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faire d'un General de la Croifade contre les Albigeois, il fit fi bien connoître les grandes qualitez de Montfort aux Princes Croifez, il agit fi vive-ment auprés du Legat Arnauld, & le convainquit de telle forte le

que Comte étoit le Chef dont les Catholiques avoient befoin, que ce Comte eut enfin la preference: Ce fervice. important rendu à Montfort ne fit: que rendre plus vive la reconnoiffance de l'Abbé; car auffi-tôt qu'il vid fon ami à la tête des Troupes, il parcourut la plupart des Provinces du Royaume, en prefchant infatigable-ment la Croifade contre les Heretiques du Languedoc; & dès qu'il aprit le danger où la nouvelle revolution mettoit fon bien-faiteur, il revint avec une viteffe incroyable lui aprendre l'état heureux où fes Prédications avoient mis les efprits; qu'ùne multitude innombrable de pelerins étoient déja en marche pour venir à fon fecours, & que pourvû qu'il pût tenir quelques femaines, tout plieroit enfuite devant lui. Ces deux illuftres amis continuerent à fe prévenir l'un l'autre dans toutes les occafions.. Montfort fit élever l'Abbé, fur le

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Siege Epifcopal de Carcaffonne comme nous le verrons dans peu tems; & l'Abbé, aprés avoir vû le Comte étendre fes Conquêtes dans: plufieurs Provinces, fit écrire fon Hiftoire de la maniere qu'il crut la plus propre pour immortalifer fon

nom.

Cependant la terreur que Montfort, comme je l'ai dit, infpiroit à la plupart de fes ennemis ne l'empefchoit pas de voir le danger où il étoit lui & fes Troupes : il écrivit aux Magiftrats de Touloufe que jamais les Bourgeois de leur Ville n'auroient une conjoncture plus heureufe pour executer le ferment qu'ils avoient fait de fervir contre les heretiques; qu'ils. pouvoient feuls, & avant la venuë des François, achever la Guerre.

De telles remontrances. n'étoient plus de faifon; c'étoit avec l'Armée floriffante qui avoit inondé quelques. mois auparavant le Languedoc, que Touloule avoit traité, & non pas. avec Montfort. On ceffoit de le craindre depuis qu'il ceffoit d'être en état de nuire. En vain les Legats Milon & Hugues Evefque de Riez, dans un Concile qu'ils. tinrent à Avignon,

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le 6. Septembre, recommanderent qu'on pouffat les Albigeois, & d'un confentement unanime avec les Archevefques de Vienne d'Arles d'Embrun, d'Aix, & vingt Evel ques, menacerent les Touloufains. des foudres de l'Eglife. En vain Montfort alloit jufqu'aux portes de leur Ville punir dans le fang des Albigeois & dans le pillage de leurs terres l'impieté des heretiques. Touloufe perfifta dans le deffein de defi Montfort ne venoit pas l'attaquer, & de fe déclarer pour les Novateurs, fi on ofoit la bloquer ou l'affieger. Le Comte de Toulouse n'étoit plus dans le Languedoc, il. étoit allé à Rome en aparence dans le deffein de conclure entierement fa paix avec l'Eglife: mais au fond pour tâcher de furprendre les efprits, & de les aigrir contre les Croifez.

meurer neutre,

Saint Pere, difoit-il au Pape, celui que vous voyez à vos pieds a pû lever. cent mille hommes pour fe venger des calomnies dont l'Abbé de Cifteaux le· flétrit, en le faifant paffer dans toute l'Europe pour un beretique, pour un homicide, pour un tyran. Loin de prendre les Armes, je me fuis anéanti

devant vos Legats jusqu'à paroître a leurs yeux dans un étas où je ne croyois pas qu'ils vouluffent réduire un Prince, jufqu'à leur livrer mes plus fortes Places pour les convaincre de la fincerité de ma penitence. La derniere Campagne j'ai réuni mes forces à celles des Croifez, pour accabler mon neveu le Comte de Beziers; j'ai vû excommunier les Toulousains fans me plaindre ; j'ai fouffert que le Comte de Montfort General de vos Croifez vint jufqu'aux portes de Touloufe égorger on arrêter plufieurs de mes Sujets ; & malgré tant de démarches, dont chacune eft une preuve de ma de ma Religion, je ne puis efperer de paix avec vos Miniftres ; ils ne peuvent me condamner, & ils ne veulent pas reconnoître mon innocence Faites-moi connoître, tres-faint Pere, quelle nouvelle marque vous fou-. haitez de mon zéle, ou obligez vos Legats à terminer mon Affaire, ou à· me reftituer les Places que j'avois livrées pour vous affurer de ma parole.

Quoi que le Pape fçût parfaitementque Raymond, uni auffi étroitement que jamais avec les heretiques, étoit le plus mortel ennemi de l'Eglife Romaine & qu'il l'avoit recemment:

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méprifée jufqu'à n'executer aucun des Articles qu'il avoit fignez à Saint Gilles; néanmoins comme rien ne fied mieux au premier Siege du monde, que de porter la douceur & la moderation auffi loin qu'elle peut aller, fur tout avant que de condamner un auffi illuftre coupa ble que l'étoit celui dont je parle,. il eut toutes fortes de confiderations pour le Prince, il entendit fa confeffion comme il le fouhaitoit, il lui donna publiquement l'abfolution en plein Confiftoire, il lui fit des pre-fens magnifiques, il lui acorda de: nouveaux Commiffaires pour termi-ner au plûtôt fes Affaires dans le Lan- · guedoc; enfin il prit. toutes les voyes imaginables pour gagner par fes bontez un Prince qu'il pouvoit aifément : accabler par les Armes.

Un cœur capable de fe reconcilier avec l'Eglife eut pris cette occafion pour rompre avec les Albigeois, & Raymond ne s'en fervit que pour foupçonner que Rome avoit juré fa perte, puis qu'on renvoyoit fon Affaire à la decifion des Legats; d'ail-leurs ne pouvant rien obtenir de l'Empereur Othon, qui étoit moins dif G. S

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