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pas ufé avec plus de difcrétion que Virgile? Que penferont-ils de Voiture, qui n'a point fait confcience de rire aux dépens du célébre Neuf-Germain quoi qu'également recommandable par l'antiquité de fa barbe, & par la nouveauté de fa Poëfie? Le banniront-ils du Parnaffe, lui & tous les Poëtes de l'Antiquité, pour établir la fûreté des Sots & des Ridicules? Si cela eft, je me confolerai aifément de mon exil. Il y aura du plaifir d'être relegué en fi bonne compagnie. Raillerie à part, ces Meffieurs veulent-ils être plus fages que Scipion & Lélius, plus délicats qu'Augufte, plus cruels que Neron? Mais eux qui font fi rigoureux envers les Critiques, d'où vient cette clémence qu'ils affectent pour les méchans Auteurs? Je vois bien ce qui les afflige: ils ne veulent pas être détrompés. Il leur fâche d'avoir admiré lérieusement des Ouvrages que mes Satires expofent à la rifée de tout le monde, & de fe voir condamnés à oublier dans leur vieilleffe ces mêmes Vers qu'ils ont autrefois appris par cœur comme des chefs-d'oeuvres de l'Art. Je les plains fans doute mais quel reméde? Faudra-t-il, pour s'accommoder à leur goût particulier, renoncer au fens commun? Faudra-t-il applaudir indifféremtoutes les impertinences qu'un ridicule aura répanduës fur le papier ? Et au lieu (1) qu'en certains pays on condamnoit les méchans Poëtes à effacer leurs Ecrits avec la langue, les livres deviendront-ils désormais un afyle inviolable, où toutes

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d'Eloquence & de Poëfie, qui s'y faifoient en Langue Gree que & en Langue Latine; mais il établit auffi des peines con

(1) En certains pays. ] A Lyon, dans un Temple célébre, que les foixante Nations des Gaules firent bâtir en P'honneur de l'Empereur Au-tre ceux qui ne réuffiroient gufte, au confluent du Rhô- pas en ces fortes de difputes. ne & de la Saône, dans l'en- Les vaincus étoient obligés droit où eft à préfent l'Abbaye de donner des prix aux vaind'Ainai. L'Empereur Caligula queurs, & de compofer des y inftitua des Jeux, & y fon- difcours à leur louange. Mais da des prix pour les difputes ceux dont les difcours avoient

Les fottifes auront droit de bourgeoifie; où l'on n'ofera toucher fans profanation? J'aurois bien d'autres chofes à dire fur ce fujet. Mais comme j'ai déja traité de cette matiere dans ma neuviéme Satire, il eft bon d'y renvoyer le Lecteur.

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été trouvés les plus mauvais, tre plongés dans le Rhône. étoient contraints de les effa- Suétone, Vie de Caligula, 20. cer avec la Langue ou avec C'eft à ces fortes de peines 'une éponge; pour éviter d'ê- que Juvénal a fait allufion are battus de verges, ou d'ê- ¦ dans fa premiere Satire :

Palleat, ut nudis preffit qui calcibus anguem,
Ant Lugdunenfem Rhetor dicturus ad Aram.

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REMERCIMENT

A MESSIEURS

DE L'ACADEMIE

FRANCOIS E. (1)

MESSIEURS,

L'honneur que je reçois aujourd'hui est quelque chofe pour moi de fi grand, de fi extraordinaire, de fi peu attendu, & tant de fortes de raifons fembloient devoir pour jamais m'en exclure, que dans le moment même où je vous en fais mes remercimens, je ne fçai encore ce que je dois croire. Eftil poffible, eft-il bien vrai, que vous m'aïez en effet jugé digne d'être admis dans cette illuftre compagnie, dont le fameux établiffement ne fait guéres moins d'honneur à la mémoire du Cardinal de Ri

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chelieu, que tant de chofes merveilleufesqui ont été exécutées fous fon miniftére? Et que penferoit ce grand Homme? Que penferoit ce (1) fage Charicelier qui a poffedé après lui la Dignité de votre Protecteur, & après lequel vous avez jugé ne pouvoir choisir d'autre Protecteur que le Roi même ? Que penferoient-ils, dis-je, s'ils me voïoient aujourd'hui entrer dans ce Corps fi célébre, l'objet de leurs foins & de leur eftime, & où par les loix qu'ils ont établies, par les maximes qu'ils ont maintenuës, perfonne ne doit être reçu qu'il ne foit d'un merite fans reproche, d'un efprit hors du commun en un mot, semblable à vous ? Mais à qui estce encore que je fuccéde dans la place que vous m'y donnez? N'est-ce pas à un Homme (2) également confiderable, & par fes grands emplois, & par La profonde capacité dans les affaires ; qui tenoit une des premieres places dans le Confeil, & qui en tant d'importantes occafions a été honoré de la plus étroite confiance de fon Prince; à un Magiftrat non moins fage qu'éclairé, vigilant, laborieux, & avec lequel, plus je m'examine, moins je me trouve de proportion?

Je fçai bien, MESSIEURS, & perfonne ne l'ignore, que dans le choix que vous faites des Hommes propres à remplir les places vacantes de votre favante Affemblée, vous n'avez égard ni au rang ni à la dignité : que la politeffe, le fçavoir, la connoiffance des belles lettres, ouvrent chez vous l'entrée aux honnêtes gens, & que vous ne croïez point remplacer indignement un Magiftrat du premier ordre, un Miniftre de la plus haute élévation, en lui fubftituant un Poëte célébre, un Ecrivain

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ilhiftre par fes Ouvrages, & qui n'a fouvent d'au tre dignité que celle que fon merite lui donne fur le Parnaffe. Mais en qualité même d'Homme de lettres, que puis-je vous offrir qui foit digne de la grace dont vous m'honorez? Seroit-ce un foible recueil de Poëfies, qu'une témérité heureuse, & quelque adroite imitation des Anciens, ont fait valoir, plûtôt que la beauté des penfées, ni la richeffe des expreffions? Seroit-ce une traduction si éloignée de ces grands chefs-d'oeuvres que vous nous donnez tous les jours, & où vous faites fi glorieusement revivre les Thucidides, les Xenophons, les Tacites, & tous ces autres célébres Heros de la fçavante Antiquité? Non MESSIEURS, vous connoiffez trop bien la jufte valeur des chofes, pour païer d'un fi grand prix des Ouvrages auffi médiocres que les miens, & pour m'offrir de vous-mêmes, s'il faut ainfi dire, fur un fi léger fondement, un honneur que la connoiffance de mon peu de merite ne m'a pas laiffé feulement la hardieffe de demander.

Quelle eft donc la raison qui vous a pû inspirer fi heureusement pour moi en cette rencontre ? Je commence à l'entrevoir ; & j'ose me flater que je ne vous ferai point fouffrir en la publiant. La bonté qu'a eu le plus grand Prince du monde, en voulant bien que je m'emploïaffe (1) avec un de vos plus illuftres Ecrivains à ramaffer en un corps le nombre infini de fes actions immortelles ; cette permiffion, dis-je, qu'il m'a donnée, m'a tenu lieu auprès de vous de toutes les qualités qui me manquent. Elle vous a entiérement déterminés en ma faveur. Oui, MESSIEURS, quelque jufte fujer qui dût pour jamais m'interdire l'entrée de votre Académie, vous n'avez pas crû, qu'il fût de votre équité de fouffrir, qu'un Homme destiné à parler

(1) Avec un de vos plus illufres Ecrivains. ] M. Racine avoit été reçû à l'Académie

en 1673. Il fut nommé en 1677. avec M. Defpreaux, pour écrire l'Histoire du Roi.

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