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moins de plaifir s'il procura l'Ar chevefché de Narbonne à l'Abbé dé Cifteaux, & l'Evefché de Carcaffonne à Guy Abbé de Vaucernay, ces Prelats étoient fes amis intimes, & ils venoient de donner un nouvel éclat aux affaires de la Croifade. Ils avoient engagé Louis heritier prefomptif de la Couronne, à prendre. la Croix contre les heretiques du Languedoc, & à s'opofer aux deffeins du Roy d'Arragon, qui les protegeoit plus ardemment que jamais.

Raymond Comte de Toulouse: avoit perfuadé au Roy d'Arragon que fous le nom plaufible d'une Croifade, avec lequel on impofoit aux Peuples, le nouvel Archevefque de Narbonne & le Comte de Montfort afpiroient à la réduction entiere du Languedoc: que depuis qu'ils avoient obligé les Villes conquifes à payer tous les ans un tribut au Pape, on ne jugeoit plus à Rome que fuivant leurs lumieres: que Montfort feroit bien-tôt maître de Touloufe: qu'il feroit revivre les droits des Comtes de Toulouse fur Montpellier; & qu'il lui feroit auffi facile de perfuader que. l'Arragon mefme étoit plein d'Albis

geois, qu'il lui avoit été facile de perfuader que le Languedoc en étoit plein.

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A ces raifons le Comte avoit ajoûté quelque chofe de plus preffant; car beau-frere qu'il étoit déja du Roy. d'Arragon, il avoit demandé une autre fœur du Monarque pour fon fils unique, il lui avoit fait hommage de toutes les Terres avec les Comtes de Foix de Cominges & de Bearn; & cela ne faifant point encore affez d'impreffion fur l'Arragonnois, quifentoit à quel point fon fecours étoit neceffaire, Raymond lui avoit donné la Ville de Touloufe, content de perdre la plus belle Place de fes Etats pourvû que fon protecteur lui fournît les moyens de fe venger de Mont-fort.

Ainfi le Roy d'Arragon fe vid au but où il vifoit depuis long-tems. Il 1212. prit poffeffion de Touloufe, & il s'apliqua à trouver des moyens pour defarmer le General de la Ligue.

Il écrivit à Rome, où il étoit extrémement confideré, que les Sarrazins recommençoient la Guerre en Efpagne, & qu'il étoit neceffaire que Sa Sainteté fufpendît au moins pour

un tems les Indulgences qu'elle acordoit à ceux qui fe croifoient contre les Albigeois, afin que tous les Chrétiens fe réuniffent pour arrêter les progrez des Infidelles : que la défaite des Sarrazins, pour laquelle il alloit: expofer fa vie la Campagne fuivante, le mettroit en état d'étouffer fans peine les reftes de l'herefie: que fi au contraire Sa Sainteté laiffoit les anciennes Indulgences dans toute leur force, les François & les Allemans n'iroient jamais jufqu'en Efpagne pour y recueillir des fruits qu'ils pouvoient ramaffer dans le Languedoc qu'ainfi l'Espagne coureroit un danger manifefte de tomber entre les mains des Mahometans.

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&

Ces raisons firent impreffion fur l'efprit du Pape, & l'on promit de révoquer les Indulgences. Le Roy d'Arragon n'en eut pas plûtôt la nouvelle, qu'il envoya une Ambaffade magnifique en France. L'Evefque de Barcelonne qui en étoit Chef, avoit ordre de divulguer la révocation des Indulgences, & de demander la fille de Philipe- Augufte pour le Roy d'Arragon.

Par la nouvelle de la révocation des

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Indulgences, Pierre efperoit éteindre l'ardeur que les François avoient pour la Croilade du Languedoc; & par l'Alliance qu'il recherchoit à la Cour de France, il fe flâtoit d'y devenir fi agréable, qu'on n'y regarderoit plus de mauvais il les Comtes de Toulouse & de Foix, qu'il avoit -pris fous fa protection..

Ces Ambaffadeurs ne trouverent pas la France dans l'état où leur Maître avoit cru que la révocation des Indulgences pouroit la mettre. On y prêchoit actuellement par tout la Croifade, & ils n'oferent pas mefme dire qu'on alloit la fufpendre, fors qu'ils virent que Philipe- Augufte avoit laiffé prendre la Croix à Louis fon fils unique. Ils ne furent pas, plus heureux dans la demande qu'ils avoient à faire de la Princeffe. Louis informé de l'état des chofes par les Evefques de Toulouse & de Carcaffonne, remontra au Roy fon Pere que le procès intenté par le Roi d'Arragon à la Reine Marie de Montpellier fon Epoufe au fujet de leur Mariage étant encor pendant à Rome il falloit avant toutes chofes attendre la décifion du Pape. Il ajoûtoit, que

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file S. Siege differoit de juger cette Affaire, ce n'étoit pas qu'il y eût sujet de douter du bon droit de Marie de Montpellier: mais parce que l'on vouloit donner au Roy d'Arragon le tems de revenir de fon emportement contre la Reine, & de reconnoître lui-mefme l'injuftice de fes préten

tions.

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Les Ambaffadeurs ne convainqui- rent pas mefme Philipe-Augufte que leur Maître voulût, vivre dans une étroite amitié avec lui, n'y ayant nulle aparence que celui qui protegeoit le Comte de Touloufe, qu'on fçavoit être dans fes interefts de l'Empereur Othon & de Jean Roy d'Angleterre, fût un ami fincere de la France. Cependant comme Philipe avoit affez d'ennemis fans en faire de nouveaux, il figna le Traité d'union qu'on lui offroit, & du refte il ne s'engagea pas. davantage.

Mais ce Traité fut-il le motif qu porta Philipe à differer le voyage de fon fils qui étoit fur le point d'aller joindre le Comte de Montfort? ou le Roy n'agit-il de la forte que parce qu'il avoit befoin du Prince pour fopofer au Roy d'Angleterre, pen

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