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Ileft penible aux hommes d'être conftans, généreux, fidelles, d'être touchez d'une amitié plus forte, que leur interêt.

Il eft naturel de faire du mal à ce qu'on hait; l'eft-il moins de faire du bien à ce qu'on aime ne feroit-il pas dur, & penible de ne leur en point faire?

Il est penible à un homme fier, de pardonner à celui qui le furprend en faute, & qui fe plaint de lui avec raifon.

Qu'il eft trifte,& penible de voir les autres couler une vie douce & agréable, tandis qu'on eft accablé de chagrins, & de mauvaises affaires.

Ces imperfonels ne font point en ufage avec le regime qu'on leur donne dans les éxemples que je viens de citer; ce ne font que de purs adjectifs, qui fe joignent avec des fubftantifs; une vie trifte, une occupation penible:quand on veut les employer autrement, il ne faut point leur donner de fuite: cela eft trifte, cela eft penible. Mais on ne doit pas dire comme fait un certain Auteur; ces efprits trop inquiets font pénibles aux autres, & encore plus d'eux-mêmes. Penible ne régit rien après foi.Il ne fe dit que des

cho

chofes; on ne peut l'appliquer aux perfonnes.

* Tout le monde refpe&e les Evêques; mais pour peu qu'ils fe rendent indignes de leur caractere, par une mauvaise conduite, ceux qui paroiffent les plus empreffez à les honorer, font les plus emportez à les détruire. Si je ne me trompe, j'ai fait deux fautes en cette phrase; car on ne peut dire, ni empreffé à honorer, ni emporté à détruire. On dit bien, des gens empreffez,un homme emporté.

Comme ce païs-là n'étoit pas encore bien paisible aux Romains, ils croyoient qu'ils leur livreroient paffage aifément. Une Ville paifible, une nation paifible; mais paisible aux Romains!

C'est moins l'avarice ou la politique, qui rend les Grands fi difficiles à accorder des graces, que l'envie: ils veulent être feuls heureux & confidérez; tout ce qui peut faire le bonheur, & la confideration des autres leur coute à donner. Difficile fe peut joindre à un verbe, pourvû quele verbe foit au Paffif; un homme difficile à aborder, difficile à ménagers inais

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*Opufcules de S. Chryfoftome. † Com

mentaires de César.

mais fi le verbe est à l'actif il ne fe peut conftruire avec difficile ainfi cette expreflion, qui rend les Grands fi difficiles à accorder les graces, n'eft pas régulière.

Phrafes contre la jufteffe.

Ly a de certaines expreffions, qui ne font pas les plus régulieres du monde, à les examiner de près, mais qui ne laiffent pas d'être Françoises, parce que l'ufage les autorife; car comme il peut donner cours à des solecifmes, il pourra bien auffi faire vaIoir des locutions, quelque peu juf tes qu'elles foient..

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Il marchoit à grands pas, il jettoit de tous côtez des regards inquiets; il avoit le bras retrouffé. C'est proprement la manche qu'on retrouffe; mais puifque l'usage a voulu qu'on dise le bras, il faut s'y tenir.

C'eft un homme redoutable, vous n'oferiez l'avoir regardé. Pour parler jufte, il faudroit dire, vous n'oferiez le regarder.

Mettre l'épée à la main.Il feroit plus conforme à la Raifon de dire, mettre la main à l'épée; mais l'ufage ne s'aftraint pas toujours à fuivre ce qui est de plus raifonnable.

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Il eft demain Fête. Cette expreffion eft manifeltement contre la juftefle. Demian, marque un tems futur; il eft, eft un prefent; felon la regle, il fau droit dire, il fera demain Fête. . C'eft en vain que vous me follicitez, je ne faurois faire ce que vous dites, pour, je ne puis.

Si vous étiez affez lâche, pour confentir à une action fi injufte, je faurois vous en faire repentir. Aulieu de dire je pourrois vous en faire repentir.

Ileft fix heures. Quand le fubftantif eft au pluriel, la regle veut que le verbe foit auffi au pluriel: felon cette regle; il faudroit dire, font fix heares mais puifque l'ufage a établi qu'on diroît mon ame, mon épée, pour ma ame, ma épée,il peut bien établir qu'on dife, il est fix heures.

..Tout le refte de nos grands Seigneurs, eft fufpe&, ou négligé de Mr. le Cardinal. Il ya je ne fai quoi dans cette phrafe qui me fait de la peine, & qui péche contre la jufteffe; parce que fufpect & negligé ne peuvent avoir le même regime: je fai bien qu'à la rigueur on pourroit fufpendre le fens après fufpect,& en détacher negligé de Mr. le Cardinal: mais quoi qu'il

en foit, l'arrangement ne me paroît pas régulier.

Changement de nombre.

Ce

'Eft quelquefois une élegance de faire rapporter un terme pluriel à un nom qui eft au fingulier; cepen. dant la regle ordinaire veut que le fingulier marche avec le fingulier, & le pluriel avec le pluriel.

Auffi-tôt un grand Peuple accourant, ils fe jettérent fur le Gouver neur & le mirent en pieces. Peuple est au fingulier; mais parce que c'est un nom collectif,il équivaut à un pluriel, ainfi on y joint élegamment, ils fejet térent.

Quelque ami que je fois du plaifir, je n'en veux que d'innocens; il feroit plus régulier de répeter plaisirs qu'on fous-entend & de dire quelque ami, que je fois du plaifir, je ne veux que des plaifirs innocens dans la converfation, où l'on aime à abreger, & dans les dif cours libres, on n'y regarde pas de fi près.

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Monfieur de Saumaife, & le Pere Petan Jefuite, n'ont ceffé de fe battre qu'en mourant; on peut affurer que c'étoient deux Athletes digués l'un

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