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livre paflât dans les mains des perfonnes lés plus confidérables de l'empire. Il difoit dans ce livre, que l'introduction de l'imprimerie, afsureroit à jamais la confervation fi defirée des meilleurs livres, qui, fans cela, deviendroient malheureusement la proie des flammes, ou périroient dans les triftes révolutions des empires, comme une funefte expérience ne l'avoit que trop prouvé, par les invafions affez connues de Genghizkhan, & par la perte de tant de manufcrits précieux des arabes, que les espagnols, ou plutôt la force invincible du deftin, avoit détruits & ruinés dans l'Andaloufie

D'après différentes délibérations des premiers de l'empire, & des docteurs de la loi, le Mufti prononça, qu'en exceptant les livres de religion, tous les autres qui traiteroient de la langue arabe, de l'hiftoire ou des fciences, pourroient s'imprimer Il feroit à propos, ajouta le Mufti, que par ordre fuprême, on 'créât quatre furintendants de l'imprimerie, hom

mes éclairés & favants, pour veiller à la correction des livres, & à l'obfervation de l'édit impérial. (1) Quand on eut obtenu du Mufti 'Abdullah Effendi, une fentence auffi favorable, le grand Vifir s'employa à faire figner le privilege de l'imprimerie, de la main de l'empereur, & l'édit du Sultan fut infcrit fur les annales de l'empire: c'est ce que nous apprenons de l'imprimeur Ibraïm, dans fa préface originale du journal du voyageur (2).

Cette détermination fait honneur à la nation ottomane, la feule parmi les musulmans qui, pour l'avancement des études & des fciences, ait introduit chez elle une imprimerie nationale.

(1) J'ai abrégé le traité fort long de l'histoire de l'imprimerie, par Celebi Zadé. On le trouvera dans dans le cours de cet ouvrage. Deux turès de mérite ont bien voulu avoir la complaifance de me le traduire.

(2) C'est le grand vifir qui dreffe la fupplique en peu de mots. Le fultan n'eft pas dans l'ufage de figner; il écrit feulement deffus: foit fait.

Le chevalier Chardin (1) propofa plufieurs fois à la cour de Perfe, d'appeller des imprimeurs européens, pour établir l'imprimerie à Ifpahan. Cela auroit eu lieu, ajoute-t-il, fi le feu roi Abbas II avoit fourni une plus longue carriere. Son fils qui lui fuccéda n'eut aucun égard aux inftances qui lui furent faites à ce sujet par les gens de lettres, & il ne fe trouva perfonne qui eût la générofité de fournir aux dépenfes du premier établiffement. Tavernier écrit que fous le regne d'Abbas, les caracteres perfans furent apportés à Ifpahan par Jacques Jean, Arménien de Zulpha, grand génie en méchaniques qui avoit travaillé & fondu les caracteres en Europe; mais il faut ajouter qu'on n'en fit aucun ufage, & peut-être fe font-ils perdus.

L'époque de l'établissement de l'imprimerie

(1) L'auteur appellé Chardin chevalier anglois, parce qu'il fut fait chevalier par Charles II, roi d'Angleterre. Mais Chardin étoit françois, fils d'un joaillier de Paris. (note de l'éditeur ).

turque, eft marquée à l'année 1139 de l'ere mahométane, qui tombe en l'an 1726 de J. C. parce que dans le fupplément des tables chronologiques de Ciatib Celebi, ou d'Hagi Calfah, il eft dit à cette année; l'imprimerie s'introduit à Conftantinople.

Dans la nouvelle édition du Mininski, où l'on donne des détails fur l'imprimerie turque, avec un long extrait de l'histoire ottomane de Celebi Zadé, on fait dire à l'hiftorien que les caracteres pour la nouvelle imprimerie, furent apportés de France (1). Mais fi les favants veulent prendre la peine d'examiner le texte turc qui eft fort étendu, ils n'y trouveront pas d'idée, ni même un mot de cela. Le journal que Mehemet Effendi, ambaffadeur de la Porte ottomane, a écrit de fon voyage, journal que j'ai lu avec attention, n'en fait point mention.

(1) Diff. de Fatis linguarum orient. par Jenisch. Cette differtation eft mife à la tête du nouveau Mininski.

du tout; il faut en conclurre que Menemet, ni fon fils Saïd, ne les ont point apportés de Paris; car ils n'auroient point manqué d'en parler, puifqu'ils ont remarqué dans ce voyage des choses bien moins importantes fur les arts & fur les fciences. Lomaca, qui avoit connu Saïd très-particuliérement dans fa jeuneffe, & avoit été fon interprete d'ambaffade, lorfque dans un âge plus mûr, il vint à Paris, en qualité d'Ambassadeur, vingt ans après fon pere, m'a affuré plufieurs fois, que les caracteres furent fondus à Conftantinople. En effet, dans la grammaire turque-françoise, fortie de la nouvelle imprimerie, dont nous parlerons avec étendue en fon lieu, on lit que les matrices d'imprimerie & la fonte des lettres françoifes fut faite en Tur+ quie. Or, fi les caracteres francs ont été faits à Conftantinople, & n'y ont ont point été apportés de France ni d'ailleurs, à plus forte raifon, dirons-nous que les caracteres turcs ont été fabriqués & fondus dans cette ville.

Le docte Reviczki, parlant des caractères,

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