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LES

PLAIDEURS

COMEDIE.

ACTE I

SCENE PREMIER E.

PETIT JEAN trainant un gros fac de Procés.

M

A foi, fur l'avenir, bien fou qui fe fira.
Tel qui rit Vendredy, Dimanche pleu

rera.

Un Juge l'an pafé me prit à fon fervice Il m'avoit fait venir d'Amiens pour être Suiffe. Tous ces Normans vouloient fe divertir de nous, On apprend à hurler, dit l'autre, avec les loups, Tout Picard que j'étois, j'étois un bon Apôtre, Et je faifois claquer mon foüet tout comme un autre. Tous les plus gros Monfieurs me parloient chapeau

bas.

Monfieur de Petit Jean, ah! gros comme le brass KK iiij

Mais fans argent, l'honneur n'eft qu'une maladie
Ma foi j'étois un franc Portier de Comedie,
On avoit beau heurter & m'ofter fon chapeau,
On n'entroit point chez nous fans graiffer le marteau
Point d'argent, point de Suiffe, & ma porte étoit
clofe.

Il eft vrai qu'à Monfieur j'en rendois quelque chofe.
Nous comptions quelquefois. On me donnoit le fois
De fournir la maison de chandelle & de foin;
Mais je n'y perdois rien. Enfin vaille que vaille,
J'aurois fur le marché fort bien fourni la paille:
C'eft dommage. Il avoit le cœur trop au métier,
Tous les jours le premier aux Plaids, & le dernier
Et bien fouvent tout feul, fi l'on l'eût voulu croire
Il y feroit couché fans manger & fans boire.
Je lui difois parfois, Monheur Perrin Dandin,
Tout franc, vous vous levez tous les jours trop matin
Qui veut voyager loin, ménage fa monture;
Beuvez, mangez, dormez, & faifons feu qui dure.
II n'en a tenu compte. Il a fi bien veillé,

Et fi bien fait, qu'on dit que fon timbre est broüillé
Il nous veut tous juger les uns aprés les autres.
Il marmote toûjours certaines Patenoftres
Ou je ne comprens rien. Il veut bon gré, malgré,
Ne fe coucher qu'en Robbe, & qu'en bonnet carré,
Il fit couper la tête à fon Coq de colere,
Pour l'avoir éveillé plus tard qu'à l'ordinaire :
Il difoit qu'un Plaideur, dont l'affaire alloit mal,
Avoit graiffé la patte à ce pauvre animal.

Depuis ce bel Arreft, le pauvre homme a beau faite,
Son fils ne fouffre plus qu'on lui parle d'affaire.
Il nous le fait garder, jour & nuit, & de prés.
Autrement ferviteur, & mon homme eft aux Plaids.
Pour s'échaper de nous, Dieu fçait s'il eft allaigre.
Pour moi, je ne dors plus. Auffi je deviens maigre,

C'eft pitié. Je m'étends, & ne fais que bailler.
Mais veille qui voudra, voici mon oreiller.
Ma foi, pour cette nuit, il faut que je m'en donne,
Pour dormir dans la rue on n'offenfe perfonne.
Dormons.

SCENE I I I.

L'INTIME, PETIT JEAN.

L'INTIM E'.

AY, Petit Jean, Petit Jean.

PETIT JEAN.

Il a déja bien peur de me voir enrumé.

L'INTIM E'.

L'Intimé.

Que Diable ! fi matin que fais-tu dans la ruë ?
PETIT JEAN.

Eft-ce qu'il faut toujours faire le pié de gruë,
Garder toujours un homme & l'entendre crier ?
Quelle gueule! Pour moi, je croi qu'il est forcier,
L'INTIME.

Bon.

PETIT JEA N.

Je lui difois donc en me grattant la tête,
Que je voulois dormir. Prefente ta Requête
Comme tu veux dormit, m'a-t-il dit gravement
Je dors en te contant la chofe feulement.
Bon foir.

L'INTIM E'.

Comment bon foir? Que le Diable m'emporte Si... Mais j'entens du bruit au deffus de la porte.

************

SCENE III.

DANDIN, L'INTIME'.
PETIT JEAN.

DANDIN, à la fenêtre.

Petit Jean? L'Intimé?

L'INTIME', à Petit Jean.

Paix.

DANDIN.

Je fuis feul ici.

Voilà mes Guichetiers en défaut, Dieu mercy.
Si je leur donne temps, ils pourront comparoître.
Cà, pour nous élargir, fautons par la fenêtre.
Hors de Cour.

L'INTIME'.
Comme il faute.

PETIT JEAN.

Ho, Monfieur, je vous tien.
DANDIN.

Au voleur, au voleur.

PETIT JEAN.

Ho, nous vous tenons bien. L'INTIME'.

Yous avez beau crier.

DANDIN.

Main forte. L'on me tuë.

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