P. Luc. ❤Juvenal. fat. 11. Il eft plus féant, quand on a la bouche Porrò fi liquidis fuccedunt fpontè labellis Sunt contrà magno qui panduni guttura nifu: Dum buccas trepidis inflat mortalibus ambas: Ne declamator patulo me devoret ore Voce puer: tu vir robuftâ dicito voce: Il ne fuffit donc pas à l'Acteur qui fe forme, P. Sanl L CHAPITRE XI. Du Gefte. , Theod. Es mains font pour l'homme comme une feconde langue, qui dans le filence même explique nos fentimens fait connoître nos penfées, & parle un langage connu chez toutes les nations. Données à l'homme pour fervir d'inftrument à fa raison, par leur moyen il de Provid laboure la terre, ferre les grains, plante Orat. 4. les arbres, taille la vigne, moiffonne les fruits de fes travaux, tranfporte dans des villes flottantes le Marchand qui commerce dans les pays éloignés; imprime fur le marbre les traits & le caractere des Héros, éleve les plus fuperbes édi fices, anime la toile, & produit ces ouvrages précieux & délicats destinés pour fon utilité ou pour les plaifirs. Rien ne prouve mieux combien l'action des mains est vive & éloquente, que les pantomimes inventées par un certain Athen. 1. 1. Teleftes, ou beaucoup amplifiées par lui. L'Acteur parle aux yeux par l'action des mains, & en diverfifie le jeu, les tons & les infléxions, pour ainsi dire, d'une maniére agréable & pathétique. Le gefte foûtient la prononciation de l'Orateur, anime l'éloquence, nourrit la vivacité de la diction, & embellit les figures répandues dans le Difcours. P. Luc. Nunc mihi fas docilefque manus, & cerea flecti, Neve refifte operi: fic te exoptata manebunt Panè fita eft gefu. Linguam manus adjuvat, artis', Noffe iftos variare fitus. Nam lingua loquendo Congrua nominibus variis quàm figna reponat Atque eadem, dum pulmo animæ vitalis egenus omnis Quid facunda velit manuum fibi motio noris. 2. I. c. 13. Les régles du gefte font nées dès les temps heroïques, dit Quintilien. Elles Quintil. ont été approuvées des plus grands hommes de la Grece, & Platon les a mifes au rang des vertus civiles. Il n'eft pas naturel de remuer toujours les bras en parlant il faut les remuer parce qu'on Fenelon eft animé; mais il ne faudroit pas pour dialog. fur paroître animé, remuer les bras. Il L'Eloq. des chofes même qu'il faudroit dire tranquillement. J'avoue qu'on a mis en régle, ou du moins en coûtume, qu'un Prédicateur doit s'agiter fur tout ce qu'il dit prefqu'indifféremment; mais il eft aifé de démontrer que fouvent nos Prédicateurs s'agitent trop, & que fouvent auffi ils y a ne s'agitent pas affez. Venons au principe. A quoi fert l'action du corps ? N'est-ce point à exprimer les fentimens & les paffions qui occupent l'ame? Le mouvement du corps eft donc une peinture des mouvemens de l'ame; & cette peinture doit être reffemblante. Il faut que tout y représente vivement & naturellement les fentimens de celui qui parle, & la nature des chofes qu'il dit. Je fçai bien qu'il ne faut point aller jufqu'à une représentation baffe & comique. L'Orateur doit exprimer par une action vive & naturelle ce que fes paroles feules n'exprimeroient que d'une maniére languiffante; mais pour bien peindre il faut imiter la nature, & voir ce qu'elle fait quand on la laiffe faire, & que l'art ne la contraint pas. Naturellement fait-on beaucoup de geftes,quand on dit des chofes fimples & où la paffion n'a aucune part? Il faudroit donc n'en point faire en ces occafions dans les Difcours publics, ou en faire très-peu. Car il faut que tout y fuive la nature. Bien plus, il y a des chofes où l'on exprimeroit mieux fes penfées par une ceffation de tout mouvement. Un homme plein d'un grand sentiment, demeure un moment immobile. Cette efpece de faififfement tient en fufpens Fame de tous les auditeurs. Les |