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L'on n'en fent point la rapidité; mais elle commence à fe faire fentir, à mefure qu'on commence à fe roidir plus ou moins contre elle. Il ne faut ni fe flater, ni s'impatienter contre foi-même fur la correction de fes défauts.

Quand on vous demande quelque chofe qui paroît impoffible à la natu re; dites en vous-même, rien n'eft impoffible à Dieu.

Il ne faut point fe décourager, ni par l'expérience de notre foibleffe, ni pour le dégoût d'une vie agitée où nótre état nous engage. C'est une miséricorde de Dieu de gémir de cette agitation; & le gémiffement eft le contrepoifon qui empêche notre cœur d'être corrompu. Le découragement n'est pas un état humble; c'est au contraire un dépit, & un désespoir d'un orgueil lâche rien n'eft fi mauvais. Soit que nous bronchions, foit même que nous tombions; ne fongeons qu'à nous relever, & à reprendre notre courfe. Toutes nos fautes nous font utiles; pourvû qu'en nous ôtant une maudite confiance en nous-mêmes, elles ne nous ôtent point l'humble & falutaire confiance en Dieu.

Les répugnances que nous fentons> pour nos devoirs, viennent fans doute

d'imperfection. Si nous étions parfaits, nous aimerions tout ce qui eft de l'ordre de Dieu : mais puifque nous naisfons corrompus, & d'un naturel revolté contre les régles; loiions Dieu qui fçait tirer le bien du mal même, & qui fe fert de notre répugnance pour nous faire pratiquer diverfes vertus. L'ouvrage de la grace, comme remarque fainte Therefe, ne s'avance pas toujours régulierement comme celui de la nature.

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Il n'eft pas furprenant que l'amour de fa perfonne fe faffe fentir dans fon cœur; on n'eft pêtri que de complaifance vaine en foi-même, & de paffion pour réüffir en tout. Il ne faut point fe troubler & fe décourager pour éprouver en foi ces miferes, qui renaiffent à tout moment & qui fourmillent dans le cœur. Il n'y a qu'à n'y ayoir aucun égard, qu'à le tourner paisiblement vers Dieu, & qu'à lui sacrifier toutes ces frivoles inclinations.

Qu'il eft honteux à une ame faite pour Dieu, d'avoir tant de penchant à être idolâtre de foi-même ! Il faut s'en humilier, fe défier de foi, fe fervir de cette pente malheureuse pour méprifer davantage, enfin s'éxécuter

fe

généreufement & courageufement dans tout ce que l'efprit de Dieu demande de nous.

Ne vous découragez de rien. Suportez-vous vous-même avec humilité dans vos inégalités, dans vos foibleffes, & dans vos peines. Bénissez Dieu d'auffi bon cœur des progrès que les autres feront dans la vertu, que fi vous les faifiez vous-même. Ne vous troublez point des agitations de l'amour propre, laiffez les paffer fans prefque daigner les obferver.

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Vous faites, en vous impatientant de reffentir cette peine que vous avez honte de fentir, ce que feroit un orfévre inconfidéré, qui voïant fon or fondu dans le creufet, le jetteroit, croïant tout perdu. Autant cette peine feroit mauvaise, fi vous l'entreteniez volontairement, autant vous fera-t-elle utile, fi vous la foûtenez avec fidélité, fans vous décourager. Craignez fouverainement de déplaire à Dieu de propos délibéré. Les fautes légeres & dans lefquelles on tombe par légereté, quoique faciles à réparer, ne laifferoient pas de refroidir beaucoup la charité, fi elles devenoient habituelles, fi elles féjourpoient dans notre cœur felon cette

parole

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parole du faint Elprit, les mouches qui Eccle, X. L meurent dans le beaume, en corrompent la fuavité.

Purifiez donc foigneufement votre confcience de toutes les fautes de la journée. Ne laiffez jamais féjourner le péché dans votre cœur, quelque petit qu'il foit. Il obfcurcit la lumière de la grace; il apefantit l'ame; il empêche toujours un peu le fréquent commerce qu'une ame doit entretenir avec J ESUS-CHRIST, & par la fuite l'on devient tiede, l'on oublie davantage Dieu; & l'on eft plus fenfible aux créatures. Une ame pure au contraire qui s'humilie & fe releve promptement après les moindres fautes, eft toujours fervente & droite.

Dieu ne nous fait fentir notre foi

bleffe, que pour nous donner la force. Tout ce qui eft involontaire, ne doit point nous troubler. Le principal eft de n'agir jamais contre la lumiere intérieure, & de vouloir aller auffi loin que Dieu veut nous conduire.

Il ne faut pas attendre la liberté & la retraite pour fe détacher de tout, & pour vaincre le vieil homme. La vûë d'une fituation libre, n'eft qu'une belle idée. Peut-être n'y parviendrons-nous

K

jamais; & il faut fe fentir prêt à mourir dans la fervitude de notre état, fi Dieu le veut, & que fa providence prévienne nos projets de retraite. Nous ne fommes point à nous; & Dieu ne nous demandera que ce qui dépend de nous. Les Ifraëlites dans Babylone foupiroient après Jérufalem; mais combien y en eut-il qui ne revirent jamais Jérufalem, & qui finirent leur vie à Babylone ? Quelle illufion, s'ils euffent toujours diféré jufqu'à ce tems de leur retour dans leur patrie, à fervir fidelement le vrai Dieu, & à fe perfectionner! Peut-être ferons-nous comme les Ifraëlites.

SUR L'UTILITE DU

V

filence.

Ous devez travailler maintenant à vous taire, autant que la bienféance du commerce vous le permettra. Le filence fait la présence de Dieu, épargne beaucoup de paroles rudes & hautaines; enfin fuprime un grand nombre de railleries, ou de jugemens dangereux fur le prochain. Le filence

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