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Les mains ont différents mouvemens; Accommoder on les appuie, on les met l'une dans le gefle à la l'autre, on les agite enfemble ou féparé- chofes. ment, on frape l'une fur l'autre, on les

abbat, on les éleve, on les étend, &c. Tous ces mouvemens ne conviennent

point également à l'Orateur. Ces geftes doivent convenir à la nature des chofes qu'il traite, & à la profeffion qu'il exerce. Le gefte d'un Philofophe ou d'un Théologien fur les bancs differe de celui du Prédicateur dans la Chaire. Il en eft cependant des uns & des autres comme d'un peintre ou d'un fculpteur, dont la main judicieuse fçait difpenfer fur la toile ou fur un bloc les traits qui caracterisent les objets qu'il veut repréfenter. L'homme penfif, furieux, grave, enjoué, le heros, l'homme fçavant, les batailles comme les fimples paysages, tout fort du pinceau ou du cifeau que fa main conduit, avec cet air & ce caractere propre qui les fait reconnoître par la nature même. La crainte & la triffeffe, par exemple, affoibliffent le corps, refferrent les membres; des mains trop libres, trop agitées répugnent à cet état. Au contraire le mouvement en eft vif dans la joie, parce qu'elle dilate, elle fe répand dans toutes les parties. Dans la colère, elles auront ungefte rompu, violent, & comme dans M

nature des

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L. II.

le défordre. Il n'eft donc rien de plus ennuyeux, de plus choquant que la monotonie du gefte. J'aimerois mieux une main emportée, un peu ardente , que celle qui eft engourdie, & qui paroît toujours avoir la crampe aux doigts, ou qui femblable au pendule d'une horlorge balance fes mouvemens.

Examinez combien de chofes expriment le gefte indépendamment de la parole dit Quintilien, & vous connoîtrez fon importance. Le moindre figne de la tête ou des mains indique notre volonté : il appelle, congédie, promet, menace, fupplic, admire, &c. Le gefte fe produit par degré dans l'exorde, la parole doit préceder l'action des mains pendant l'étendue des fix ou fept premiéres phrafes. On commence le gefte du côté de la main gauche, & il finit à la droite. Il doit commencer & finir avec la parole,& convenir à la nature des chofes dont on parle, & des actions qu'on repréfente, quand elles n'ont rien de comique ou de rempant. Variez-le, foûtenez-le plus ou moins felon la longueur des phrafes, & l'expreffion differente qu'exigent les figures répandues dans le difcours. Liez-les enfemble de maniére

*'Si erit fermo cum dignitate, levi dextræ mow Loqui oportebit. Cic.

qu'ils fe fuivent, & qu'ils fe préparent les uns & les autres. On doit éviter avec foin que le gefte prévienne ou ne falle que luivre la parole: l'exactitude confifte dans un certain milieu : il faut que le gefte exprime, non le mot que l'on prononce, mais la pensée que l'on a. * N'étendez point les bras avec contention. Agiffez rarement des deux mains, & déclamez encore plus rarement de la gauche feule. Une main eft-elle en action, que l'autre foit appuyée fur la Chaire, ou étendue fur la poitrine. On les y pofe également toutes deux en commençant un point. Ne les portez pas plus haut que les yeux, ni trop en arriére, ni trop en bas. Que les doigts foient proches les uns des autres, pour éviter la pate d'oie; qu'ils foient droits & ouveris pour ne point gefticuler en furieux, & fraper l'air à coups de poingts.

Ambæ dum paffis nituntur ad æthera palmis
Confifluntque manus, præfentia rebus egenis
Adfore declarant non caffis numina votis,
Decidua dum mole premunt latus, irrita mon-
ftrant

Vota, nec auritos potuiffe advertere Divos.
Pectinis in morem digitis coëuatibus, ante
Dum pendent, triflem; dum convertuntur,
anhelum:

Dum lumbos fuper & turgenti tergore torta

* Debet fubfequi geftus, univerfam rem & fenten non verba expriness, fedtiam. Cic. Orat. 220.

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Ponè fedent, tumidum: dum anfas hinc inde figurant,

Præfidentem animi:dum pandunt longiùs alas, Audentem: lætum dum crebris motibus er

rant:

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Attonitumque decuffata: infpiramque voluta,
Plurima volventem fecum; abjectumque remiffa,
Sive vacillantes dubio libramine dicunt.
Atque hæc fignorum manibus quæ forma duabus.

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manibus tu cautè utare difertis,
Ut qua lingua fonat, geftu propiore fequaris,
Non præeas. Nefcit menti vox fana præire,
Nec voci novit fapiens præcurrere geftus.
Ponè fequi dominam gaudet vox fobria mentem:
Ire comes voci motu famulante laborat,
Et paribus fpatiis menti fuccedere geftus.
Tu ne communis famulatus jura refolve,
Sed magis officiique vices & tempora ferva.
Nam quandoque amens turbat difcordia fœdus,
Dum geftum opponit voci, vocemque viciffim
Cum geftu bellare facit: deformia bella
Scilicet, & menti nunquam placitura magiftra.
Quæ fint bella rogas? Dum vox petit ardua
cœlum,

Jupiter! ingeminans : geflu petit ima rebelli,
Indictumque notat malè concors dextera ditem.
At ne lucis egens nullo ductore feratur
Geftus in incertum, ne te convertere vifus
Huc pigeat, quò mens vocem geftumque vocabit.
Nam nifi quem reicis tactu procul acceffuque,
Eft licitum commotæ oculos non jungere dextra.
Lava fibi rarò tantùm, me judice, fumat,
Ut fi fola poteft, tamen aufit fola moveri.
Conjunctis aptè digitis fe dextera folvat
In geftum: nec fuprà oculos amet ire, nec infrà
Se cinétum valde abjiciat : nec longiùs, aut fe

Latiùs effundat: ne remiget, aut natet, orbes
Orbibus impediens varios: ne pulpita tundat,
Aut ftrepera alterius percellat concava palma.
Qui fibi fic plaudit, mihi jam ludibria debet
Et referet ftolidus meruit quæ fibila plaufor.`
Nec latum digitos difcriminet intervallum;
Nec coëant in fe glomeratis unguibus: intùs
Nec palma lateant, dum pugnus cogitur, imâ:
Neve micent celeres, veluti fi fpretus Alexim
Vocales doceat Corydon refonare cicutas;
Dum premit alterno ventofa foramina taƐłu,
Queis iter eft anima. Vitia in contraria proni
Offendunt pariter, preffas muliebriter ulnas
Et qui continuat lateri, & qui fubrigit altè
Axilla gibbos: & dimidiata refringit
Brachia qui cubiti nodo; & qui brachia laxis
Diftendit nervis: cui geftu languida nullo
Diriguit manus, aut nimiùm manus emicat
ardens,

Otia nec docilis nullo unquam ducere motu.

Vous voyez dans ces vers ingénieux l'ufage principal des mains, & le jeu qu'il faut leur donner. La droite qui eft la plus noble domine toujours dans l'action, & la gauche ne paroît que pour obéir aux mouvemens qu'elle en exige, & pour l'accompagner. * On s'en fert

dans les cas où il faut montrer de l'averfion, ou de l'horreur, ou marquer la place des réprouvés. Un Orateur gaucher pour déguifer ce vice peut faire fes geftes des deux mains, qui dans tous les temps

* Manus finiftra nun- Idextræ fe frequenter ac quam fola gestum facit, cominodar. Quintil.

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