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ait lieu de fe livrer aux gémillemens & aux fanglots. Sa douleur doit être vive & moderée, foûtenue par la confiance, & jamais affoiblie par le défefpoir.

La voix claire, douce, fe fait écouter Voix douce. avec plaifir. Elle déplaît quand elle est confule, languiffante, roide, aigre, caffée. Il faut prendre le meilleur ton, comme on choifit le meilleur tour. Il est P. Gaichiés, avantageux d'être écouté, non-feulement fans peine, mais avec plaifir; la douceur de la voix produit cet effet : elle plaît même dans une langue inconnue, & dont on n'entend que le fon (a). Alcibiade Plutarch. étoit fi jaloux de cet avantage, qu'il le in Alcib. préféroit à toutes les autres qualités éminentes qu'il poffedoit. Suavitas vocis in Catulo, & lenis appellatio litterarum, bene loquendi famam confecerat, dit Ciceron. In voce duo fequamur, ut clara fit & fuavis, continue le même Orateur. Craffus L. 1. Offic. louoit beaucoup Sulpicius en ce point (b). Senéque en parlant de ces qualités, avoue qu'il eft rare de les trouver dans un même fujet (c). Jugez des avantages que procu

(a) Habes ista res fuam rem, nec voce pleniorem gratiam, & ett decor pro- aut fuaviorem mihi vi cor prius orationis leniter lap-audivifte. L. 2. de Orat. fæ. Senec. Epift. 100.

(b) Ego neminem ne: motu corporis, neque ipfo habitu atquè formá aptio

(c) Quamvis hæc inter fe rarò coëant, ut eadem vox dulcis fit & folida. L. 3. Controv.

G

In Brut.

rent la force & la douceur de la voix, quand elles font unies, par le fuccès des grands Orateurs. Elles latent agréablement l'oreille, préviennent l'auditeur, & le difpofent à recevoir favorablement les vérités qu'on lui inculque. S. Gregoire de Nyffe appelle faint Bafile auream luf ciniam. Ceux qui entendoient parler Dion, Dio Chry- lui donnoient le même éloge, dit Suidas: foft. Orat. Philomela Sophiftarum. Il est peu d'Orateurs qui fcachent, comme Antoine, tirer avantage d'une voix dure & défagréable (a).

47.

Voix mâle, efféminée.

In vita

Epiph.

Une voix mâle & naturelle, qui ne fent ni l'affectation ni l'art, eft un grand prefent que la nature fait à ceux qui la poffedent (b). On a toujours loué les grands hommes dans cette partie. Ennodius dit de faint Epiphane, qu'il avoit vocem Sonoram, fucco virilis elegantia conditam, non infraciam, gradatimque à mafculâ foliditate depofitam. S. Ambroise la récommande également: Que la voix de l'Orateur foit diftincte dans la prononciation, pleine d'une mâle vigueur; qu'elle n'ait rien de bas ni de comi(a)Vox fubrauca natufa; fed hoc vitium huic uni in bonum vertebat habebat enim flebile quid dam in conqueftionibus aprumque tum ad fidem faciendam, tùm ad mife

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ricordiam commovendam. Cic. in Brut.

(b) Sed ne vox quidem, nifi liberalis, actionem optimam habere potest. Quintil. l. 11. 6. 3.

Philoftr. de vit. So

que (a). On voit des Orateurs qui ont
la voix molle & efféminée, auffi fluide
& compofée dans fes tons, que leur exte-
rieur dans fes maniéres. Vous diriez des
Iris qui ne parlent que d'un ton douce-
reux & languiffant. Tel étoit cet Orateur
dont parle Lucian (b). Ce fut à un de
ces Orateurs poupins qu'Antonin impofa
filence. Son air fade & fuffifant parut
indigné à cet Empereur de la majesté de
Péloquence. Ce défaut fuivit le clinquant phit."
& l'enflure du ftyle qui regna dans le
fiécle de Senéque, où l'éloquence dégé-
nera dans l'action comme dans la dic-
tion (c). Un Prédicateur qui unit à une
voix doucereufe le gefte du petit-maître
dans les Difcours de parade & qui ne
font faits que pour l'efprit, nuit à fon
miniftere, il le met en compromis on
ne peut
fe perfuader qu'il foit bien péne-
tré des vérités qu'il annonce, ni qu'il

(a) Sit vox diftinéta ditias vocem extenuare
pronuntiationis modo, & mollitie corporis certare
plena fucci virilis ut agre-cum fœminis, & immun-
item & fubrufticum fugiat diffimis fe excolere mun-
fonum, non ut rythmum ditiis, noftrorum adolef
/affectet fcenicum. L. 1. centium specimen eft. Se-
de Offic. c. 23.
nec. 1. 1. Controv.

(b) Comicam Thaïdem ipfiffimam, vel Maltha-cen aut Glyceram tenellâ voce imitatus. Luc. in Reth. præcept.

(c) Ad muliebres blan-i

Nolo eum quem instituimus, aut fœmineæ vocis exilitate frangi, aut feniliter tremere. Fab, 1, 1,

C. 23.

Voix pleine,

cure.

foit jaloux d'être cru. On fent qu'il ne parle que pour faire voir qu'il a des talens, qu'il compofe avec délicateffe. Une vaine approbation eft la vaine récompenfe de les travaux. On peut lui appliquer ce que faint Auguftin difoit des Romains: Receperunt mercedem vani vanam.

Une voix pleine & étendue annonce fonore, obj: l'autorité du Miniftre; elle eft auffi plus propre à exciter les grands mouvemens. Un des avantages que cette voix procure, eft de pouvoir foutenir avec une force égale fon Difcours fans s'affoiblir ou fe fatiguer. Les anciens Orateurs s'exerçoient fans doute à parler haut, & fouvent dès leur premiere jeuneffe, pour avoir une force de poulmon capable de templir cing heures, quelquefois même jufques Plutarch. à fept heures d'un plaidoyer continué. Caton parloit pendant des jours entiers.

in Cat.

Pline.

Par une voix pleine je n'entends point re que nous appellons baffe-contre. Le volume trop gros & trop vafte ne convient qu'au chant. J'exclus également ces voix épaiffes qui enflent les mots qu'elles énoncent, les font paroître d'une taille & d'une groffeur gigantefque; ces hommes dont les poulmons foufflent la vanité d'un ton magiftral & emphatique qui ne

*

Cava verba & in modum veficarum tumenţia buccis trutinantur inflatis. Hyeron. Epift. 100.

convient point à l'Orateur facré. * On
doit toujours fe fouvenir de cette maxi-
me d'un Poëte:

Nofcenda eft menfura tuæ*, spectandaque rebus
In fummis minimifque.

Une voix éclatante & nombreuse annonce avec plus de grandeur l'Evangile, donne plus de force à la vérité des preuves qu'elle produit. Elle trouble, elle ravit par fes differents éclats qui lui échapent -à propos. Tantôt douce, tantôt fulminante, toujours grave & majeftueuse, elle indique fans préfomption l'autorité du Miniftre.

Une voix petite & obfcure a ôré en partie à de grands hommes la gloire d'être reconnus pour de célebres Orateurs. Juvenal fe moquoit avec raifon de ces voix maigres & aiguës.

Miratur vocem anguftam, quâ deterius nec
Ille fonat quo mordetur gallina marito.

Une telle voix indique toujours la foiblefle ou la rudeffe des organes, & quelquefois elle annonce la molleffe de l'efprit.

Nous pouvons dire de la Chaire, ce que Ciceron dit du Barreau : Canorum Oratorem concurfus hominum forique ftrepitus defiderat. Nous n'entendons pas pré

* Superbiæ aliquid pulmo rumidus auhelat, D. Aug. L. . de Doc, chre c. 47.

* bucca.

Juvenal. Satyr. 3.

Cic. in

Brute

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