ÆäÀÌÁö À̹ÌÁö
PDF
ePub

nature. Selon ce principe, la colére a une voix aigre & animée qui fe coupe par de fréquentes faillies. La douleur qui veut toucher a la voix trifte, négligée, interrompue, fourde & gémiffante : quand elle ne cherche point à fe plaindre, elle l'a plus grave, plus uniforme. La crainte a la voix foumife, incertaine, troublée. Celle de la violence paroît obftinée, véhémente, impétueufe. * Une voix douce, tendre & affectueufe montrera votre amour; âpre & févére, votre haine ; pleine, legere & coulante, votre joie; fourde, languiffante & plaintive, votre trifteffe; tremblante & héfitante, votre crainte ; haute & ferme, votre affurance: un ton élevé, votre admiration & votre eftime. Un ton dédaigneux, fans émotion ni contention de voix, fait paroître le mépris. Dans les grands traits de morale, elle fait effort de tous les organes, & réunit toutes les forces. L'indignation la rend rude, terrible, impétueuse; parce Quintil. que dans le tranfport de cette paffion,

[ocr errors]

abjectum. Aliud vis; contentum, vehemens, imminens quâdam imitatione gravitatis. Aliud voluptas;

* Aliud enim vocis genus poftulat miferatio & maror; flexile, plenum, interruptum flebili voce. Aliud moleftia fine com-effufum, lene, tenerum miferatione; grave quid hilaratum ac remiffum. dam & uno preffu ac fono Aliud iracundia; acutum obductum. Aliud metus; incitatum crebrò inci demiffum, & hæfitans, &dens, De Orat. L. 31.

[ocr errors]

:

l'air fortant des poumons avec violence, il faut que celui qui parle foit à tout moment hors d'haleine. Veut-on prier & fupplier elle eft douce & foumife: grave, quand elle confole, ou qu'elle confeille forte & un peu véhémente, quand elle exhorte: tendre & touchante, quand elle témoigne de la compaffion. Ciceron rapporte que les ennemis même de Gracchus ne purent s'empêcher de pleurer quand il prononça ces paroles: Miferable où irai-je ? quel afyle me reftet'il ? Le Capitole ? il eft inondé du fang de mon frere. Ma maison ? j'y verrois une mere malheureuse fondre en larmes & mourir de douleur. Voilà des mouvemens, remarque M. De Fenelon. Si on difoit Dialogue, ces chofes avec tranquillité, elles perdroient leur force. Quelle voix triste & animée a dû prononcer ces paroles coupées qui expriment fi bien la nature dans les tranfports de la douleur !

res.

Cont

Les figures demandent un ton différent Prononcia de celui des autres parties du Difcours. tion des figu Plufieurs n'ont point d'accent déterminé, parce qu'elles n'en doivent point avoir, n'étant fufceptibles d'aucune paffion: telles font la métonimie, la fynecdoque, la métaphore, &c. Mais l'interrogation, l'apostrophe, la profopopée, l'antithèse, l'ironie, l'exclamation, la gradation, &c

ont leur ton particulier. Le nom même de la figure le defigne. La nature nous dit que dans la profopopée il faut prendre une voix qui indique que ce n'est point vous qui parlez, mais la perfonne que vous introduifez. Il faut même la diverfifier felon le caractere de la perfonne. Ciceron dans les deux profopoOrat. pro pées dont il fe fert, l'une du vénerable vieillard Appius, l'autre du jeune débauché Clodius, a dû prononcer la premiére d'un ton grave & févere, & la feconde d'un ton lâche & un peu efféminé.

Cœlio.

[ocr errors]

La figure nommée optatio a un ton propre qui marque le mouvement & le Grenade. defir de l'ame: Ditu des vertus, que vos P. 83. tabernacles font aimables! Quand mon ame jouira-t'elle des délices ineffables de votre gloire Il faut un ton plus aigre plus inquiet, & plein d'indignation dans Jerem. 99. ce fouhait: Qui me fera trouver dans ce défert une cabane de voyageur, afin que j'abandonne ce peuple, & que je me retire du milieu d'eux ? ils font tous adulteres, violateurs de la Loi, &c.

[ocr errors]
[ocr errors]

Une voix douce, accompagnée d'un mouvement de compaffion convient mieux à cet autre: Qui donnera de l'eau à ma tête, & à mes yeux une fontaine de larmes, pour pleurer nuit & jour les enfans de la fille de mon peuple? O ! s'ils

avoient un peu de fageffe & de lumiére! L'imprécation comme contraire au fouhait, veut une voix véhémente & effrayante Périfle le jour dans lequel je fuis né, & la nuit en laquelle il a été dit: Un homme eft conçu.

Job, 3.

La prière parle d'une maniére douce & tendre: Que le Seigneur le conferve & Pl. 40. le rende plein de vie : qu'il le rende heureux fur la terre, & qu'il ne le livre point aux defirs de fes ennemis. Que le Pl. 19. Seigneur vous éxauce dans le jour de l'affliction: que le nom du Dieu de Jacob foit pour vous une protection puiffante.

Moi-même, Paul, qui vous parle, je 2. Cor. 10 vous conjure par la douceur & la modeftie de J. C.

On prononce auffi d'une voix douce &, pour ainsi dire, flateuse: Venez, mes enfans; écoutez-moi je vous enfeignerai la crainte du Seigneur.

Pl. 33.

L'expreffion différente des affections de l'ame demande une voix auffi variée qu'elles différent entre elles. Quand nous nous plaignons, que nous déplorons notre fort, cette plainte a un ton trifte & affectif: Jufques à quand, Sei. Pf. BxS gneur. m'oublierez-vous ? Jera-ce pour toujours? Jufques à quand détournerezvous de moi votre vifage? Jufques à quand formirai-je dans mon ame tant de desseins

différents qui l'agitent & l'inquiétent? Jufques à quand mon ennemi s'élevera-t'il

contre moi?

Habacuc fe plaint d'une voix plus forte Habac. 1. & plus véhémente: Jufques à quand, Seigneur, poufferai-je mes cris vers vous, Jans que vous m'écoutiez ? Jufques à quand éleverai-je ma voix dans la violence que je fouffre, fans que vous me fauviez ?.

Mich. 7.

Am. 6.

Malheur à moi, parce que je fuis réduit à cueillir des raifins à la fin de l'automne après la vendange faite.

Malheur à vous, s'écrie Amos d'une voix forte, hardie, effrayante, malheur à vous qui vivez en Sion dans l'abondance de toutes chofes, & quimettez votre confiance en la montagne de Samarie! Grands qui êtes les chefs des peuples, qui entrez avec une pompe faftueuse dans les affemblées d'Ifraël.

L'indignation a une voix enflammée, qui refpire la fureur & la colére: Je Eatch. s. fatisferai mon indignation dans vos maux ; je vous réduirai dans un défert; je vous rendrai l'objet de l'infulte des nations qui vous environnent. Vous ferez pour ces peuples un objet de mépris & de malédiction, un exemple terrible & étonnant, lorfque j'aurai exercé mes jugemens au milieu de vous dans ma fureur, dans mon indigna tion, dans toute l'effusion de ma colére.

« ÀÌÀü°è¼Ó »