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DORIS.

Je reviens en ce lieu moins pour vous que pour elle. LEARQUE.

Pour elle ny pour moy, je ne t'y veux point voir. DORIS.

Moy, je veux jufqu'au bout fignaler mon devoir. Dequoy vous plaignez-vous, que de mon zele ex~

tréme

Qui vous veut obliger à rentrer en vous-même ?
Je fuis au defefpoir, & ce n'eft pas à tort,
De voir tant de vertus faire naufrage au port.
Ce n'eft point l'intereft qui vers vous me rappelle.
Reprenez vôtre argent, & laiffez-moy mon zele.
Laiffez-moy le plaifir, fans en eftre jaloux,
D'avoir pour vôtre Enfant plus d'amitié que vous,
Il ne s'eft jamais veu Fille mieux élevée ;
Jeuneffe fi docile, & fi bien cultivée ;
Son merite naiffant promettoit d'aller loin:
Pour tout dire en un mot, j'en avois pris le foin §
Et je fens un chagrin qui me penetre l'ame
Quand une honnefte Fille eft malhonnefte Femme
Voila ce que fouvent cause un Pere testu.

LEARQUE.

Quoy, ma Fille étant Femme aura moins de vertu DORIS.

Qui que ce foit, Monfieur, qui foit Femme d'E4 fope,

Il n'eft pas mal-aifé d'en tirer l'Horoscope.

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DORIS.

Qu'en peut-il arriver?

Je vous mets en fa place, & je vous prens pour elle,

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Si vous aviez vingt ans, & que vous fuffiez belle, Et qu'un homme bien-fait, & bien-aimé de vous Vous vift donner par force un Magot pour Epoux, Quand vous vous trouveriez un moment tefte-àtefte,

Quelle vertu, Monfieur, ne feroit pas la befte? Ne nous enteftons point, & parlons de bon fens. Quoy, les gens les mieux faits ne feront pas exémpts

D'une contagion qui devient fi commune,

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Et vous croyez qu'Efope aura plus de fortune?
Quelque Femme qu'il ait, je le dis en un mot
Si ce n'eft une Sotte, il faut qu'il foit un Sot.
J'en réponds.

LEARQUE.
Aprens-moy, pernicieufe Pefte,
Si ta langue maudite a joué de fon refste ?

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As-tu fait ?

DORIS.

Oüy.

LEARQUE.

Sors donc, abominable Efprit
DORIS.

Je ne fortiray point fans congé par écrit.
Je prétens que l'on fçache où mon zele m'emporte
Et par quelle raifon vous voulez que je forte.

LEARQUE.

Parce que je le veux. Sors d'icy de ce pas.

DORIS.

Deuffiez-vous me tuer, je n'en fortiray pas.
Donnez-moy vingt foufflets, c'eft ce que je de
mande :

Choififfez quelle joue il vous plaift que je tende;
Me voila preste à tout, hors à me feparer
D'une pauvre Brebis qu'un Loup veut dévorer.
Eh, Monfieur, rappellez vôtre tendreffe extrême,
Et laiffez-moy....

LEARQUE.

Demeure, & laiffe-moy, toy-même.

Quelque infolent difcours que j'en aye effuyé, e vous la rends. Tantoft vous m'en avez prié. Mais à condition, c'eft moy qui vous l'impose, Que pour l'amour de moy vous ferez quelque chofe, fope, qui demain doit eftre vôtre Epoux',

l'eft qu'à demy content s'il ne vous tient de vous: vous doit venir voir, affuré par moy-même, Que vous ferez sensible à cet honneur extrême; t qu'en Fille bien née, & qui fçait fon devoir, ous aurez du plaifir à le bien recevoir. aites-moy dire vray : le voila qui s'avance.

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DORIS.

LEAR QUE.

A Fille vous attend avec impatience, Monfieur. Suy-moy, Doris, & laiffons-les tous deux

Exprimer leur tendreffe, & parler de leurs feux,

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ESO PE, EUPHROSINE.

Ils font une petite Scene muette, & font une espace di temps fans fe parler.

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La converfation me paroît un peu feiche.
On dit
que les Amans, pour ne fe rien celer,
Au défaut de la voix ont les yeux pour parler:
Et nous, pour éviter le chemin ordinaire,
Nous nous faifons entendre à force de nous taire,
Honorez, s'il fe peut, Objet charmant & doux,
D'un regard plus benin vôtre futur Epoux.
Tel que vous me voyez, trente Beautez me
guent;
Elles n'ont point d'attraits qu'elles ne me prodi
guent;
Pour toute autre que vous j'ay le cœur engourdy:
Et vous me préferez un petit Etourdy...

EUPHROSINE.
S'il étoit devant vous, ce que fon air infpire
Sans doute fuffiroit pour vous faire dédire

Un petit Fat.

ESOPE.

EUPHROSINE.
Monfieur....

ESOPE

bri

Un petit Freluquet,

De qui tout le merite eft un peu de caquet.

Je vais

faites,

EUPHROSINE.

pour repouffer l'affront que vous luy

Le peindre tel qu'il eft, & vous tel que vous

eftes.

Vous me direz aprés qui doit plaire à mes yeux.

ESOPE.

Non, naturellement je fuis peu curieux.

Ne bougez. Sans orgueil on ne fe fait point peindre,
EUPHROSINE.

Ce n'eft pas un malheur que vous ayez à craindre.
Si l'on vous avoit peint, vous verriez d'un

d'œil,

coup

Que vous auriez grand tort d'en avoir de l'or gueil.

ESOPE bas.

La petite Friponne a des raifons piquantes,

Qui pourtant dans le fond ne font pas trop me

chantes.

Voyons fi de fon fexe on aime conftamment.

Vous me préferez donc vôtre infipide Amant ?
Votre Quolificher plein de fard & de gomme;
Qui pour toutes vertus eft un beau petit homme;
Et qui bornant fes foins à s'orner le dehors,
A l'efprit mal bâty, plus que je n'ay le corps ?

EUPHROSINE.

Pour la derniere fois, épargnez ce que j'aime :
Ce que vous offenfez, m'est plus cher que moy

même :

Si vous continuez ces mots injurieux,

J'en fçay de plus piquans qui vous conviendront

mieux:

Un fi jufte courroux n'aura point de limites,

ESOPE.

Parlons net. L'aimez-vous autant que vous le dites 2

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