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tes les démonstrations d'un amant paffion- An. gr. né, il eut un long entretien avec elle. On 1170. se mit à table. Elle se fit apporter quel- Heg. ques Outres où il y avoit du Cammez;elle 566, en présenta à Naour. Il en but avec plaifir. Il s'ennyvra, & alors elle donna le fignal à fes gens qui ouvrirent les grands Outres. Il en fortit à l'inftant des hommes armez, qui fe joignant aux autres Officiers de la Princeffe, fe jetterent fur Naour qu'elle avoit déja poignardé. Ils le mirent en pieces, & leur fureur ne s'appaifa que lors qu'ils fe furent baignés dans le fang de tous les domeftiques que ce Can avoit fait entrer fous fes tentes pour le fervir. Telle fut la vengeance de la genereuse femme de Mergous, qui avoit pris de fi bonnes mesures pour executer impuné→ ment fon deffein, qu'elle fe retira fans tomber entre les mains de ceux qui auroient pû venger la mort de Naour. Elle s'acquit un grande gloire par une action fi hardie, & tous les Princes de fon tems conçurent pour elle une eftime extraordinaire.

Mergous Can eut deux fils de cette FadlalPrinceffe,Coja Boiruc & Gurcan; le pre- lah pag. mier laiffa plufieurs enfans, dont l'aîné 27 *, fut Ounghcan, qu'il nomma d'abord Togrul, & qui dés l'âge de dix ans ac

An. gr.

Heg.

566.

compagna fon pere dans fes expéditions.. 1170. Togrul étoit à celle où fon ayeul fut pris par Naour. Il eut même beaucoup de peine à fe fauver. Comme il avoit plus de merite & qu'il étoit plus aimé que fes autres freres, ils conçurent pour lui une haine qui devint exceffive, lors qu'ils le virent fur le trône des Keraïtes. Il y monta aprés la mort de leur pere, & le Roy de la Chine, par un Ambaffadeur qu'il envoya pour le feliciter, lui donna le nom d'Ounghcan; voulant par- là lui faire entendre qu'il meritoit le titre de Grand Can, & qu'il le reconnoiffoit pour tel. Et veritablement ce nom qui fignifie le premier des Cans lui plût fi fort, qu'il le prit & quitta celui de Togrul a qu'il ne portoit qu'à regret.

Ounghcan eut enfuite plus d'un démêlé avec fes freres & fes coufins. Il en fit mourir quelques-uns. Cette cruauté excita fon oncle Gurcan à lui faire la guerre. Ils en vinrent aux mains en rafe campagne, où aprés une affés fanglante bataille, Ounghcan fut vaincu & dépouillé de fes Etats. Mais il eut recours à Pifouca

pere de Temugin, & par le fecours qu'il en reçut il chaffa fon oncle Gurcan, le

a C'eft le nom d'un certain oiseau qu'on croit de mauvais augure,

. pourfuivit jufqu'au païs de Cachin, & se An. gr. rétablit fur fon trône.

1170, Heg.

566.

Ce fut ce même Ounghcan Roy des Keraïtes qui fit, un fi grand bruit dans le monde Chrétien vers la fin de l'onzième fiecle, a fous le nom & la qualité de Prê- Mathieu tre Jean d'Afie que les Neftoriens lui at- Paris. tribuerent. On voit encore des lettres circulaires écrites de fa part à des Princes Chrétiens pendant le cours de fon regne. Il y en a au Pape Alexandre III. au Roy de France, à l'Empereur de Conftantinople, & même au Roy de Portugal. Elles font toutes d'un ftile fort élevé, & leur Auteur a prétendu donner à ceux à qui elles font adreffées, l'idée du plus grand Prince qui fût alors dans l'Afie. On a en François une copie de celle qui fut écrite en France au Roy Louis VII. pere de Philippe Augufte; mais le caractere n'a pas plus de trois cens ans, & elle commence par ces mots : Prêtre Jean par la grace de Dieu, Roy tout-puiffant fur " tous les Rois Chrétiens, falut &c.

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La fuite de cette Lettre eft magnifique Cette Letpour le Prince Keraïte; il y vante fes tre eft en original grandes richeffes, la vafte étenduë de fes chezl' AuEtats, dans lesquels il comprend les In- teur. des, & tous les peuples de Gog & de MaOunghcan eft le Piêtre Jean d'A fie.

An. gr.

1170.

Heg.

566.

gog: Il fait une mention orgueilleufe de. foixante & dix Rois qui le fervent & qui font fes Sujets Il exagere les Tributs qu'il exige d'un Roy d'Ifraël de qui dé- · pendent plufieurs Comtes, Ducs & Princes Juifs: Il invite le Roy de France à le venir voir, promettant de lui donner en propre de trés-grands Païs, & même de le faire fouverain Seigneur aprés lui. II marque encore dans cette Lettre les divers peuples & les raretés qui font dans fes Etats. Enfin, il n'oublie rien de tout ce qui peut contribuer à le faire paffer pour un trés-puiffant Roy. Il fe dit Prêtre à caufe du facrifice de l'Autel, & Roy par rapport à la juftice & à la droiture. Il parle de S. Thomas conformément aux fables des Indiens; & fur la fin de fa Lettre, il prie le Roy de lui envoyer quelque vaillant Chevalier qui foit de la generation de France. Ce font fes termes.

Mais il n'eft pas difficile de voir que cette Lettre a été fuppofée, & qu'elle n'a pas été écrite par Ounghcan. Les Neftoriens qui étoient en grand nombre en ce païs-là, où ils avoient été établis dés l'an

de

grace 737 par des Miffionnaires de Mouffol & de Bafra, en ont été les Auteurs. Ils avoient fait répandre par leurs Emissaires chez tous les Chrétiens, qu'ils

566.

avoient converti la plupart des peuples de An. gr. la Scythie, & même le plus puiffant des 1170, Rois qui y regnoient; que la converfion de Heg. ce Prince étoit telle qu'il s'étoit fait Prêtre, & qu'il avoit pris le nom de Jean. Ils ajoûterent ces circonftances pour rendre leur fable plus vrai-femblable, & ils compoferent ces Lettres fuperbes pour faire valoir le faux zéle de la Secte Neftorienne, & fe faire louer d'avoir attiré un fi grand Prince au Chriftianisme.

Toute l'utilité que l'on peut tirer de ces Lettres pour l'hiftoire; c'eft qu'elles font connoître qu'on étoit perfuadé quand elles ont paru, que ce Roy étoit un tres-grand Prince,Chrétien & Prêtre même. Il fe trouve encore une Lettre du Pape, qui l'appelle Prêtre tres-faint. Il n'y a pourtant pas d'apparence qu'il ait été chrétien, bien qu'il fouffrît chez lui les Chrétiens, a & que quelques peuples de fon Mathie obéïffance euffent embraffé le Chriftia- Parisp.8a Sacerdonifme, & qu'il leur eût permis d'avoir tem fancdes Evêques. Ce qu'il y a de veritable, tissimum. c'eft que ce Roy étoit le plus confiderable Rubru quis, a Et vocabant eum Neftoriani Regem Johannem

plus dicebant de ipfo in decuplo quam veri tas effet. Sic ergo exivit magna fama de illo Rege Johanne, & quando no tranfivi per pafaua ejus, nullus aliquid fciebat de eo nifi Nefto riani pauci,

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