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amour, quoique fincere eft pourtant fans attachement; qu'il aime fans inquiétude; que fes ouvrages ne lui plaifent que felon fes deffeins; que quand il voit l'ombre du péché dans fes amis, il les livre à des châtimens terribles; qu'il réprouve pour jamais les ennemis de fa fainteté qu'il condamnera un jour tout ce grand monde au feu du dernier embrafement ; & qu'il verra toutes les créatures abandonnées à ce feu dévorant, fans en avoir la plus légere émotion; par cette feule raison, que les méchans en ont fait les inftrumens de leurs péchés.

C'est par l'impreffion de cette même Sainteté, que le cœur de Dieu pa roît infenfible fur l'état des ames qui foufrent, quoiqu'il les aime. Je parle de celles du Purgatoire, qui pour avoir porté dans l'autre monde quelques légeres taches d'iniquité, & par conféquent avoir elles-mêmes quelque légere opofition à la fainteté de Dieu,fe voïent réléguées loin de fa face dans un afreux défert, où les douleurs les plus vives fe font fentir à un cœur qui n'est que défirs, & ne poffède rien ; qui n'est qu'amour, & qui fent la colere de fon bien aimé. Dieu les voit dans cet F

état, incapables de fe foulager par elles-mêmes; il les voit dans ces violences; & malgré les empreffemens de fon amour, il les y laiffe, & demeure paifible. Sainteté adorable de mon Dieu, que vous pouffez loin vos rigueurs ! Vous méconnoiffez ceux qui font à vous, pour peu qu'ils aïent d'opofition à votre infinie pureté ; & les apellant d'une main par le feu d'amour que vous allumez dans leurs cœurs pour les attirer, vous les repouffez de l'autre par les Arrêts rigoureux de votre juftice que vous leur prononcez. Mais, Seigneur, ces ames vous aiment, & vous voulez qu'elles foufrent. Leur fuplice ne diminue rien de votre amour pour elles. Leur amour pour vous ne diminue rien de leurs peines. Ah cœur divin, que vous êtes aimable, que vous êtes faint; qui pourra fubfifter devant la face d'un Dieu f faint & fi pur

!

C'eft cette même fainteté qui voit les Saints fur la terre accablés fous la maladie, la langueur, & la perfécution. Elle fçait qu'ils font à elle; & cependant elle les voit dans une profonde paix, dans leur accablement pouvant toujours les foulager, & fou

vent refufant de le faire, pouvant les tirer de l'opreffion, & les y laiffant enfévelis; & au milieu de tout cela, ce grand cœur n'a rien de plus fort pour marquer fon amour, que ces manieres dures dont il ufe avec fes amis.

C'est cette aimable & augufte Sainteté qui femble avoir méconnu JESU SCHRIST, l'aimable Jacob; parce qu'il parut dans le monde fous la peau d'Efau, fous les dehors de péché. C'est elle qui le livra aux Juifs après une vie traverfée, pénible, & très - dure; qui le condamna à la mort, traîné de Tribunal en Tribunal, traité comme un fol, & devenu le joiiet de l'impiété des Prêtres & de la cruauté des bourreaux. C'eft elle qui le vit attaché fur la Croix comme un coupable, pendu entre deux voleurs, comme un fcélerat. Elle le vit, dis- je, dans tous ces états, fans paroître s'y intéreffer. Bien plus il pria, il demanda du fecours, il fe plaignit fans être écouté, fon abandon fut prefque entier ; & la Sainteté put tout fur le cœur de Dieu fon Pere. Ses droits lui furent fi chers, qu'il confentit pour les maintenir de méconnoître fon propre Fils, d'abandonner le cher objet de fon amour, &

de laiffer à une mort honteuse ce Fils

bien-aimé, qui confommoit fa vie pour la gloire de fon Nom. Jamais ce Dieu ne fut plus fourd. Les cris de quelques Saints affligés l'avoient touché dans leurs preffantes néceffités, & il s'étoic fait comme un honneur de venir à leuraide, & d'aprendre à tous les hommes qu'on ne l'invoquoit pas en vain. Il traite fon Fils plus durement que fes anciens ennemis; il le confidere moins comme un homme,que comme un ver, & comme fi le Saint des Saints étoit indigne d'être écouté dans cet état, à cause de l'aparence du péché qui le couvre, il l'oublie à un tel point, que cette victime de patience fe plaint à fon Pere de fon abandon, & meurt en cet état. O adorable, ô ineffable Sainteté, qui pourra fubfifter devant vous ! Dieu Saint & trois fois Saint, je vous adore, & je me tais.

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C'eft encore la Foi qui nous repréfente la Sainteté de Dieu comme attentive fur fes droits, & apliquée à foûtenir les intérêts. Elle veut pofféder tout notre cœur, dans lequel elle ne foufre aucun partage. Elle regarde com me fes ennemis déclarés ceux dont le cœur eft divifé. Elle permet bien l'ufa

ge des créatures, mais elle défend qu'on s'y attache; quoiqu'elle ne condamne pas tout foin du corps, elle veut pourtant qu'on le maltraite; & la mortification eft toujours de fon goût. Voilà quelque chofé de ce que la Foi comprend fur cette adorable Sainteté.

Qui fçauroit confulter la Foi fur tout ce qui fe paffe fous nos yeux, on en feroit des fruits excellens d'une priere continuelle. Il n'eft rien de plus inutile pour nous, & même de plus dangereux, que la vûë des créatures en elles-mêmes; mais ces mêmes créatures fous les lumieres de la Foi,nous font un nouveau monde qui est tout innocent,mais ce monde nouveau que la grace a formé, qui ne fe découvre que par la Foi; ce monde, dis-je, a un amas de beautés qui nous mene à Dieu, & qui nous le fait voir comme l'Auteur de. toutes fes créatures, & comme le centre unique de leur repos. La Foi nous fait juger éxactement de tout, & fur des principes infaillibles. Elle nous fait connoître la malice du péché, & la vanité des créatures, la courte durée du tems, l'inftabilité de toutes chofes, la durée infinie de l'éternité. On pese tout au poids de Sanctuaire. On efti

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