페이지 이미지
PDF
ePub

SUR LA MORT.

I.

L'glement des hommes, de ne vou'On ne peut trop déplorer l'aveuloir pas penfer à la mort, & de fe détourner d'une chofe inévitable, que l'on peut rendre heureufe en y penfant fouvent. Rien n'est fi terrible que la mort, pour ceux qui font atachés à

la vie.

La mort ne trouble que les perfonJoan. IV. 18. nes charnelles. Le parfait amour chaffe la crainte. Ce n'eft pas par fe croire jufte qu'on ceffe de craindre, c'est par aimer fimplement, & s'abandonner fans retour trop inquiet fur foi, à celui qu'on aime. Voilà ce qui rend la mort douce & prétieufe. Quand on eft mort à foi-même, la mort du corps n'eft plus que la confommation de l'œuvre de la

grace. Combien eft-il étrange, que tant de fiécles paffés, ne nous faffent pas juger folidement du préfent & de l'avenir. On évite la pensée de la mort pour ne fe pas atrifter. Elle ne fera trifte que pour ceux qui n'y auront pas penfé.

Elle arrivera enfin cette mort, & éclairera celui qui n'aura pas voulu être éclairé pendant fa vie. On aura à la mort une lumiere très-diftincte de tout ce que nous aurons fait, & de tout ce que nous aurions dû faire. Nous verrons clairement l'ufage que nous aurions dû faire des graces reçûës, des talens des biens, de la fanté, du tems, & de tous les avantages ou malheurs de notre vie.

[ocr errors]

La pensée de la mort eft la meilleure régle que nous puiffions prendre pour toutes nos actions, & nos projets. Il la faut défirer, mais il la faut auffi atendre avec la même foumiffion que nous devons avoir à la volonté de Dieu -dans tout le refte. On doit la défirer. puifqu'elle eft la fin de nos peines, la confommation de notre pénitence, l'entrée de notre bonheur, & notre éternelle récompense.

Il ne faut point dire que l'on vent vivre pour faire pénitence, puifque la mort eft la meilleure que nous puiffions faire. Nos péchés feront purgés plus purement, & expiés plus éficacement par notre mort, que par toutes nos pénitences. Elle fera auffi douce pour les gens de bien, qu'elle fera a

mere pour les méchans. Nous la demandons tous les jours dans le Pater. Il faut que tous demandent que le Roiaume de Dieu lui arrive. Il faut donc le défirer, puifque la priere n'eft que le défir du cœur, & que ce Roïaume ne peut venir pour nous, que par notre mort. Saint Paul recommande aux 1. The f. IV. Chrétiens de fe confoler ensemble dans la pensée de la mort.

17.

Luc. XII. 20.

II.

Infenfe, cette nuit on va te redemander ton ame. Pour qui fera ce que tu as amaffe? On ne peut trop déplorer l'aveuglement des hommes, de ne vouloir pas penfer à la mort, & de fe détourner d'une chofe inévitable que l'on pourroit rendre heureuse en y penfant. Rien n'eft fi terrible que la mort pour ceux qui font atachés à la vie. Il est étrange que tant de fiécles paffés ne nous faffent pas juger folidement du préfent ni prendre de plus grandes précautions. Nous fommes infatués du monde comme s'il ne devoit jamais finir. La mémoire de ceux qui jouent aujourd'hui les plus grands rôles fur la fcene, périra avec eux. Dieu

& de l'avenir

[ocr errors]

permet que tout fe perde dans l'abîme
d'un profond oubli, & les hommes plus
que tout le refte. Les pyramides d'E-
gypte
fe voient encore, fans qu'on fça-
che le nom de celui qui les a faites.
Que faifons-nous donc fur la terre, &
à quoi fervira la plus douce vie, fi par
des mefures fages & chrétiennes elle ne
nous conduit pas à une plus douce &
plus heureuse mort 2

I I I.

Soiez prêts, parce qu'à l'heure que vous n'y pensez pas le Fils de l'Homme vien ira. Cette parole nous eft adreffée perfonnellement en quelque âge & en quelque rang que nous foions. Cependant jufqu'aux gens de bien, tous font des projets qui fupofent une longue vie, lors même qu'elle va finir. Si dans l'extrémité d'une maladie incurable on efpere encore la guérifon, quelles efpérances n'a-t-on pas en pleine fanté ? Mais d'où vient qu'on efpere fi opiniâtrement la vie? C'est qu'on l'aime avec paffion. Et d'où vient qu'on veut tant éloigner la mort ? C'eft qu'on n'aime point le Roïaume de Dieu, ni les grandeurs du fiécle futur. O hommes pé

Matth.

XXIV. 44

fans de cœur, qui ne peuvent s'élever au-deffus de la terre, où, de leur propre aveu, ils font miférables! La véritable maniere de fe tenir prêt pour le dernier moment, c'eft de bien emploïer tous les autres, & d'atendre toujours celui-là.

DU BON USAGE DES CROIX.

L

Es chofes pénibles qui fe mettent entre Dieu & nous, ce font des croix qu'il faut porter patienment, & qui feront des moïens pour nous unir à lui, fi nous les foufrons humblement. Les chofes qui confondent & qui acablent notre orgieil, nous font encore plus de bien, que celles qui nous animent à la vertu. Nous avons befoin d'être abatus, comme faint Paul aux portes de Damas, & de ne trouver plus de reffource en nous-mêmes, mais en Dieu.

La nature n'infpire qu'un courage fier & dédaigneux, & s'irrite contre les perfonnes dont Dieu fe fert pour nous humilier.

Il faut porter fes croix en filence,

« 이전계속 »