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d'employer d'autres armes que celles de la raison; mais avec quelle noble vigueur employoit-il toutes les armes de la raison! Quand il avoit les préventions ou les paffions à combattre, ce n'etoit qu'à force de les éclairer qu'il en triomphoit. L'Academie a été formée trop tard, & elle n'a pû poffeder un Orateur d'un caractere fi rare, mais il falloit qu'elle lui pût opposer un Rival.

Jufqu'icy les Traitez de Paix avoient la guerre pour veritable objet. On fe ménageoit ou un repos de quelques années pour réparer fes forces, ou plus de forces pour attaquer un Ennemi commun; une haine diffimulée par neceffité, une vengeance meditée de loin, une ambition adroitement cachée, formoient toutes les liaisons ; & le defir fincere d'une tranquillité generale & durable,étoit un fentiment inconnu à la Politique. C'est vous, MONSE IGNeur, qui en fuivant les vûës, &, ce qui

nous

nous touche encore davantage, le caractere du Prince dépofitaire du Sceptre, avez le premier amené dans le monde une nouveauté fi peu attenduë. Vous avez fait des Traitez de Paix qui ne pouvoient produire que la paix, vous en avez ménagé d'autres qui vinffent de plus loin seconder vos principaux deffeins ; & par un grand nombre de ces liens differents, qui tiennent tous enfemble, & fe fortifient mutuellement, vous avez eû l'art d'enchaîner fi bien toute l'Europe, qu'elle en eft en quelque forte devenuë immobile & qu'elle fe trouve réduite à un heureux & fage repos.

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Quel doit être pour tous les hommes le charme de ce repos, fi les Souverains qui habitent une région ordinairement inaccessible aux malheurs de la guerre, ont fenti comme les peuples les avantages que leur apportoit la fituation prefente de P'Europe Ils les ont fentis, & fi viRr

vement, qu'ils ont tous concouru vous faire obtenir la Pourpre. Eux à qui l'union la plus étroite permet encore tant de divifion furune infinitéde fujets particuliers, ils fe font rencontrez dans l'entreprise de procurer votre élevation ; ils ont même relâché de leurs droits en votre faveur, & peut-être pour la premiere fois ont facrifié leurs délicates jaloufies. Le Souverain Pontife n'a entendu qu'une demande de la bouche de tous les Ambaffadeurs, & vous avez paru être un Prélat de tous les Etats Catholiques, & un Miniftre de toutes les Cours.

Ce même efprit, qui sçait si bien concilier, vous l'avez porté dans la grande affaire dont l'Eglife de France n'eft occupée que depuis trop long-temps; mais combien les interefts politiques font-ils plus aisez à maniere, que ceux de Religion, que chacun fe fait une loy de fuivre tels qui les a conçus, qui n'admet

tent point une modefte déference aux lumieres fuperieures d'autrui ; qui ne peuvent ceder, je ne dis pas à des confiderations étrangeres, mais même à d'autres interêts de Religion plus importants, qui enfin femblent avoir le droit de changer l'aveugle opiniâtreté en une conftance refpectable? Malgré ces difficultez renaiffantes à chaque inftant, des vûës fages & fagement communiquées, des foins agiffants avec circonfpection, mais toûjours agiffants, ont réüni les fentimens de prefque tous les Prélats du Royaume; & il nous est permis déformais d'attendre une Paix entiere, où l'Eglife n'aura plus rien à craindre du zéle & de l'amour même de fes Enfans.

Ceft dans cette difpofition finguliere des affaires generales que fe fait le paffage paisible du plus glorieux regne qu'ait vû la France, à un regne également glorieux qu'elle ef

pere. Nul obftacle étranger n'empê chera que les inclinations naturelles du Roy, cultivées avec tant de foin par de fi excellens Maîtres, ne fe déployent dans toute leur étenduë. II n'aura qu'à vouloir rendre fes peuples heureux, & tout nous dit qu'il le voudra. Déja nos defirs les plus impatients trouvent en lui tout ce qu'ils cherchent, & nos efperances à force de fe confirmer de jour en jour, ne font plus de fimples efpe

rances.

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S'il étoit befoin qu'elles s'accruffent, elles s'accroîtroient encore par l'application que ce jeune Monarque donne depuis quelque temps aux matieres du Gouvernement, par ces entretiens où il veut bien vous faireentrer. Là vous pefez à fes yeux les forces de fon Etat, & des differents Etats qui nous environnent; vous lui dévoilez l'interieur de fonRoyaume, & celui du refte de l'Europe, tel que vos regards perçants l'ont pénetré;

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