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DARIUS. tua le double. Une troifiéme fois, quatre mille demeurérent fur la place. Tout cela fe faifoit de concert, Chez les Babyloniens on ne parloit que de Zopyre: c'étoit à qui l'exalteroit le plus, & les termes manquoient pour exprimer le cas qu'on en faifoit, & le bonheur qu'on avoit de pofféder un fi grand homme. Il fut déclaré Généraliffime des troupes, & on lui confia la garde des murailles. Darius aiant fait approcher fon armée dans le tems & vers les portes dont on étoit convenu, il les lui ouvrit, & le rendit ainfi maître d'une ville qu'il n'auroit jamais pu prendre ni par affaut, ni par famine.

Quelque puiffant que fût ce Prince, il fe trouva hors d'état de pouvoir récompenfer dignement un tel bienfait, & il répétoit fouvent qu'il auroit facrifié de bon cœur cent Babylones s'il les avoit, pour épargner à Zopyre le cruel traitement qu'il s'étoit fait luimême. Il lui laiffa pendant fa vie le revenu entier de cette ville opulente dont lui-feul l'avoit rendu maître, & le combla de tous les honneurs qu'un Roi peut accorder à un fujet. Mégabyze, qui commanda l'armée des

Perfes en Egypte contre les Athé- DARIUS. niens, étoit fon fils; & Zopyre, qui paffa chez les Athéniens en qualité de transfuge, fon petit fils.

Dès que Darius fe vit en poffeffion de Babylone,il fit enlever les cent portes, & abbattre les murailles de cette fuperbe ville, pour la mettre hors d'état de pouvoir encore fe révolter dans la fuite. Il pouvoit, ufant des droits de vainqueur, exterminer tous les citoiens. Il fe contenta d'en faire empaler trois mille de ceux qui avoient eu le plus de part à la revolte, & pardonna à tout le refte. Et pour empécher que la ville ne fût bientôt fans habitans, il y envoia de toutes les provinces de l'Empire cinquante mille femmes, pour remplacer celles dont ils s'étoient fi cruellement défaits au commencement du fiége. Voila quel fut le fort de Babylone, & la maniére dont Dieu vengea fur cette ville impie le cruel traitement qu'elle avoit fait aux Juifs, en attaquant fans raifon un peuple libre; en détruifant fon gouvernement, fes loix, fon culte; en l'arrachant à sa patrie pour le tranfporter dans un pays étranger; en le chargeant des

DARIUS, travaux les plus humilians de la fervitude, & emploiant tout fon pouvoir pour accabler un peuple malheureux, mais chéri de Dieu,& qui avoit l'honneur d'en porter le nom.

Herod. lib. 4.

cap. I.
Juftin. lib.z.
cap.5.

pag. 103.&c.

§. III. Darius fe prépare à marcher contre les Scythes. Digreffion fur les mœurs de ce peuple.

APRE'S la réduction de Babylone, Darius s'appliqua à faire de grands préparatifs de guerre contre les Scythes, qui habitoient cette étendue de pays qui eft entre le Danube & le Tanaïs. Le prétexte de cette guerre * 11 en ef étoit de punir ces peuples de l'inva parlé Tom. 1. fion que leurs ancêtres avoient faite autrefois dans l'Afie: prétexte également frivole & ridicule, qui réveilloit une vieille querelle, paffée il y avoit environ fix vingts ans. Pendant 28 ans. cette irruption, dont la durée fut affez longue, les femmes dés Scythes avoient époufé leurs efclaves. Quand leurs maîtres voulurent revenir dans leur pays, ces efclaves allérent au devant d'eux avec de nombreuses troupes pour leur en difputer l'entrée, & il fe donna quelques batailles où l'avantage fut à peu près égal de part

& d'autre. Les Scythes, faifant ré- Darius. flexion que c'étoit faire trop d'honneur à leurs efclaves que de les traiter comme des foldats, marchérent contre eux le fouet à la main pour les faire reffouvenir de leur condition. En effet, ils ne purent foutenir cette vûe, & prirent tous la fuite.

J'IMITER AI ici Hérodote, qui prend occafion de cette guerre pour décrire ce qui regarde les Scythes: mais j'abrégerai de beaucoup ce qu'il en dit.

Digreffion fur les Scythes.

IL Y AVOIT anciennement des Scythes en Europe & en Afie, fitués pour la plupart vers le feptentrion. Il s'agit ici principalement des premiers, c'est-à-dire de ceux d'Europe.

Les hiftoriens, dans les relations qu'ils nous ont laiffées des mœurs & du caractère des Scythes, en difent des chofes tout-à-fait oppofées, & qui femblent abfolument fe contredire. D'un côté ils les repréfentent comme les peuples du monde les plus juftes & les plus modérés: de l'autre ils en font une nation féroce & barbare, qui porte la cruauté à des excès

DARIU S.qui font horreur à la nature. Cette contrariété eft une preuve évidente qu'il faut appliquer des traits fi différens à differens peuples répandus dans ces contrées fi étendues & fi vaftes; &, quoiqu'ils foient tous compris fous un même nom, ne les pas confondre fous une même idée. Des Auteurs cités par Strabon parlent des Scythes qui habitoient fur les bords du Pont Euxin, lefquels égorgeoient tous les étrangers qui arrivoient chez eux, fe nourriffoient de leur chair, & après avoir fait deffécher leurs cranes s'en fervoient.comme de pots & de vafes pour boire. Herod. lib. 4. Hérodote, en décrivant les facrifices

Strab. lib. 7. pag.298.

cap. 62.

que les Scythes offroient au dieu Mars, dit qu'ils lui immoloient des victimes humaines. Il raporte une coutume affez bizarre de faire les traités, ufitée parmi ces peuples. Bid.sap. 70. Ils verfoient du vin dans un grand vafe de terre, & les deux parties contra&tantes, après s'être découpé les bras avec un couteau, y faifoient couler de leur fang, y teignoient leurs armes,

* Cette coutume fubfifoit encore parmi les Ibéricus, peuple Scythe d'ori- |

gine, du tems de Tacite, gui en fait mention, Ann. lib. 12. C. 47.

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