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dre avant le tems; mais quand on a un vrai befoin de parler de foi dans les ocafions communes, il faut le faire tour uniment, & ne fe laiffer aller ni à une modestie affectée, ni à une honte qui vient d'une mauvaise gloire: la mauvaise gloire fe cache fouvent fous un air modefte & réservé. On ne veut pas montrer ce qu'on a de bon, mais on eft bien aife que les autres le découvrent pour avoir l'honneur tout ensemble, & de fes vertus, & du foin de les cacher.

Pour juger du befoin qu'on a de penfer à foi, ou de parler de foi, il faut prendre confeil de la perfonne qui peut connoître le dégré de grace, où

l'on eft. Par-là vous éviterez de vous conduire, & de vous juger vous-même, ce qui eft une fource de bénédic tions.

C'est donc à l'homme pieux & éclairé, dont nous prenons conseil à décider, file befoin de parler de foi eft véritable ou imaginaire; fon éxamen & fa décifion nous épargnent beaucoup de retours fur nous-mêmes. Il éxaminera, fi le prochain à qui nous devons parler, eft capable de porter fans fcandale cette liberté & cette fimplicité à

parler de nous avantageufement, & fans façon dans le vrai befoin.

Pour les cas imprévus, où l'on n'a pas le loifir de confulter, il faut fe donner à Dieu, & faire felon fa lumiere préfente ce qu'on croit le meilleur mais fans héliter; car l'héfitation embroüilleroit. Il faut d'abord prendre fon parti, quand même on le pren droit mal, le mal fe tourneroit à bien par la droite intention, & Dieu ne nous imputera jamais ce que nous aurons fait faute de confeil, en nous abandonnant à la fimplicité de fon esprit.

Pour toutes les manieres de parler contre foi-même, je n'ai garde ni de les blâmer, ni de les confeiller. Quand elles viennent par voie de fimplicité, de la haine & du mépris que Dieu nous infpire pour nous-mêmes, elles font merveilleufes, & c'eft ainfi que je les regarde dans un fi grand nombre de Saints.

Mais communément le plus fimple & le plus fûr, eft de ne parler jamais de foi ni en bien, ni en mal fans befoin; l'amour propre aime mieux les injures que le mépris & le filence. Quand on ne peut s'empêcher de

parler mal de foi, on eft bien prêt à se racommoder avec foi-même, comme les amans infenfés, qui font prêts à recommencer leurs folies, lorfqu'ils paFoiffent dans le plus horrible défefpoir contre la perfonne, dont ils font paf

fionnés.

Pour les défauts, nous devons être attentifs à les corriger fuivant l'état intérieur où nous fommes. Il y a autant de manieres diférentes à veiller pour fa correction, qu'il y a de diférens états de la vie intérieure. Chaque travail doit être proportionné à l'état où l'on fe trouve; mais en général, il est certain que nous déracinerons plus nos défauts par le recüeillement, par l'extinction de tous défirs trop violens & exceffifs, & de toutes repugnances volontaires; enfin par l'amour & par l'abandon à Dieu, que par les réfléxions inquiétes fur nous-mêmes. Quand Dieu s'en mêle, & que nous ne retardons point fon action, l'ouvrage va bien vîte.

Cette fimplicité fe répand jufques fur l'extérieur. Comme on eft inté eurement dépris de foi-même, par le retranchement de tous les détours volontaires & trop grands, on agit plus naturellement.

L'art tombe avec les réfléxions. On agit fans penfer prefque à foi ni à fon action, par une certaine droiture de volonté, qui eft inexplicable à ceux qui n'ont pas l'expérience.

Alors les défauts fe tournent à bien; car ils humilient fans décourager. Quand Dieu veut faire par nous quelque action au - dehors, ou il ôre ces défauts, ou illes met en œuvre par deffeins, ou il empêche que les gens fur qui on doit agir, n'en foient rebu

tés.

fes

Mais enfin, quand on eft véritablement dans cette fimplicité intérieure, tout l'extérieur en eft plus ingenu, plus naturel; quelquefois même il paroît moins modefte que certains extérieurs plus graves & plus compofés: mais cela ne paroît qu'aux perfonnes d'un mauvais goût, qui prennent l'affectation du monde pour la modeftie mêine, & qui n'ont pas l'idée de la vraïe fimplicité.

Cette vraie fimplicité paroît quelquefois un peu négligée & moins réguliere, mais elle a un goût de candeur & de vérité qui fe fait fentir. Jel ne fçai quoi d'ingenu, de doux, d'innocent, de gai, de paifible qui char

G.

Rom. VIII,

me, quand on le voit de près & de fuite, & avec des yeux purs.

O quelle eft aimable cette fimplicité! Qui me la donnera ? Je quitte tout pour elle; c'eft la perle de l'Evangile. O qui la donnera à tous ceux qui ne veulent qu'elle! Sageffe mondaine, vous la méprifez, & elle vous méprife. Folle fageffe vous fuccomberez, & les enfans de Dieu détefteront cette prudenqui n'eft que mort, comme dit

ce,

l'Apôtre.

Que le cœur eft à l'aife, quand Dieu ouvre à une ame la voie de fimplicité; on eft content d'être libre, content d'être affujetti; on eft prêt à parler; on eft prêt à fe taire. Quand on ne peut dire des chofes édifiantes, on dit des riens d'auffi bon cœur. Par-là on fe délaffe, & on délaffe les autres. Mais vous aimeriez mieux quelque chofe de plus folide, dites-vous. Dieu ne l'aime pas mieux pour vous, puisqu'il choifit ce que vous ne choifiriez pas yous-même. Son goût eft meilleur que le vôtre; c'est que les vertus même ont befoin d'être purifiées dans leurs éxercices, par les contre-tems que la Providence leur fait foufrir. C'est Dieu qui vous a donné le goût des choles folides,

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