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par le cœur, & non par l'efprit. Défabufez-moi de ma vaine raifon, de ma prudence aveugle, de tous défirs indignes d'une ame qui vous aime. Que je meure comme Auguftin, à tout ce qui n'eft pas vous.

-Sur la fête de tous les Saints.

'Intention de l'Eglife eft d'honorer L'aujourd'hui tous les Saints enfem

ble; je les aime, je les invoque, je m'unis à eux, je joins ma voix aux leurs pour louer celui qui les a faits Saints; que volontiers je m'écrie avec cette Eglise céleste : Saint, Saint, Saint, à Dieu feul la gloire, que tout s'anéantiffe devant lui.

Je vois des Saints de tous les âges, de tous les tempéranmens, de toutes les conditions ; il n'y a donc ni âge, ni tempéranment, ni condition qui exclud de la fainteté. Ils ont eu au dehors les mêmes obftacles, les mêmes combats que nous ; ils ont eu au dedans les mêmes répugnances, les mêmes sensibilités, les mêmes tentations, les mêmes révoltes de la nature corrompuë ; ils ont eu des habitudes tiranniques à détruire, des rechutes à réparer, des il

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lufions à craindre, des relâchemens flateurs à rejéter, des prétextes plausibles à furmonter, des amis à craindre, des ennemis à aimer, un orgueil à faper par le fondement, une humeur à réprimer, un amour propre à pourfuivre fans relâche, jufques dans les derniers replis du cœur.

Ah, que j'aime à voir les Saints foibles comme moi, toujours aux prifes. avec eux-mêmes, n'aiant jamais un feul moment d'affuré ! j'en vois dans la retraite livrés aux plus cruelles tentations; j'en vois dans les profpérités les plus redoutables, & dans le commerce du fiécle le plus empefté. O grace du Sauveur, vous éclatez par tout, pour mieux montrer votre puiffance, & pour ôter toute excufe à ceux qui vous réfistent: il n'y a ni habitude enracinée, ni tempéranment ou violent, ou fragile, ni croix acablante, ni profpérités empoifonnées, qui puiffent nous excufer, fi nous ne pratiquons pas l'Evangile. Cette foule d'éxemples décide : la grace prend toutes les formes les plus diverfes fuivant les divers befoins; elle fait auffi aifément des Rois humbles, que des Solitaires pénitens, & recueillis: tout lui eft facile quand nous ne

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réfiftons pas à fon atrait. J'entens la voix du Sauveur qui dit, que Dieu fçait changer les pierres mêmes en enfans d'Abraham. O JESUS, ô Parole du Pere, mais parole d'éternelle vérité acompliffez donc cette parole en moi, moi pierre dure & infenfible moi qui ne puis être taillé que fous les coups redoublés du marteau; moi rebelle, indocile & incapable de tout bien: ô Seigneur, prenez cette pierre, glorifiez-vous, amoliffez mon cœur ; animez-le de votre efprit, rendez - le fenfible à vos vérités éternelles; formez en moi un enfant d'Abraham qui marche fur les veftiges de fa foi.

Dirai-je avec le monde infenfé: Je veux bien me fauver; mais je ne prétens pas être un faint? Ah, qui peut efpérer fon falut, fans la fainteté ! rien d'impur n'entrera au Roïaume des Cieux; aucune tache n'y peut entrer, fi légere qu'elle puiffe être, il faut qu' elle foit éfacée, & que tout foit purifié jufques dans le fond par le feu vengeur de la juftice divine, ou en ce monde ou en l'autre; tout ce qui n'eft pas dans l'entier renoncement à foi, & dans l'amour qui raporte tout à Dieu & à notre falut, eft encore foüillé. O Sainte

té de mon Dieu, aux yeux duquel les aftres mêmes ne font pas allez

purs!ô Dieu jutte, qui jugerez toutes nos imparfaites juftices, mettez la vôtre audedans de mes entrailles pour me renouveller ne laiffez rien en moi de moi-même.

Sur la Commémoration des Morts.

M

On Dieu, je regarde avec confolation cette cérémonie de votre Eglife, qui met la mort devant nos yeux. Hélas, faut-il que nous aïons befoin qu'on nous en rapelle le fouvenir? Tout n'eft que mort ici-bas; le genre humain tombe en ruïne de tous côtez à nos yeux ; il s'eft élevé un monde nouveau fur les ruïnes de celui qui nous a vû naître ; & ce nouveau monde, déja vieilli, eft prêt à difparoître: chacun de nous meurt infenfiblement tous les jours; l'homme, comme l'herbe des champs, fleurit le matin le foir il languit, il se déféche, il eft flétri, & il eft foulé aux pieds. Le paffé n'est qu'un fonge; le préfent nous échape dans le clin d'œil où nous voulons le voir; l'avenir n'eft point à nous, peutêtre n'y fera-t-il jamais; & quand il Y

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feroit, qu'en faudroit il croire ? Il vient, il s'aproche, le voilà, il n'eft déja plus, il est tombé dans cet abîme du paffé, où tout s'engoufre & s'anéan

tit.

O Dieu, il n'y a que vous ! Vous feul êtes l'E TRE véritable; tous le reste n'eft qu'une image trompeufe de l'être, qu'une ombre qui s'enfuit. O Vérité! ô Tout! je me réjouis de ce que je ne fuis rien à vous feul apartient d'être toujours vous êtes le vivant au fiécle des fiécles. O hommes aveugles, qui croïez vivre, & qui ne faites que

mourir !

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Mais cette mort, qui fait frémir toute la nature, la craindrai-je lâchement ? Non, non; pour les enfans de Dieu elle eft le paffage à la vie, elle ne nous dépouille que de la vanité & de la corruption; c'eft elle qui doit nous revêtir des dons éternels. O mort, ô bonne mort! quand voudras-tu me réünir à ce que j'aime uniquement ? Quand viendras-tu me donner le baifer de l'Epoux? Quand eft-ce que les liens de ma fervitude feront rompus? O Amour éternel, ô Vérité, qui ferez luire un jour fans fin! O paix du Roïaume de Dieu, où Dieu lui-même fera tout en

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