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CHAPITRE IV.

L'AVEUGLE-NÉ ET LE BON PASTEUR.

La guérison de l'aveugle-né. L'enquête des pharisiens. — Les vrais aveugles. - La fête de la Dédicace. Les brebis du bon Pasteur. Jésus, Fils de Dieu.

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Le bon Pasteur.

Parmi les miracles accomplis à Jérusalem, il en était un qui avait plus particulièrement frappé les esprits: pendant son séjour pour la seconde Pâque, Notre Seigneur avait guéri l'infirme à la piscine de Bethesda. Il voulut marquer son passage dans la ville, à l'occasion de la fête des Tabernacles, par une autre merveille éclatante. Il l'opéra encore le jour du sabbat, pour montrer combien l'Évangile était au dessus des vaines prescriptions des pharisiens, et l'oeuvre qu'il choisit fut la démonstration péremptoire des droits que le Sauveur revendiquait pour lui-même. Il avait affirmé qu'il était la lumière du monde et le Fils de Dieu : il allait le prouver.

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Quand il fut sorti du temple, « Jésus vit en passant un homme qui était aveugle de naissance. Ses disciples lui demandèrent : << Maître, qui a péché, de lui ou de ses parents, pour qu'il soit né «‹ aveugle? ». Il circulait alors en Palestine de singulières idées sur la nature des âmes. Sur la foi de certains docteurs, on admettait qu'elles avaient pu jouir d'une existence antérieure, et l'on expliquait l'inégalité des conditions présentes par la conduite des âmes dans cette autre vie. On croyait encore que l'enfant pou

GUÉRISON DE L'AVEUGLE-NE.

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vait mal se comporter dès le sein de sa mère, et mériter par là un châtiment à sa naissance. Toutes ces rêveries égaraient les esprits populaires, déjà troublés par les mille traditions des pharisiens. On se souvenait aussi que le Seigneur avait promis de châtier dans les enfants les péchés des parents, et l'on regardait le mal physique comme la conséquence indéniable du péché commis. On oubliait que l'affliction corporelle peut avoir le caractère d'épreuve, comme l'avait enseigné, un millier d'années auparavant, l'auteur sacré du livre de Job. Notre Seigneur allait déclarer qu'une autre raison, d'ordre encore plus élevé, amène parfois la Providence à laisser souffrir la créature.

En effet, «< Jésus répondit : Ce n'est point parce que lui ou ses « parents ont péché, mais afin que les œuvres de Dieu soient «<manifestées en lui. Il faut en effet que j'accomplisse, pendant

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qu'il fait jour, les œuvres de celui qui m'a envoyé; la nuit vient, << durant laquelle personne ne peut agir. Or, tant que je suis dans <«<le monde, je suis la lumière du monde ». Le Sauveur a encore quelques semaines à passer au milieu des hommes, pour les illuminer par sa parole et par ses miracles. La nuit qui arrive, c'est l'heure où la puissance des ténèbres aura la liberté d'agir, pour le saisir et le mettre à mort.

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Quand il eut ainsi parlé, il cracha à terre et fit de la boue << avec sa salive », reproduisant ainsi, pour créer la vue en cet aveugle, l'acte accompli jadis pour créer le corps de l'homme. << Ensuite il oignit ses yeux avec cette boue, et il lui dit : Va te << laver dans la piscine de Siloé (dont le nom signifie : envoyé). L'aveugle s'en alla donc, se lava, et revint en voyant. Aussi ses voisins et ceux qui l'avaient vu précédemment, quand il mendiait, disaient N'est-ce pas celui qui était assis et mendiait? « C'est lui, disaient les uns. D'autres : Point du tout, c'en est un qui lui ressemble. Mais pour lui, il disait : C'est bien moi. On << lui demandait donc : Comment tes yeux ont-ils été ouverts? Il répondit: Cet homme qui s'appelle Jésus, a fait de la boue, «<en a oint mes yeux, et m'a dit : Va à la piscine de Siloé et lavetoi. J'y suis allé, je me suis lavé et je vois. Ils lui dirent: Où est«il? Je ne sais pas, répondit-il.

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« On amena alors aux pharisiens celui qui avait été aveugle.

« Or c'était le sabbat, quand Jésus fit de la boue et lui ouvrit les << yeux. Les pharisiens lui demandaient donc de nouveau com<«<ment il avait vu. Il leur dit : Il m'a mis de la boue sur les yeux, « je me suis lavé et je vois. Plusieurs pharisiens disaient alors: « Cet homme n'est pas de Dieu, puisqu'il ne garde pas le sabbat. «< D'autres au contraire: Comment un homme pécheur peut-il << faire de tels miracles? Il y avait désaccord entre eux. Ils interpel<< lèrent donc encore une fois l'aveugle : Toi, que dis-tu de celui <«< qui t'a ouvert les yeux? C'est un prophète, répondit-il.

<«< Les Juifs ne crurent point que cet homme avait été aveugle <«<et ensuite avait vu, tant qu'ils n'eurent pas cité les parents de <«< celui qui avait recouvré la vue. Ils leur demandèrent : C'est «< bien là votre fils, et vous dites qu'il est né aveugle; comment «< donc voit-il à présent? Ses parents répondirent : Nous savons << que c'est notre fils et qu'il est né aveugle; mais comment voit<«< il maintenant, nous n'en savons rien; et qui lui a ouvert les « yeux, nous l'ignorons. Interrogez-le lui-même; il est en âge, qu'il parle de ce qui le concerne. Ses parents tinrent ce langage << par peur des Juifs. Car déjà les Juifs avaient arrêté entre eux « que quiconque en Jésus reconnaîtrait le Christ, serait mis hors « de la synagogue. C'est pour cela que ses parents avaient dit : « Il est en âge, interrogez-le lui-même.

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<< Ils rappelèrent de nouveau celui qui avait été aveugle, et lui dirent Rends gloire à Dieu : nous savons que cet homme est <«< un pécheur. —Que ce soit un pécheur, répondit-il, je n'en sais << rien. Tout ce que je sais, c'est que j'étais aveugle, et qu'à présent je vois. Ils lui dirent : Que t'a-t-il fait? Comment t'a<«<t-il ouvert les yeux? - Je vous l'ai déjà dit, répondit-il, et vous <«< l'avez entendu; pourquoi voulez-vous l'entendre encore une <«< fois? Ne voudriez-vous pas, vous aussi, devenir ses disciples? <<< Ils l'accablèrent de malédictions et dirent: Sois son disciple, toi; nous, nous sommes les disciples de Moïse. Nous savons << que Dieu a parlé à Moïse; quant à celui-ci, nous ne savons <«< d'où il est. Cet homme leur répondit: Il cst. vraiment bien << étonnant que vous ne sachiez d'où il est, alors qu'il m'a ouvert <«<les yeux. Nous savons pourtant que Dieu n'écoute pas les pécheurs; mais si quelqu'un honore Dieu et fait sa volonté,

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L'ENQUÊTE DES PHARISIENS.

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«< c'est celui-là que Dieu exauce. On n'a jamais entendu dire que quelqu'un ait ouvert les yeux d'un aveugle-né. Si celui-ci n'était << pas de Dieu, il n'aurait pu rien faire. Ils lui répondirent: Tu «<es né tout entier dans les péchés, et tu veux nous en appren«<dre! Et ils le jetèrent dehors ».

Rien de plus instructif que cette guérison de l'aveugle-né et que l'enquête dont elle est suivie. Tout d'abord, le Sauveur veut opérer le miracle dans les conditions de la plus éclatante notoriété. L'aveugle est rencontré en pleine ville; c'est devant tous que Notre Seigneur oint ses yeux avec de la boue, opération bien plus capable d'ôter la vue à un voyant que de la rendre à un aveugle. L'infirme est envoyé à la piscine de Siloé, alimentée par une source qui provient de la colline du temple, et où l'on a puisé l'eau solennellement, pendant la fête des Tabernacles. Le nom mystérieux de la fontaine fait qu'elle est une figure du véritable << envoyé » de Dieu, de celui qui est «< la vraie lumière éclairant tout homme à sa venue dans ce monde ». Quand l'aveugle revient guéri, on s'empresse autour de lui, on discute son identité avec le mendiant bien connu, et son propre témoignage met fin à toutes les hésitations. Le miracle fait naturellement grand bruit; des gens qui surveillaient de près toutes les démarches du Sauveur mènent l'aveugle auprès des autorités, pour qu'il témoigne de ce qui s'est passé. Car c'est le jour du sabbat, et Jésus, en pétrissant un peu de boue, a transgressé la loi par un travail analogue à celui du boulanger ou du maçon !

Le sanhedrin ne se réunissait pas d'ordinaire le jour du sabbat; néanmoins beaucoup de ses membres se trouvaient présents et le cas était urgent. Pour atténuer l'effet produit par le miracle, il faut de toute nécessité soit le nier, soit l'expliquer. Le nier serait de beaucoup le plus sûr. Mais l'aveugle est là qui témoigne de sa guérison. On ne le croit pas ses parents viennent confirmer son témoignage. On cherche à l'égarer, à l'intimider, à trouver dans son récit quelque contradiction: il tient bon, et, avec une fermeté admirable, cet homme du peuple défend la vérité contre les personnages les plus marquants de sa nation.

Le miracle ne peut être nié; on l'expliquera. Il n'est certaine

ment pas une œuvre divine, car celui qui l'a accompli est un violateur du sabbat, un pécheur, un homme qui vient on ne sait d'où. Mais ici encore l'incrédulité des pharisiens se heurte au merveilleux bon sens de l'aveugle. En lui ouvrant les yeux du corps, le Sauveur a fait luire une étincelante clarté devant les yeux de son âme. Cet homme a pour chaque objection une réponse péremptoire, et sa conclusion est si logique que les pharisiens n'ont pour riposter que la colère et la brutalité.

L'enquête menée par les pharisiens sur la guérison de l'aveuglené est le type parfait de celles qui sont poursuivies chaque jour par l'incrédulité contre l'intervention surnaturelle de Dieu dans. le monde. Le miracle est-il éloigné dans le temps ou dans l'espace? On le nie. Sa réalité s'impose-t-elle? On cherche à l'expliquer. Les pharisiens disaient : « Nous savons que cet homme est un pécheur. Nous ne savons d'où il est ». Les incrédules disent de même : « Nous savons », quand ils veulent que ce qu'ils comprennent soit la mesure de ce que Dieu peut faire, et : « Nous ne savons pas », quand ils pensent que pour empêcher les faits surnaturels d'exister, il suffit de les passer sous silence. Les pharisiens jettent dehors le témoin gênant : les incrédules, quand ils ont la force en main, mettent au ban de la société ceux qui proclament que Dieu est le souverain Maître et que Jésus Christ est son Fils. Le Sauveur, ses actes et sa doctrine sont et seront toujours «<le signe auquel il est contredit ». Beaucoup trouvent leur résurrection dans ce signe : à eux de supporter patiemment les mépris et les violences de ceux qui s'obstinent à y trouver leur ruine; aux croyants de plaindre les incrédules, au lieu de les maudire, de les éclairer au lieu de les abandonner à leurs ténèbres, d'appeler sur eux la lumière qui éclaire et convertit, au lieu de la foudre qui détruit sans retour.

Cependant le Sauveur suivait de son regard divin le fidèle témoin qui rendait à la vérité un si fier hommage, et déjà souffrait à cause de lui la haine des méchants. « Jésus entendit << rapporter qu'ils l'avaient jeté dehors, et quand il l'eut retrouvé, «< il lui dit : Crois-tu au Fils de Dieu? Il répondit : Qui est-il, Seigneur, afin que je croie en lui? Jésus lui dit : C'est lui que

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