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foit encourue dès cet inftant, elle n'eft cependant pas irrévocable, puifque la feule représentation du condamné fuffit pour la faire ceffer. La raifon d'une loi auffi jufte eft que cette condamnation n'eft fondée que fur des préfomptions. Il est vrai qu'elles font fi fortes, & qu'elles approchent tellement de la vérité, qu'elles ont paru aux juges fuffifantes pour ravir l'état d'un homme, pour le retrancher du catalogue des citoïens & pour couvrir toute fa famille de la tache la plus honteuse : mais enfin la loi n'a pas regardé cette conviction comme fuffifante, pour opérer une condamnation fans retour. Elle a préfumé que, fi l'accufé avoit été préfent, il auroit-diffipé toutes les preuves fur lefquelles on a bâti l'édifice de fa condamnation, foit en démontrant la fauffeté des témoignages, foit par d'autres circonstances, qu'il étoit feul en état de faire connoître. En un mor, il eft présumé coupable, & comme tel condamné : mais il n'eft pas regardé comme entiérement convaincu; & il arrive quelquefois qu'un contumax, en fe repréfentant, fait prononcer un jugement d'abfolution, quoique condamné par contumace. C'est pour cette raifon que le Roi fe regarde fi peu comme propriétaire incommutable des biens d'un contumax, pendant les cinq ans, quoique la confiscation ait été prononcée en fa faveur, qu'il s'eft interdit la faculté d'en difpofer, pendant ce tems. Or fi une telle condamnation emportoit, dans l'instant de l'exécution, la privation du bénéfice, il eft hors de doute qu'il faudroit néceffairement qu'il fût conféré dans les délais prefcrits par les canons & par les ordonnances. Si après cette collation le condamné fe répréfentoit & fe juftifioit, feroit-il jufte qu'il perdît fon bénéfice fous prétexte d'une fauffe accufation, fuivie d'une condamnation fans fondement ?

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Difons donc & c'eft le fentiment que nous croïons devoir adopter, que le titre du bénéfice réfide toujours fur la tête du condamné pendant les cinq ans ; que s'il y a des fonctions indifpenfables qui y foient attachées, on y doit mettre un deffervant; & fi le contumax perfévére pendant cinq ans fans fe repréfenter, on peut alors le conférer comme vacant. Mais jufqueslà, les fruits doivent être mis en féqueftre, pour lui être reftitués s'il juftifie, fon innocence. ̧

La même difficulté renaîtra cependant s'il laiffe paffer les cinq ans, qu'il fe repréfente enfuite, & qu'il fe juftifie. Son bénéfice, qui aura été conféré à un autre, fera-t-il perdu pour lui? Nous

croïons qu'il doit lui être rendu; avec cette différence qu'il doit perdre les fruits, lefquels doivent appartenir au nouveau pourvû : ce qui auroit lieu quand même on lui oppoferoit la poffeffion triennale. Il y en a un arrêt tout récent, qui, quoique rendu dans une espéce différente, doit néammoins tenir lieu de décifion dans celle que nous examinons ici. Un curé du diocèfe de Châlons poffédoit, outre fa cure, un bénéfice fimple. Il fut condamné, par arrêt du parlement de Dijon, au banniffement perpétuel hors du roïaume. L'évêque de Châlons pourvut aux deux bénéfices qu'il regarda comme vacans ; à caufe de la mort civile encouruë. Cinq à fix ans après, ce curé obtint des lettres de revifion adreffées au parlement de Paris. Il fut déchargé de l'accufation, & par conféquent de la peine contre lui prononcée. Il prétendit être en droit de rentrer dans fon bénéfice simple. Celui qui en jouïffoit alléguoit la poffeffion triennale. Par arrêt du 22 Août 1749. rendu en la grand'chambre du parlement de Paris, au rapport de M. l'abbé du Trouffet d'Héricourt, il fur renvoïé en poffeffion.

La poffeffion triennale ne fuffiroit donc pas, dans notre espéce, pour maintenir un homme qui auroit poffédé pendant trois ans & plus, depuis les cinq ans écoulés après la condamnation par contumace exécutée. La raison eft que, fi le condamné est innocent, il n'a point mérité de perdre fon bénéfice. Il y a toujours eu un droit réel: ainfi il doit être admis à rentrer en poffeffion dès qu'il a mis fon innocence au jour. D'ailleurs la poffeffion triennale doit être fondée fur une efpéce de bonne foi; en forte que celui qui veut s'en fervir doit prouver qu'il n'avoit pas lieu de s'attendre à être troublé dans fa poffeffion pendant les trois ans. Or il n'en eft pas ainfi dans ce cas ; puifque celui dont il poffède le bénéfice n'étoit condamné que par contumace, & qu'il pouvoit arriver chaque jour qu'il fe représentât, qu'il fe justifiât, & qu'en conféquence, il vînt troubler la poffeffion.

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CHAPITRE I X.

De la perte de l'office.

I ceux L eft certain que la mort civile fait vaquer les offices poffédés par ceux qui l'ont encourue. Il n'eft pas poffible d'imaginer qu'un homme qui a été banni de la fociété puiffe pofféder une charge qui lui donne droit d'y exercer des fonctions qui font souvent importantes. Mais, par rapport à ceux qui font condamnés par contumace, la même question fe préfente que pour les bénéfices. Nous croïons qu'elle doit fe décider par les mêmes principes que ceux que nous avons établis dans le chapitre précédent; & nous en avons Loyfeau pour garant. Nous allons rapporter ici fon fentiment, & les raifons fur lefquelles il le fonde. C'eft le meilleur guide que nous puiffions fuivre en cette matiére. Voici comment il s'explique en fon traité des offices, chapitre 13. n. 92. & fuiv.

La confifcation n'eft irrévocablement acquife au fifc qu'après cinq ans encore ne fe comptent-ils que du jour de la condamnation; & non pas du jour de la faifie & annotation de biens: en forte que fi le condamné par contumace fe repréfente, ou meurt dans les cinq ans, fes biens lui font rendus, ou à fes héritiers, en cas qu'il foit purgé & trouvé innocent. Le Roi s'eft même réservé le pouvoir de difpenfer de la rigueur de l'ordonnance après les cinq ans, en lui accordant des lettres pour efter à droit, en cas qu'il veuille fe repréfenter après ce laps de tems: & il s'eft interdit au contraire le pouvoir de difpofer des confifcations faites fur les contumax avant que les cinq ans foient expirés.

D'où il fuit que la condamnation prononcée par une fentence de contumace n'eft ni certaine ni affurée, puifque le condamné, en se représentant & en fe purgeant, rentre dans tous fes biens, & par conféquent dans fon office. Le Roi ne peut pas même difpofer de cet office avant l'expiration des cinq ans.

Cependant comme les offices ne peuvent pas être auffi facilement régis par un commiflaire, que les autres biens, , que d'ailleurs le bien public exige ordinairement qu'ils foient actuellement exercés, & qu'ils ne reftent pas vacans, l'ufage dans ce

cas eft de les conférer par commiffion; & cette commiffion fe convertit volontiers en titre après les cinq ans expirés; foit en vertu d'un brevet de don de l'office qui doit s'obtenir fecrétement, pour ne pas être attaqué comme intrus; attendu que les ordonnances défendent de briguer un office avant qu'il foit actuellement vacant: foit en païant la finance; auquel cas on achete tout le droit que le Roi avoit en l'office; étant certain qu'on n'acheteroit pas une fimple commiffion.

En effet, en vertu de cette commiffion, on se fait recevoir avec les mêmes folemnités que fi l'on étoit véritablement titulaire; en forte que tant que la commiffion dure, on peut fe regarder comme véritablement officier: on jouït même du rang, honneur & autres prééminences qu'auroit le véritable titulaire. Il n'en eft pas de même de ceux qui font commis pendant l'inftruction du procès, ou pendant le tems d'une fufpenfion ordonnée : parceque cette commission n'est pas destinée, en ce cas, à être

convertie en titre.

Cependant lorfque les cinq ans font paffés, le commiffionnaire ne doit pas manquer de fe faire délivrer des provifions en titre d'office; en vertu defquelles il doit feulement prêter un nouveau ferment; fans qu'il foit befoin de nouvelle information ni d'examen, fuppofé que cela ait déja été fait, comme il a dû l'être, lorsqu'il a reçû fa commiffion.

Il arrive quelquefois que le Roi ne garde pas à la rigueur la loi qu'il s'eft impofée de ne point difpofer des biens des contumax pendant les cinq ans. Il eft des cas où fa fageffe croit pouvoir fe difpenfer de cette régle.

Auffi arrive-t-il fouvent que l'on n'attend pas ce tems pour conférer l'office en titre. Quoique cette collation foit abufive cependant ni le condamné, ni aucun de ceux qui le repréfentent, non pas même fes créanciers ne font recevables à s'y oppofer; parceque toute audience lui doit être déniée jufqu'à ce qu'il fe foit mis en état. Tant qu'il ne le fait pas, il eft regardé comme bien condamné, & fon office comme vacant. C'eft pourquoi ces provisions font ordinairement tolérées, & les impetrans admis; fauf, après la représentation du contumax, s'il fe à les déclarer nulles.

purge,

Quoi qu'il en foit, il eft certain qu'un condamné par contumace ne peut pas résigner fon office, tant que la contumace n'est pas purgée. Nous avons vû ailleurs que cette réfignation ne peut pas fe faire, même pendant l'inftruction du procès; à plus forte

raifon lorfqu'ils y a une fentence de condamnation qui l'a mis dans les liens de la mort civile.

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Des droits des tiers, auxquels la mort civile donne ouverture.

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ELATIVEMENT à l'objet qui fait la matiére de cet article, un homme, quand il eft frappé de la mort civile, peut fe trouver en différentes circonftances. Ou il poffédoit des biens ou il n'en poffédoit pas. Ou fes biens étoient fubftitués, ou ils ne l'étoient pas. Enfin ou ces biens étoient nobles, ou ils ne l'étoient pas. Ou il ne jouïffoit de ces biens que par usufruit, ou il les poffédoit en pleine propriété. Ou il avoit reçu par donation entre-vifs, ou il avoit difpofé de quelqu'un de fes biens par teftament; ou il étoit marié, ou il ne l'étoit pas. Ou enfin il avoit contracté des fociétés, ou il ne l'avoit pas fait.

Ainfi nous diviserons cet article en huit chapitres. Dans le premier nous traiterons de la fucceffion d'un homme mort civilement. Dans le fecond, nous parlerons de l'ouverture de la fubftitution dont il étoit grévé. Dans le troifiéme, de l'ouverture des droits féodaux. Dans le quatrième, de la jouïffance, de l'ufufruit, des penfions viagères & du doüaire. Dans le cinquième, du droit de retour au profit des donateurs. Dans le fixiéme, de l'exécution du teftament. Dans le feptiémè, des effets de la mort civile, relativement aux conjoints par mariage. Et dans le huitiéme, nous parlerons de la diffolution des fociétés que le mort civilement avoit pû contracter avant fa condamnation.

CHAPITRE PREMIER.

De l'ouverture de la fucceffion de celui qui eft mort civilement.

L

A mort civile, comme nous l'avons fait voir plufieurs fois, eft une fiction qui doit par conféquent fe conformer en tout à la nature. Quand un homme eft frappé de la mort naturelle fa fucceffion eft ouverte au profit de ceux à qui elle appartient foit par le fang, foit par la difpofition de la loi, foit enfin par

la

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