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l'homme meilleur & plus eftimable. DARIUS. Ajoutez à ces heureufes difpofitions la connoiffance & l'amour du vrai Dieu & du Médiateur, fans quoi elles leur étoient inutiles, ils deviennent un peuple parfait.

En comparant les mœurs des Scythes avec celles du fiécle préfent, on est tenté de croire qu'un fi beau portraiteft flaté, & que Justin, auffi bien qu'Horace, leur prête des vertus qu'ils n'avoient point. Toute l'antiquité leur rend le même témoignage, & Homére, dont le fuffrage doit être d'un grand poids, les appelle les plus juftes des hommes.

Mais, (qui le croiroit?) le luxe, qui fembleroit ne pouvoir fubfifter' que dans un pays agréable & délicieux, pénétra dans cette région âpre & inculte ; & forçant les barriéres que lui avoit oppofé jufques-là un ufage conftant de plufieurs fiécles, fondé dans la nature du climat & dans le génie des habitans, il vint à bout enfin de corrompre auffi les mœurs des Scythes, & de les égaler en ce point aux autres peuples dont il s'étoit rendu maître. C'eft Strabon qui nous ap- Strab. lib.7. prend cette particularité très-digne Pag. 301.

DARIUS.de remarque: il vivoit du tems d'Augufte & de Tibére. Après avoir beaucoup loué la fimplicité, la frugalité, l'innocence des anciens Scythes, & leur extrême éloignement de toute fourberie, & même de toute diffimu

lation; il avoue que le commerce qu'ils avoient eu dans les derniers. tems avec les autres peuples avoit fubftitué à ces vertus des vices tout contraires. Il fembleroit, dit-il, que l'effet naturel d'un tel commerce avec des nations polies & civilifées, n'auroit dû être que de les humanifer & de les apprivoifer, en leur faifant perdre cet air fauvage & farouche qu'ils avoient: & cependant il causa la ruine entiére de leurs mœurs, & les Athen. lib. transforma en d'autres hommes. C'est 12. pag. 524. fans doute par raport à ce changement qu'Athénée dit que les Scythes fe livrérent à la volupté & aux délices, en même tems qu'ils fe livrérent à l'amour du gain & des richeffes.

Strabon, en faisant la remarque que je viens de raporter, ne diffimule pas que c'est aux Romains & aux. Grecs que les Scythes dûrent ce funefte changement. Notre exemple dit-il, a perverti prefque tous les peu

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ples de la terre, en y portant avec le DARIUS: luxe l'amour des plaifirs & des délices, la mauvaise foi, & mille fortes de fourberies honteufes pour amaffer. de l'argent. C'est une trifte diftinction & un malheureux talent pour un peuple, que de devenir par fon habileté à inventer des modes & à rafiner fur tout ce qui nourrit & entretient le luxe, le corrupteur de tous fes voifins, & leur maître pour le déréglement & le vice.

Ce fut contre ces Scythes, mais encore entiers & dans leur plus grande vigueur, que Darius tourna fes armes. C'est ce que je dois maintenant expofer.

§. IV. Expédition de Darius contre les

Scythes.

4. cap.83-96,

J'AI DEJA fait obferver que le pré- Herod. lib. texte dont fe fervit Darius pour entreprendre la guerre contre les Scythes, étoit l'irruption qu'ils avoient faite anciennement dans l'Afie: mais il n'avoit d'autre but réellement que de fatisfaire fon ambition, & d'étendre fes conquêtes.

Son frere Artabane, pour qui il avoit un grand refpe&t, & qui de fon

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DARIUS. Côté n'avoit pas moins de zéle pour les véritables intérêts du Roi, fe crut obligé dans cette occafion de lui découvrir les fentimens avec toute la liberté que demandoit l'importance de l'affaire. » Grand Prince, lui dit-il, » ceux qui forment quelque grande entreprise, doivent confidérer avec » foin fielle fera utile ou préjudicia» ble à l'Etat, fi l'exécution en fera » aisée ou difficile, fi elle pourra con» tribuer ou nuire à leur gloire, enfin » fi elle eft conforme ou contraire » aux régles de la justice. Je ne voi point, Seigneur, quand même vous » feriez affuré du fuccès, quel avan» tage vous pouvez attendre de la » guerre que vous entreprenez contre » les Scythes. Ce font des peuples féparés de votre empire par de longs efpaces de terre & de mer, qui ha» bitent de vaftes deferts, qui font » fans villes, fans maifons, fans éta» bliffemens, fans richeffes. Qu'y a-t-il » à gagner pour vos troupes dans une » telle expédition, ou plutôt que n'y

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a Omnes qui magna- | fum, aut promptum effe. rum rerum confilia fufci- &u aut certe non arpiunt, æftimare debent duum fit. Tacit. Hift. lib. quod inchoatur 2. cap. 76. reip. utile, ipfis glorio

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a-t-il point à perdre? Accoutumés « DARIUS. comme ils font à paffer d'une con- «< trée dans une autre, s'ils s'avisent «< de prendre la fuite devant vous, « non par crainte ou par lâcheté, car u ils font très courageux & très aguer- «< ris, mais dans le deffein de haraffer « & de ruiner votre armée par de « continuelles & de pénibles courfes, « que deviendrons-nous dans un pays « inculte, ftérile, & dénué de tout, « où nous ne trouverons ni fourages pour nos chevaux, ni nourriture «< pour nos foldats? Je crains, Sei- « gneur, qu'une fauffe idée de gloire, & des confeils flateurs, ne vous « précipitent dans une guerre qui pourra tourner à la honte de la na- «‹ tion. Vous jouiffez d'une paix tran- « quille au milieu de vos peuples, dont vous faites l'admiration & le « bonheur. Vous favez que les dieux « ne vous ont placé fur le trône que « pour être le coadjuteur, ou plutôt « le miniftre de leur bonté encore «< plus que de leur puiffance. Vous « vous piquez d'être le protecteur, « le tuteur, le pere de vos fujets; & « vous nous répétez fouvent, parce « que vous le penfez ainfi, que vous «

Tome III.

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