페이지 이미지
PDF
ePub

droient pas fe confeffer que Dieu a promis le pardon au pécheur qui revient à lui: que Jefus-Chrift a dit Saint Pierre de pardonner, non pas jufqu'à fept fois, mais jufqu'à foixante fois fept fois, cela veut dire toujours : qu'ils peuvent mourir durant le tems auquel on leur diffère l'absolution, & qu'ainfi ce délai feroit caufe de leur damnation. Ce font les raifons que la fauffe prudence a coutume de fuggérer à l'efprit humain, pour le flatter dans fes vi ces, & pour l'empêcher de s'amender jamais.

Ne faites pas ainfi, cher THEOTIME, & fçachez qu'il y a une grande différence entre les fentimens de la prudence que Saint Paul appelle de la chair, & ceux de la prudence vraiment chrétienne qui vient de Dieu, & qui a la charité pour fa regle. Celle-ci fait chercher aux Pénitens les moyens de fortir du péché, & de l'esclavage d'une habitude vicieufe, qui les mene à la damnation ; & celle là en leur faifant fuir & appréhender tous les moyens qui les peuvent retirer du péché, les porte à en chercher d'autres qui leur faffent trouver le falut fans s'amender jamais. Ils croyent qu'il leur fuffit de fe confeffer de tems en tems, & de fe laver de leurs péchés à mesure qu'ils les ont commis, faifant ainfi de leur vie une fuite continuelle de confeffions & de rechutes, à la fin de laquelle ils croyent trouver le Paradis, comme s'ils avoient bien travaillé pour le ga

gner.

pas

C'est une erreur, & une fauffe perfuafion qui eft très commune parmi les Chrétiens, qui les entretient dans le vice & dans une impénitence perpétuelle. Elle vient en partie de l'ignorance des Pénitens, & du peu de foin qu'ils ont de leur falut; mais on peut dire auffi qu'elle vient de la faute des Confeffeurs, lorfqu'ils ne font affez inftruits ou affez perfuadés de la vérité que nous avons traitée cideffus, ni des grandes obligations de leur redoutable ministère, qui leur défend d'adminiftrer ce Sacrement à une perfonne indigne, & qui les oblige à prendre foin du falut de leurs Pénitens. Ces Confeffeurs ne font point de difficulté de les abfoudre de leurs péchés autant de fois qu'ils s'en confeffent, après un grand nombre de rechutes & après plufieurs confeffions qu'ils en ont faites inutilement fans avoir reçu la rémiffion de leurs péchés, & que les Pénitens mêmes reconnoiffent fouvent n'avoir pas été bonnes, quand ils font réflexion fur le peu de réfolution qu'ils ont eu de s'amender.

[ocr errors]

Ces Confeffeurs appuyent leur négligence ou leur facilité fur les mêmes raifons que les Pénitens ont apportées ci- deffus : mais fi ces raifons font fauffes, il paroîtra combien les uns & les autres font mal fondés. C'est ce que nous ferons voir dans le Chapitre fuivant.

L

CHAPITRE XI I.

Réponses aux Objections.

A première raifon fur laquelle on appuye la facilité d'abfoudre ceux qui font dans des péchés d'habitude, autant de fois qu'ils s'en confeffent, eft prife de cette maxime que l'on avance comme indubitable, qui eft que le Confeffeur doit croire fon Pénitent quand il dit qu'il a regret d'avoir offenfé Dieu, & qu'il a volonté de s'amender. On fonde cette obligation du Confeffeur fur ce que le Pénitent étant lui-même fon accufateur dans la confeffion comme le Confeffeur le doit croire quand il s'accufe de fes péchés, il doit croire auffi quand il dit qu'il en a en a du regret, & qu'il veut s'en amender, n'y ayant pas de raifon de le croire moins dans fon regret que dans fon accufation. Ils ajoutent que c'eft une maxime reçûe en Théologie, que le Pénitent doit être cru en tout ce qu'il dit, tant pour lui que con

[ocr errors]

tre lui.

Comme cette maxime eft le grand fondement fur lequel on appuye l'opinion que nous combattons ici, il eft à propos d'y répondre exactement pour faire voir l'abus que l'on en fait.

Et premièrement je dis que fi cette maxime eft véritable, il s'enfuivra que le ministère de

la confeffion n'eft pas fi difficile que les plus fages le font ordinairement. Car fi un Confeffeur doit croire un Pénitent fur fa fimple parole quand il dit qu'il a regret de fes péchés, il n'a plus rien à faire qu'à lui impofer une pénitence & lui donner l'abfolution, ce qui eft une chose bien facile, dont les plus ignorans Confeffeurs font auffi capables que les plus habiles. A quoi donc eft néceffaire cette grande prudence que l'on demande ordinairement dans les Confeffeurs? Car encore qu'il faille de la difcrétion pour juger de la qualité des péchés du Pénitent, pour l'interroger autant qu'il eft néceffaire & non plus, & pour lui impofer une pénitence convenable; il eft certain néanmoins que la plus grande difficulté eft de bien connoître l'état préfent du Pénitent, pour juger s'il eft fuffisamment difpofé à recevoir l'abfolution ; & c'est à cela qu'il eft befoin d'une grande prudence, & à quoi les plus habiles fe trouvent souvent bien empêchés.

Secondement, c'eft une chofe furprenante de voir que dans l'affaire du falut qui eft fi importante, les Confeffeurs & les Pénitens fe veuillent fervir d'une maxime que l'on ne fuit pas ordinairement dans aucune affaire temporelle. On fe mocqueroit d'un homme qui voudroit fe fier à la parole d'un autre qui auroit manqué fouvent à celle qu'il lui a donnée, & qui fe feroit fait une habitude de ne tenir

par

point ce qu'il promet. Il n'y a pas un créancier qui veuille croire un débiteur après plufieurs promeffes qu'il lui a faites de le payer, fans l'avoir jamais exécuté. Il n'y a point d'homme qui ayant pardonné à un autre plufieurs fois les offenfes qu'il lui auroit faites, ne tienne pour fufpectes les foumiffions qu'il lui fait & le regret qu'il lui témoigne de l'avoir of fenfé. Et quoiqu'il foit fort difpofé à lui donner, la prudence néanmoins & même la charité l'obligent à prendre des précautions néceffaires pour être affuré que l'autre ne le trompe point, & pour l'empêcher d'y retomber à l'avenir. C'eft ainfi qu'on fe conduit dans les affaires temporelles : & dans la confeffion où il s'agit du falut, on veut que le Confeffeur se fie à la parole du Pénitent après qu'il y a manqué plufieurs fois. On prend moins d'affurance d'une parole qu'il donne à Dien même de ne le plus offenfer, que l'on en prendroit de celle qu'un homme donneroit à un autre pour la moindre affaire temporelle ; & ainfi on ne fait point de difficulté de hazarder le falut du Pénitent fur fa propre parole, lorfqu'on pour roit l'affurer en prenant les précautions néceffaires, & des moyens plus certains pour le faire rentrer dans la grace de Dieu & fe corriger de fes vices.

Troifièmement, pour examiner à fond la chofe dont il s'agit, je réponds que cette maxime générale qui dit que le Confeffeur doit

Κτ

« 이전계속 »