**, & foit tombé dans des ignorances & groffieres, qu'elles lui

ont attiré la rifée de tous les gens de Lettres, & de fon propre fils même.

Au refte, afin que notre Cenfeur ne s'imagine pas que je fois le feul qui, aye trouvé fes dialogues fi étranges, & qui aye paru fi férieusement choqué de l'ignorante audace avec laquelle il y décide de tout ce qu'il y a de plus révéré dans les Lettres: Je ne fçaurois, ce me femble, mieux finir ces Remarques fur les Anciens, qu'en rapportant le mot (1) d'un très-grand Prince d'aujourd'hui, non moins admirable par les lumieres de fon efprit, & par l'étendue de fes connoiffances dans les Lettres, que par fon extrême valeur, & par fa prodigieufe capacité dans la guerre, où il s'eft rendu le charme des Officiers & des foldats ; & où, quoiqu'encore fort jeune, il s'est déja fignalé par quantité d'actions dignes des plus expérimentés Capitaines. Ce Prince, qui, à l'exemple du fameux Prince de Condé fon oncle paternel, lit tout, jufqu'aux Ouvrages de M. P** ayant en effet lû fon dernier Dialogue, & en paroiffant fort indigné, comme quelqu'un eut pris la liberté de lui demander ce que c'étoit donc que cet Ouvrage, pour lequel il témoignoit un fi grand mépris: C'est un Livre, dit-il, où tout ce que vous avez jamais oui louer au monde, eft blâmé, & où tout ce que vous avez jamais entendu blâmer, eft loué.

(1) D'un très-grand Prince | d'aujourd'hui. ] Le Prince de Conti François-Louis de

Bourbon, né le zo d'Avril 1664. & mort à Paris, le 22 de Février 1709.

AVERTISSEMENT*

Touchant la dixième Réflexion sur Longin.

L

ES amis de feu M. Despre aux fçavent qu'après qu'il eut eu connoiffance de la Lettre qui fait le fujet de la dixiéme Réflexion, il fut long-tems fans fe déterminer à y répondre. Il ne pouvoit fe résoudre à prendre la plume contre un Evêque, dont il respecteit la perfonne le caractere, quoiqu'il ne fût pas fort frappé de fes raifons. Ce ne fut donc qu'après avoir va cette Lettre publiée par M. le Clerc, que M. Defpreaux ne put réfifter aux inftances de fes amis, & de plufieurs perfonnes diftinguées par leur dignité, autant que par leur zéle pour la Religion, qui le prefferent de mettre par écrit ce qu'ils lui avoient oui dire fur ce fujet, lorf qu'ils lui eurent repréfenté, que c'étoit un grand fcandale, qu'un homme fort décrié fur la Religion, s'appuyat de l'autorité d'un fçavant Evêque, pour foutenir une Critique, qui paroiffoit plutôt contre Moife que contre Longin.

M. Defpreaux fe rendit enfin, & ce fut en déclarant qu'il ne vouloit point attaquer M. l'Evêque d'Avranches, mais M. le Clerc ; ce qui eft religieusement obJervé dans cette dixième Réflexion. M. d'Avranches étoit informé de tout ce détail, & il avoit témoigné en être content, comme en effet il avoit fujet de l'être.

Après cela, depuis la mort de M. Defpreaux, cette Lettre a été publiée dans un Recueil de plufieurs Piéces, avec une longue Préface de M. l'Abbé de Tilladet, qui les a ramaffées & publiées, à ce qu'il affure, fans la permiffion de ceux à qui appartenoit ce tréfor. On

* Cet Avertiffement a été | naudot de l'Académie Francomposé par M. l'Abbé Re-çoise.

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