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& d'inftituer de nouveaux ordres religieux eft compté au nombre des causes réservées au pape mais l'approbation du pape n'eft pas fuffifante pour autorifer l'établiffement d'un nouvel ordre, ni même d'un feul monaftére dans l'état; & puifque l'occafion s'en préfente, nous allons examiner les conditions dans lesquelles l'établissement de quelque communauté que ce foit dans le roïaume, ne peut être valable.

Quatre conditions font néceffaires. Le confentement de l'évêque diocéfain, celui de toutes les parties intéreffées, l'agrément du Roi par lettres patentes, & l'enregistrement de ces lettres patentes au parlement dans le reffort duquel fe fait le nouvel établiffement.

Chacun de ces objets nous fournira la matiére d'une distinction.

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Du confentement de l'évêque diocésain.

Tout efprit un peu attentif comprendra facilement qu'on ne peut fe paffer du confentement de l'évêque diocéfain; lorfqu'il eft queftion de l'établissement d'une nouvelle communauté religieufe dans fon diocèfe. Tout concourt à prouver cette néceffité. La raison, l'autorité des faints canons, les loix civiles nos ordonnances, le fentiment des jurifconfultes, & la jurif prudence des arrêts.

L'évêque eft chargé, par inftitution divine, du foin des ames de tout fon diocèse. C'est donc à lui de décider des avantages ou du dommage que peut caufer parmi fon troupeau, l'établiffement d'une nouvelle communauté, d'un nouveau monastére.

Il est vrai que, dans les premiers fiécles de l'Eglife, les moines ne fe mêloient en aucune façon de l'administration des facremens, ni du miniftére facré. Monachus non doctoris, Sed plangentis habeat officium, difoit autrefois faint Jerôme, en parlant de lui & de Vincent, qui étoit aussi moine.

Mais il y a long tems que les religieux, & principalement les mendians, fe font immifcés dans les fonctions eccléfiaftiques. Ils font même regardés comme les troupes auxiliaires des évêques & des curés. Il eft donc bien jufte que ces ouvriers ne mettent pas la main à la vigne fans le confentement de celui qui préfide à fa culture, & fans qu'il ait examiné s'ils lui font utiles à lui & à ceux pour qui il doit travailler.

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Il y a plus; les religieux font, pour la plupart, exempts de la jurifdiction épifcopale: ainfi quelque petit que foit le terrain. qu'ils occupent dans fon diocèfe, il diminuent d'autant l'étendue de fa jurifdiction. C'est une portion de fon bien qu'ils lui enlévent; ce qu'ils ne peuvent faire fans fon confentement.

Le concile de Calcédoine, convoqué en 451, par l'empereur Marcien, qui y affifta en perfonne; fit un réglement, qui défendoit de former aucun établissement religieux, fans le confentement de l'évêque diocéfain. Voici les termes de ce canon, qui eft le quatrième : ET JUBENTE DIVINISSIMO ET PIISSIMO PRINCIPE NOSTRO.... placuit nullum quidem ufquam adificare, aut conftruere monafterium, vel oratorii domum, præter confcientiam civitatis epifcopi.

Charlemagne, dans fon premier capitulaire de 789, a ordonné l'exécution de ce décret. Capitul. to. I, p. 222.

Le concile d'Agde, canon 12, 18, qu. 2, fait la même défenfe. Monafterium novum, nifi epifcopo permittente, aut probante, nullus incipere, aut fundare prafumat. Et la glofe fur ce canon, que Dumoulin a fort approuvée dans fes apoftilles, porte: Si ergò totum monafterium fit destructum ? requiritur confenfus epifcopi in conftructione, fed in reparatione non requiritur.

L'exécution de ces canons avoit été négligée pendant longtems. Le concile de Trente fentit combien ce relâchement dans la difcipline pouvoit être préjudiciable à la religion; c'est pourquoi il entreprit de la remettre en vigueur par le Can. 3, sess. 25, de regular. conçû en ces termes: Ne de catero ulla monafteria seu virorum, feu mulierum erigantur, fine episcopi, in cujus diœcefi erigenda funt, licentiâ priùs obtentâ.

Cette défense a encore été renouvellée par le concile de Rouen, tenu en 1581, tit. de Monaft. §. 31. Par celui de Reims, tenu en 1583, tit. de Regular. §. 17.

Enfin celui de Bourdeaux, tenu en 1584, tit. de Monafter. cap. 17, dit: Monafteria autem, Ecclefia, conventus aut collegia adificari non poffunt, nec ulla congregatio fecularis aut regularis, in quibuf cumque diœcefum locis inftituatur & firmetur, fine licentiâ & expreffo confenfu epifcopi.

Les papes ont joint leur décision à l'autorité des conciles, comme on peut le voir in can. nemo 9, dift. 1, de confecrat. Et in cap. 3, ex. de relig. domib. & cap. 1 & 2. eod.

Il eft bon d'obferver ici qu'il fe trouve dans le corps du droit canon une décision fur cette matiére, qui n'a point lieu parmi

nous; c'est celle qui eft contenue au chap. autoritate, de privileg. in 6°. Ce chapitre confirme la maxime qu'aucun monaftere ne peut être établi dans le territoire d'aucun diocèfe, fans le confentement de l'évêque; mais il ajoûte que, quand cet établissement fe fait dans un lieu exempt, ce n'eft pas à l'évêque qu'il faut recourir pour avoir ce confentement, c'eft au pape.

Cette maxime n'eft point admise en France, où l'on ne reconnoît point d'exemption de territoire. Tout ce qui eft renfermé dans un diocèfe en fait partie. Nous ne connoiffons que les exemptions perfonnelles; encore font-elles contraires à l'efprit de nos loix, par conféquent abufives, & fondées fur une fimple tolérance, comme nous le dirons dans la fection fuivante. Nous prenons pour régle la difpofition des conciles dont nous venons de parler, & les ordonnances de nos Rois, dont nous parlerons bientôt, & qui s'expliquent fans diftinction.

Les papes eux-même ont prêté les mains à cet ufage de l'Eglife Gallicane. Urbain VIII. par fa bulle du 28 Août 1624 révoque toutes les permiffions données par fes prédéceffeurs d'établir des monaftéres fans l'agrément des ordinaires ; & veut que leur confentement foit regardé comme une condition neceffaire pour ces établissemens; en un mot que l'on y obferve les régles prefcrites par le concile de Trente.

Il eft donc conftant que la raison & l'autorité des faints canons concourent pour rendre le confentement de l'évêque diocéfain néceffaire, quand il eft question de former un nouvel établissement dans l'étendue de fon territoire.

Nous allons faire voir que les loix civiles viennent encore au fecours de ces autorités.

Lorfque les empereurs Romains ont été éclairés des lumiéres de la foi, ils ont fenti combien ce confentement du diocéfain étoit utile & néceffaire dans cette circonftance. Outre le décret que l'empereur Marcien fit faire au concile de Calcédoine, nous en avons deux textes bien précis & bien formels dans les novelles de Juftinien. Non aliter quempiam Ecclefiam ex novo adificare (fancimus) priùs quàm loquatur ad Deo amabilem epifcopum, & definiat menfuram, &c. Nov. 67, cap. 2. Et en parlant des Eglifes qui font tombées en ruine ou qui font trop petites & que quelqu'un voudra faire rebâtir à fes dépens, le même empereur, dans la même novelle, s'exprime ainfi : Licebit ei unam talium Ecclefiarum accipienti, hanc ædificare; & hic voluntate Deo amabilis orthodoxorum epifcopi res agenda eft.

Si quis autem voluerit fabricare venerabile oratorium aut monafterium, præcipimus haud aliter inchoandam fabricam, nifi locorum fanétissimus epifcopus orationem ibi fecerit, & venerabilem fixerit Crucem. Nov. 131, c.7.

Quant au fuffrage des auteurs, voici comme s'explique Cabaffutius, lib. 5, cap. 27, n. 1. Ecclefiam ædificare neminem poffe fine affenfu epifcopi, cujus eft locum ædificationis affignare, dotationem ad minifterium, & ad reparationes neceffarias præfcribere, lapidem primarium collocare. Zipæus, qui étoit official d'Anvers, adopte le même principe, lib. I, cap. 75:

Fevret, en fon traité de l'abus, liv. 2, chap. 1, n. 4 & fuiv. cft auffi de ce sentiment, qu'il appuïe de la plupart des autorités que nous venons de citer. Surquoi il rapporte que le métropolitain de Naupacte aïant érigé certaines églifes dans le diocèfe de l'évêque d'Arta fon fuffragant, celui-ci en porta fes plaintes à Germain patriarche de Conftantinople, qui, dans fon finode, ordonna que les Croix élevées par le métropolitain dans le diocèfe d'Arta feroient démolies, & que le diocésain feroit replanter en leur place celles qu'il jugeroit à propos; parceque c'est à lui feul qu'appartient ce droit.

C'eft dans cet efprit, que le clergé de France en l'affemblée générale de 1645, dreffa l'article 28 de fon réglement. Il porte qu'aucun établiffement de religieux ou religieufes ne pourra être fait fans le confentement par écrit de l'évêque; & que le fiége vacant il ne fe fera point de changement, ni d'établissement nouveau. Ce réglement fe trouve dans les anciens mémoires du Clergé, tome 1, page 996.

Fevret, au lieu cité, examine la question de fçavoir fi le confentement du chapitre de la cathédrale doit concourir avec celui de l'évêque ; & il décide que, fi on le demande, c'est par pure bienféance. En effet, comme nous le dirons dans un moment, ce confentement n'eft autre chofe qu'un acte de la jurifdiction volontaire & gracieufe, qui dépend de l'évêque feul.

Les loix du roiaume ont adopté à cet égard la difcipline eccléfiaftique. Nous en avons une difpofition expreffe dans l'édit du mois de Décembre 1666, regiftré au parlement le 31 Mars 1667, qui exige l'approbation de l'archevêque ou évêque diocéfain. Nous aurons occafion dans la fuite de parler plufieurs fois de cet édit. Au furplus, il y eft ordonné que ce confentement fera donné par écrit, & attaché fous le contre-fcel des lettres patentes accordées à l'effet de l'établiffement des communautés ou maisons religieufes.

Cette précaution étoit en ufage long-tems avant cette loi; car Fevrêt, à l'endroit que nous avons cité plus haut, rapporte que l'arrêt obtenu par les religieufes Carmélites de la ville de Châlons fur Saone le 15 Novembre 1610, fait mention dans le vû, des lettres patentes de fa majefté, du confentement de l'évêque, de l'affemblée des habitans de Châlons qui avoient confenti à cet établiffement; & que le tout avoit été communiqué à M. le procureur général.

Au furplus, ce confentement eft fi perfonnel à l'évêque diocéfain, qu'il eft regardé comme dépendant de fa jurifdiction volontaire, dont il n'a de compte à rendre qu'à Dieu feul; en forte que, fur fon refus, il n'y a pas moïen de fe pourvoir par la voie de l'appel au fupérieur eccléfiaftique.

Le procès-verbal de l'affemblée du Clergé de 1645 nous en fournit un exemple bien précis. Les habitans de Honfleur avoient donné la direction & la conduite d'un hôpital, qui étoit dans les fauxbourgs de cette ville, à une religieufe profeffe de l'HôtelDieu de la ville de Rouen. Elle y alla s'établir, & y forma en même tems une communauté religieufe.

Le promoteur de l'officialité de Lizieux dans le diocèfe duquel la ville de Honfleur eft fituée, fit citer cette religieufe devant l'official, pour communiquer les piéces fur lesquelles cet établissement étoit fondé. Elle produifit une permiffion par écrit accordée par l'archevêque de Rouen métropolitain fur le procèsverbal d'un refus verbal fait par l'évêque de Lizieux.

Cette piéce aïant été trouvée plus qu'infuffifante, il intervint fentence en l'officialité, qui ordonna que les religieuses vuideroient les lieux & fe retireroient en l'hôpital de Rouen ; à peine d'excommunication.

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Il y eut appel, de la part des religieufes, en l'officialité de Rouen mais l'évêque de Lizieux fe pourvut à l'affemblée du Clergé, & par délibération des provinces du 27. Avril 1646 il fut jugé d'un commun avis que la permiffion ou confentement pour l'établissement d'une communauté religieufe dans un diocèfe étant de pure grace, & dépendant de la propre & libre volonté de l'évêque, les religieufes hofpitaliéres demeurant à Honfleur n'avoient pû, fur le refus de l'évêque de Lizieux de consentir à leur établiffement, fe pourvoir par devant le métropolitain, comme fupérieur; & M. l'évêque de Meaux fut prié de voir M. le chancelier, de lui donner connoiffance des fentimens de l'affemblée, & de le fupplier de vouloir autorifer par

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