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fit avantageufement mon apologie contre ceux qui vouloient m'accufer alors de libertinage & de mauvaifes mœurs. C'étoit un homme d'un fçavoir étonnant & paffionné admirateur de tous les bons Livres de l'Antiquité; & c'est ce qui lui fit plus aisément fouffrir mes Ouvrages, où il crut entrevoir quelque goût des Anciens. Comme fa piété étoit fincere, elle étoit auffi fort gaïe, & n'avoit rien d'embarraffant. Il ne s'effraïa pas du nom des Satires que portoient ces Ouvrages, où il ne vit en effet que des Vers & des Auteurs attaqués. Il me loua même plufieurs fois d'avoir purgé, pour ainfi dire, ce genre de Poëfie de la faleté qui lui avoit été jufqu'alors comme affectée. J'eus donc le bonheur de ne lui être pas défagréable. Il m'appella à tous fes plaifirs & à tous fes divertiffemens, c'eft-à-dire à fes lectures & à fes promenades. Il me favorifa même quelquefois de fa plus étroite confidence, & me fit voir à fond fon ame en entier. Et que n'y vis-je point? Quel tréfor furprenant de probité & de juftice! Quel fonds inépuifable de piété & de zéle ! Bien que fa vertu jettât un fort grand éclat au dehors, c'étoit toute autre chofe au dedans ; & on voïoit bien qu'il avoit foin d'en tempérer les raïons, pour ne pas bleffer les yeux d'un Siècle auffi corrompu que le nôtre. Je fus fincérement épris de tant de qualités admirables; & s'il eût beaucoup de bonne volonté pour moi, j'eus auffi pour lui une très-forte attache. Les foins que je lui rendis ne furent mêlés d'aucune raifon d'intérêt mercénaire : & je fongeai bien plus à profiter de fa converfation que de fon crédit. Il mourut dans le tems que cette amitié étoit en fon plus haut point, & le fouvenir de fa perte m'afflige encore tous les jours. Pourquoi faut-il que des hommes fi dignes de vivre foient fi-tôt enlevés du monde, tandis que des miférables & des gens de rien arrivent à une extrême vieilleffe? Je ne m'étendrai pas davantage fur un fujet fi trifte; car je sens bien

que fi je continuois à en parler, je ne pourrois m'empêcher de mouiller peut être de larmes la Préface d'un Livre de Satires & de plaifanteries.

AVERTISSEMENT

J'a

Mis après la Préface en 1694.

AU

LECTEUR.

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'A1 laiffé ici la même Préface qui étoit dans les deux éditions précédentes: à caufe de la juftice que j'y rends à beauconp d'Auteurs que j'ai attaqués. Je croïois avoir affez fait connoître par certe démarche, où perfonne ne m'obligeoit, que ce n'eft point un efprit de malignité qui m'a fait écrire contre ces Auteurs, & que j'ai été plûtôt fincere à leur égard, que médifant. M. Perrault néanmoins n'en a pas jugé de la forte. Ce galant homme au bour de près (1) de vingt-cinq ans qu'il y a que mes Satires ont été imprimées la premiere fois, est venu tout à coup, & dans le tems qu'il fe difoit de mes amis, réveiller des querelles entiérement oubliées, & me faire fur mes Ouvrages un procès que mes ennemis ne me faifoient plus. Il a compté pour rien les bonnes raisons que j'ai mifes en rimes pour montrer qu'il n'y a point de médisance à se moquer des méchans écrits: & fans prendre la peine de réfuter ces raifons, a jugé à propos de me traiter dans un Livre en termes affez peu obfcurs, de médifant, d'envieux, de calomniateur, d'homme qui n'a fongé qu'à établir la réputation fur la ruine de celle des

(1) De vingt-cinq ans. ] 11 | ans. ] Car la premiere édition falloit dire de près de trente des Satires fut faite en 1666.

autres. Et cela fondé principalement fur ce que j'ai dit dans mes Satires, que Chapelain avoit fait des Vers durs, & qu'on étoit à l'aise aux fermons de l'Abbé Cotin.

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Ce font en effet les deux grands crimes qu'il me reproche, jufqu'à vouloir me faire comprendre que je ne dois jamais efpérer de rémiffion du mal que j'ai caufé, en donnant par là occafion à la postérité de croire que fous le régne de Louis le Grand il y a cu en France un Poëte ennuïeux & un Prédicateur affez peu fuivi. Le plaifant de l'affaire eft, que dans le Livre qu'il fait pour justifier notre Siécle de cette étrange calomnie, îl avoue lui-même que Chapelain eft un Poëte très-peu divertiffant, & fi dur dans fes expreffions, qu'il n'eft pas poffible de le lire. Il ne convient pas ainfi du defert qui étoit aux prédications de l'Abbé Cotin. Au contraire il affure qu'il a été fort preffé à un des Sermons de cet Abbé, mais en même tems il nous apprend cette jolie particularité de la vie d'un fi grand Prédicateur que fans ce Sermon, où heureufement quelques-uns de fes Juges fe trouvérent, la Juftice fur la requête de fes parens, lui alloit donner un Curateur comme à un imbécile. C'est ainsi que M. Perrault fçait défendre fes amis, & mettre en usage les leçons de cette belle Rhétorique moderne inconnue aux Anciens, où vrai-semblement il a appris à dire ce qu'il ne faut point dire. Mais je parle affez de la jufteffe d'efprit de M. Perrault dans mes Réflexions Critiques fur Longin; & il eft bon d'y renvoïer les Lecteurs.

Tout ce que j'ai ici à leur dire, c'est que je leur donne dans cette nouvelle édition, outre mes anciens Ouvrages exactement revûs, ma Satire contre les femmes, l'Ode fur Namur, quelques Epigrammes, & mes Réflexions Critiques fur Longin. Ces Réflexions que j'ai compofées à l'occafion des Dialogues de M. Perrault, fe font multipliées fous ma

main beaucoup plus que je ne croïois, & font caufe que j'ai divifé mon Livre en deux volumes. J'ai mis à la fin du fecond volume les Traductions Latines qu'ont fait de mon Ode les deux plus célébres Profeffeurs en Eloquence de l'Univerfité : je veux dire M. Lenglet & M. Rollin. Ces Traductions ont été généralement admirées, & ils m'ont fait en cela tous deux d'autant plus d'honneur, qu'ils fçavent bien que c'eft la feule lecture de mon Ouvrage qui les a excités à entreprendre ce travail. J'ai aussi joint à ces Traductions quatre Epigrammes Latines que (1) le Réverend Pere Fraguier Jéfuite a faites contre le Zoile Moderne. Il y en a deux qui font imitées d'une des miennes. On ne peut rien voir de plus poli ni de plus élégant que ces quatre Epigrammes; & il femble que Carulle y foit reffufcité pour venger Catulle. J'efpere donc que le Public me fçaura quelque gré du préfent que je lui en fais.

Au refte dans le tems que cette nouvelle édition de mes Ouvrages alloit voir le jour, (2) le Réverend Pere de la Landelle autre célébre Jéfuite m'a apporté une Traduction Latine qu'il a auffi faite de mon Ode, & cette Traduction m'a paru fi belle, que je n'ai pû réfister à la tentation d'en enrichir encore mon Livre, où on la trouvera avec les deux autres à la fin du fecond tome.

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AVERTISSEMENT,

Pour la premiere Edition de la Satire IX.
Imprimée féparément en 1668.

LE LIBRAIRE AU LECTEUR.

Orci le dernier Ouvrage qui eft forti de la plume du Sieur Defpréaux. L'Auteur, après avoir écrit (1) contre tous les hommes en général, a crû qu'il ne pouvoit mieux finir qu'en écrivant contre lui-même, & que c'étoit le plus beau champ de Satire qu'il pût trouver. Peut-être que ceux qui ne font pas fort inftruits des démêlés du Parnaffe, & qui n'ont pas beaucoup lû les autres Satires du même Auteur, ne verront pas tout l'agrément de celle-ci, qui n'en eft, à bien parler, qu'une fuite, Mais je ne doute point que les Gens de Lettres, & ceux fur tout qui ont le goût délicat, ne lui donnent le prix, comme à celle où il y a le plus d'art, d'invention & de fineffe d'efprit. Il y a déja du tems qu'elle eft faite l'Auteur s'étoit en quelque forte réfolu de ne la jamais publier. Il vouloit bien épargner ce chagrin aux Auteurs qui s'en pourront choquer. (2) Quelques libelles diffamatoires que l'Abbé Kautin & plufieurs autres euffent fait imprimer contre lui, il s'en tenoit affez vengé par le mépris que

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