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fefeur paifible du Languedoc: mais la réputation d'homme d'honneur & de parole lui parut préférable à un fi grand intereft.

Raymond n'avoit pas l'ame fi fcrupuleufe: Pendant fon fejour de Carcaflonne il examina ferieufement le fort & le foible de la Place; & apre nant à fon retour que Philipe-Augufte étoit mort à Mante le 14. de Juillet, & que Louis VIII. qui lui fuccedoit auroit affez d'autres ocupa rions à fon avenement à la Couronne, fans revenir faire d'inutiles tentatives devant Toulouse; il fe joignit de nouveau avec Bernard Comte de Foix pour recommencer la Guerre. Le prétexte fut le defir de rétablir Trin cavel fils du Vicomte de Beziers, fur qui les Croifez quelques années aupa ravant avoient pris Carcaffonne,

Le nom du jeune Trincavel, dont on fe fervoit, réveilla l'inclination que les Peuples avoient toûjours eu pour obeïr aux Princes de fa Maifon, & l'on ne doutoit pas qu'elle ne caufât dans les Comtez de Beziers & de Carcaffonne un changement fembla; ble à celui que Raymond le jeune avoit caufé dans la Comté de Tou,

loufe. Toutes les Places, excepté Carcaffonne, ou fe rendirent dès que Trincavel les fit fommer, ou promi→ rent de fe rendre. Amaury fe jetta dans la Ville qui lui reftoit, quoi qu'il n'eût aucun fecours à efperer ni du côté de la France, ni du côté du Languedoc, & il y foûtint les affauts de fes ennemis avec une refolu-tion & une fageffe qui fit dire à toute la terre, que s'il avoit eu en ce tems-là fous fes Drapeaux des Armées auffr nombreuses que les avoit cu fon pere, eu il en eût égalé la gloire. Une feule avanture, dont on nous a confervé le détail, & qui fuivit de prés la levée. du Siege, donne lieu de conjecturer ce qu'on fit pendant le Siege mefme. Quelques Chevaliers François qui ne pouvoient plus refter à Carcaffonne, parce que Montfort n'avoit plus de quoi les y entretenir, fe retiroient en France au nombre d'environ foixan te, & Raymond les furprit, étant à la tête d'une partie de fon Armée: Les François ne fongerent pas à faire refiftance, & ils offrirent de lui aban donner leur bagage, pourvû qu'il voulût leur laiffer chacun un cheval, Raymond qui croyoit être feur d'a

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voir & le bagage, & les chevaux, & les hommes, demanda qu'on fe rendît à difcretion. Les braves Croifezne purent fe refoudre à fe livrer d'une maniere en même tems fi honteufe & fi dangereufe: ils commanderent à leurs valets de prendre les devants avec le bagage; ils les fuivoient en bon ordre, prêts à faire face, fi on les attaquoit. Ils continuerent ainfi leur retraite, jufqu'à ce que fe trouvant dans un lieu qui leur donnoit de l'avantage fur les gens de Raymond, ils tournerent bride, & vinrent à la charge Aux Chefs, s'écrierent-ils, laiffons le Soldat, perçons le Comte de Touloufe & le Senéchal d' Arragon. Ils n'en demeurerent pas aux paroles; dès le premier choc le Senéchal fut renverfe fur la plate: & un vaillant homme, nommé Bernard d'Audiguier, qui parut avec l'Armure de Raymond, & que l'on crût être le Comte de Touloufe, fut percé de mille coups. Les Touloufains & les Arragonois crurent avoir perdu leurs Chefs, le defordre fe mit parmi eux, on vid un Corps entier de Troupes fuir devant foixante Chevaliers. 1224. La glorieufe défenfe de Carcaffon

ne, jointe à cette derniere action, fembloit ramener les tems où le nom des Croifez fuffifoit pour difperfer les Touloufains. Les affaires d'Amaury néanmoins n'en alloient pas mieux. On venoit de révoquer les Indulgences acordées à ceux qui fe croifoient contre les Albigeois ; & Rome cherchoit à s'accommoder avec Raymond, qu'elle desesperoit de chaffer de fes Etats. Amaury aima mieux tout perdre que de voir le Languedoc, l'Agenois & le Quercy retom ber fous la domination de fon concurrent. Ne pouvant donc recouvrer les Provinces qu'il avoit perdues depuis la mort du Comte fon pere, il refolut de faire au Roy une ceffion generale de fes droits & de fes prétentions à condition qu'il le dédommageroit d'ailleurs, & fe chargeroit avec ferment de l'obligation d'attaquer & de détruire les Albigeois. Le Roy ac- 1225 cepta avec plaifir une ceffion fi avan- G. de P tageufe, & une fi belle occafion de réunir plufieurs Provinces à fa Couronne. Un des avantages qu'il fit à Montfort, fut de lui donner la Charge de Connêtable de France. Aprés cela on cut foin de détromper la Cous SS

de Rome, & lui faire connoître qus Raymond avoit recemment eu la hardieffe de demander que le Concile de. 1224 Montpellier autorifât la liberté de confcience dans le Languedoc; fans quoi il avoit protesté qu'il ne donneFoit jamais fon confentement pour la Paix de l'Eglife. Rome mieux inftruite, & foutenue de l'autorité du Roy, rentra dans fes premiers fentimens contre le Comte, & les Catho-Liques recommencerent à fe liguer pour le détruire.

Avant que de donner le détail de la nouvelle Guerre, il faut dire en peu de mots quel fut le fort d'Amaury & des autres Seigneurs de la Maifon de Montfort, qui ont eu tant de part. dans cette Hiftoire, & dont nous ne. parlerons plus dans la fuite.

Amaury fe diftingua quelques années aprés par l'attachement inviolable qu'il eut pour le bien de l'Etat. pendant la minorité de S. Louis. Ik ́| paffa enfuite dans la Palestine, où le malheur qui avoit accompagné fi fouvent fes Armes dans le Languedoc, l'ayant fuivi, il fut furpris par ceux. de Gaza, qu'il croyoit furprendre. Dans le retour il mourut à Otrante,