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hafard fur la toile en petit, pour indiquer à peu près l'effet que fera le tableau quand il fera exécuté en grand. Avant que de fe réfoudre à terminer une partie d'un tableau, il est tout naturel de regarder fi elle eft proportionnée au refte du tableau: or il eft impoffible de le voir, à moins que d'en comparer les parties ensemble, & cette comparaifon ne fe peut faire qu'en les ayant toutes préfentes devant les yeux, il faut donc les diftribuer chaqu'une à leur place, pour donner à connoître les principales maffes; mais il faut que cela foit fait le plus promptement & le plus exactement qu'il eft poffible; c'eft ce qu'on appelle une esquisse. Elle doit se faire, comme nous avons dit, fort légerement avec du charbon tendre, & par des traits prefque infenfibles, afin que lorfqu'on voudra en arrêter le contour, & terminer chaque partie en détail, on puisse aisément effacer tous ces traits en y paffant une mie de pain, en forte néanmoins qu'il en refte encore quelque légere trace fur le papier. On obfervera que pour efquiffer, il faut tenir fon corps plus droit, & être un peu plus éloigné de ce que l'on deffine qu'à l'ordinaire, afin que fans hauffer ni baisser la tête, on puisse voir d'un seul coup d'œil son original & fon efquiffe, pour les comparer ensemble.

A l'égard de l'ordre qu'on doit tenir dans fes études, il faut copier d'abord des deffeins qui foient bien finis, & au crayon fur du papier blanc, pour en concevoir plus facilement tout le travail; enfuite on copiera indifféremment d'autres deffeins fur toutes fortes de papiers. Quand on aura paffé du moins une année avec affiduité dans cet exercice, & qu'on aura acquis quelque facilité dans la main, alors il sera à propos de deffiner d'après de bons tableaux, obfervant de retourner de tems en tems à fon

LE DES SEIN.

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exercice ordinaire, jufqu'à ce que l'on foit capable de deffiner d'après la boffe, laquelle on doit fçavoir deffiner facilement avant que d'entreprendre de deffiner d'après

nature.

Maniere de s'accoutumer à deffiner avec justesse.

Lorsqu'on commence à deffiner, on doit d'abord fe propofer deux chofes : la premiere, d'accoutumer fon œil à la jufteffe : & la feconde, d'acquérir la facilité de la main dans l'exécution.

Il y a deux moyens pour aider à deffiner avec justesse, & pour y accoutumer l'œil : le premier, eft de juger de la grandeur d'une chose par celle d'une autre, en examinant le rapport qu'il y a entre la longueur & la largeur d'une chofe, & celle d'une autre chofe, en forte que l'on puisse juger fi elle eft plus ou moins grande que l'autre, de quelle quantité, ou bien fi elle lui eft égale. Mais il faut qu'en cela, l'œil faffe l'office du compas (a) qui doit être plutôt dans les yeux que dans les mains, évitant de s'en fervir le plus qu'on pourra, pour rapporter fur le papier les mefures des parties que l'on deffine, Cela n'empêche pas, que lorfque votre deffein sera achevé, vous ne puiffiez vous fervir effectivement du compas pour votre propre fatisfaction, & pour voir fi vous avez rencontré jufte, ou de combien vous vous ferez écarté de votre original.

L'autre moyen pour copier un deffein avec plus de facilité, eft de tirer par la pensée, fur fon original, plufieurs lignes perpendiculaires, & d'autres horisontales qui fe coupent à angles droits, afin de voir quelles parties font vis-à-vis, au-deffus, ou au-deffous les unes des autres, ou (a)....In que oculis tantummodo circinus efto. De Arte Graph.

combien à peu près il s'en faut : afin que faifant la même chose fur votre papier, vous imitiez votre modele avec d'autant plus de jufteffe, & que vous rendiez votre copie d'autant plus conforme à l'original. Cette maniere aide beaucoup les commençans à mettre ensemble leur figure, ou telle autre chose qu'ils veulent copier.

La facilité dans l'exécution, qui eft la feconde chose qu'on doit se proposer, se contracte à force de travailler; & quoique l'on trouve d'abord de la réfiftance dans la main, il ne faut pourtant pas fe rebuter pour cela, car avec un peu de perfévérance & d'affiduité, vous furmonterez enfin cette résistance, en travaillant vous acquererez l'habitude & la facilité du deffein, & vous aurez alors le plaifir de voir que votre main obéira fans peine à votre imagination, pour mettre en exécution les chofes que vous aurez conçues.

Par où l'on doit commencer fes études.

On demande par quelle chofe il vaut mieux commencer pour apprendre à deffiner; fi c'est par le paysage, par des fleurs, des animaux, ou des figures humaines, ou bien par toutes ces chofes indifféremment. Gerard de Laircffe, fameux Peintre Hollandois, ou du moins l'Auteur du Livre, qui porte le nom de ce grand Maître, fous le titre de Principes du Deffein, prétend qu'il eft à propos de préparer les commençans à l'étude de la figure, en leur faifant deffiner d'abord des chofes naturelles, comme feroit un fruit, une fleur, &c. ou des ouvrages de l'Art, comme un pot à l'eau, une bouteille, un chandelier, &c. mais il paroît que ce feroit faire perdre le tems à la jeuneffe, que de l'amufer à de pareilles vétilles ; & les plus

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fameux Artistes pensent, avec raison, qu'il eft à propos, quelque partie qu'on ait deffein d'embraffer par la fuite, de commencer toujours par deffiner des têtes, des pieds & des mains. La raison en eft, que l'on y profite davantage, parce qu'il eft néceffaire de beaucoup plus d'application, pour donner une apparence de justesse à une tête qu'à une fleur, un fruit ou toute autre chofe qui peut fatisfaire, & paroître bien en elle même, quoiqu'elle ait des parties plus grandes ou plus petites qu'elles ne font dans l'original, ce qui fait que les défauts en font bien moins fenfibles. Dans une tête au contraire, fi l'on fait un œil, le nez ou la bouche plus grande ou plus petite que dans l'original, cela se remarque aisément; & pour peu qu'on s'éloigne de la place qu'ils doivent avoir, ou de leurs vraies proportions, les moindres défauts en font très-vifibles: d'où il s'enfuit qu'on les reconnoît foi-même plus aisément, & qu'en voyant en quoi ils consistent, on peut s'en corriger. De plus, celui qui deffine bien une tête fera bien une fleur; mais celui qui ne fçait que deffiner des fleurs, n'eft pas capable de copier une tête; au lieu que lorsqu'on sçait bien deffiner la figure humaine, tout le reste doit paroître facile, pour peu qu'on veuille fe donner la peine de l'étudier fur la nature même.

Qu'il vaut mieux deffiner d'abord en grand.

Pour s'avancer dans le deffein, il faut s'accoutumer dès les commencemens à deffiner le plus en grand qu'il fera poffible, parce que la main en acquiert plus de liberté & de hardieffe, & que les défauts, ainfi que les beautés, en font bien plus remarquables ; & afin de prendre une bonne maniere, il faut tâcher d'avoir toû

jours pour originaux des desseins faits d'après d'habiles Maîtres, & qui foient maniés proprement & hardiment. Quand on fçaura bien deffiner en grand, il ne fera pas difficile de deffiner enfuite en petit, au lieu que celui qui ne s'est exercé à deffiner qu'en petit, se tirera fouvent mal d'un morceau où les figures feront un peu grandes, C'est ce que l'expérience nous fait voit dans les Peintres de Payfages, qui ne font ordinairement dans leurs tableaux, que de petites figures qui font touchées avec efprit & liberté de main, lefquels néanmoins fe trouveroient embarassés s'il leur falloit faire quelque ouvrage en grand.

Des différentes manieres d'ombrer un dessein.

Jufqu'ici nous n'avons parlé que du trait ou contour extérieur des figures; mais comme il est néceffaire d'y mettre des ombres & des clairs quand on les finit fur le papier, pour leur donner plus de relief: nous allons expliquer la maniere dont cela fe pratique.

On peut ombrer un deffein de trois manieres : premierement en hachant fimplement avec le crayon, comme font les estampes; ce qui eft de mauvais goût, & ne se pratique guere que par ceux qui apprennent à graver, pour s'accoutumer à arranger proprement leurs tailles : fecondement, en grainant, c'est-à-dire, en frottant fon crayon fur le papier pour préparer des masses d'ombres, & en hachant enfuite par-deffus, pour les former & les arrêter ; cette maniere s'appelle grainer, parce que ce frottement fait paroître le grain du papier: troisiemement en estompant, ce qui fe fait en fondant les clairs avec les ombres, par le moyen d'un papier roulé, avec le bout duquel on frotte légerement le deffein après qu'il est

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