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CHAPITRE III.

Le Blanc.

Si les Peintres en Email d'aujourd'hui ne se fervent point de blanc dans leurs ouvrages, ce n'eft pas qu'il ne leur foit extrêmement néceffaire; la difficulté d'en avoir de beau, jointe à celle de pouvoir l'employer avec facilité, les a déterminés à s'en paffer; pour y fuppléer, ils ont pris le parti de ne peindre que fur des fonds blancs, & de fe fervir du fond, en l'épargnant, pour produire les blancs & les clairs dont ils peuvent avoir befoin.

On fera peut-être furpris de ce qu'ils n'ont pas cherché à employer pour leurs blancs la même matiere dont ils fe fervent pour les fonds, c'eft-à-dire, l'Émail blanc; mais il faut faire attention que l'Émail eft un verre, & que l'on a vu qu'il étoit impoffible de peindre fimplement avec un verre. D'un autre côté, il ne faut pas que la couleur porte d'épaiffeur fur le fond, ce

qui ne manqueroit pas d'arriver fi l'on fe fervoit d'Émail blanc. La difficulté étoit de ménager le fond pour faire paroître le blanc dans les petites parties où il étoit abfolument indifpenfable de le voir pur; par exemple, dans une tête, les deux petits points blancs qui doivent être fur la prunelle dans les yeux, devenoient impoffibles à ménager par leur extrême petiteffe. C'eft ce qui a quelquefois obligé des Peintres à ne mettre ces points blancs dans les yeux de leurs portraits, qu'après qu'ils étoient entiérement finis ; & pour cela ils choififfoient dans de l'Email écrafé deux petits grains qu'ils colloient avec de la gomme, & ils les faifoient enfuite légérement parfondre pour leur donner de la rondeur & les attacher.

Lorfqu'on étoit affez heureux pour avoir une couleur foncée & folide, on n'avoit aucun moyen pour l'éclaircir & en faire une fuite de nuances différentes; fi par malheur cette couleur devenoit plus foncée au feu & ne se trouvoit plus d'accord, il n'y avoit point d'efpérance de pouvoir raccommoder ce défaut. Si une couleur fe trou

voit dégradée par le feu, on ne pou voit y remédier en mettant une autre couleur par deffus, puifque cette derniere laiffoit toujours appercevoir les défauts de celle qui étoit par deffous; les reflets & les coups de lumiere qui donnent de la rondeur & de la vérité aux objets, étoient toujours mal exécutés. Des couleurs qui s'étendent trop & s'imbibent dans les fonds; des fentes & des œillets qui furvenoient dans les feux tout contribuoit à défoler un Artiste qui voyoit perdre ou devenir défectueux en moins de deux minutes,. un ouvrage qui lui avoit coûté quel quefois plufieurs mois de travail.

On ofe affurer que le blanc, dont on va donner la compofition, remédie à tous ces inconvénients & que par fon moyen le Peintre en Émail pourra compofer une palette de couleurs avec autant d'étendue & de facilité qu'un Peintre à l'huile, puifqu'il fe mêle également bien avec toutes les couleurs fans leur donner aucune épaiffeur; il leur donne même de la force, & les met en état de foutenir tous les feux fans fe dégrader. On n'eft point obligé

de ménager aucunes parties des fonds, & l'on peint large; ce qui fait que la Peinture paroît mieux empâtée & plus moëlleufe. Ce blanc s'emploie trèsfacilement; ainfi on peut,par fon moyen, rehauffer les couleurs & donner des coups de lumieres où le Peintre en a befoin. S'il arrive que quelques-unes des couleurs n'ayent pas réuffi, on peut peindre par deffus & raccommoder l'ouvrage fans qué les couleurs qui font deffous, puiffent nuire. Si en paffant l'ouvrage au feu, il arrive qu'il fe faffe un œillet ou quelque fente, on perce l'œillet avec un diamant, on remplit le trou avec le blanc mêlé de la couleur qui convient , on fait parfondre, & on peint deffus comme s'il n'étoit rien arrivé : on raccommode de même les fentes. Lorsqu'on doute de la qualité de l'Émail, dont on s'eft fervi pour faire le fond, on peut avant de peindre, mettre une couche de blanc fur toute la piece, & la faire parfondre enfuite fous la moufle; on fent aifément que les couleurs deviennent alors plus analogues au fond, & font moins fujettes à fouffrir de changement. D'ailleurs,

fi le fond avoit quelques taches, cette manœuvre empêcheroit que les couleurs puffent en être gâtées.

Puifqu'au moyen du blanc on eft le maître d'étendre les nuances des couleurs autant qu'on le defire, il paroît qu'à la rigueur, fur-tout lorsqu'on peint en camayeux, on pourroit finir un ouvrage en ne le faifant paffer qu'une fois au feu; ce qui feroit un grand avantage, principalement pour la Pein ture fur la porcelaine.

Entre tous les métaux, dont les diffolutions donnent des précipités blancs, l'étain paroît le plus propre à fournir le blanc dont on a befoin. On tire des précipités blancs du plomb & du bifmuth qui fe vitrifient aisément ; mais la moindre fubftance étrangere eft capable de les réduire, c'est-à-dire, de leur reftituer leur forme métallique. Il n'en eft pas ainfi de l'étain dont la chaux fupporte un très-grand feu fans fe révivifier; d'ailleurs, cette chaux fe mêle aifément avec le verre en fufion qu'elle rend opaque, blanc & facile à mettre en fonte; elle a auffi l'avantage d'entrer pour beaucoup dans la compofition

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