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On demandoit à un Curé comment s'appelloit le Saint, patron de fon Eglife. Il répondit: Je vous affure que je ne le connois que de vûe.

M. Fournier entrant dans leChœur de Notre-Dame de Paris, & voiant M. le Duc de Roquelaure dans fa place avec quelques autres, les pria d'en fortir & de l'excufer en même tems fur ce qu'il étoit obligé de prendre fa place. M. de Roquelaure s'ôta de fa place fans faire aucune difficulté, & après avoir fait cinq ou fix pas, lorfqu'il étoit prêt de defcendre dans le Choeur, il fe tourna vers celui qui l'avoit déplacé, & le faluant d'un grand fang froid, il lui dit : Monfieur, Monfieur, nous nous tenons pour bien chaffez.

¶ M. l'Abbé Gaudin dit, qu'il comprend affez comment un homme joue la moitié de fon bien mais qu'il ne comprend pas comment il joue l'autre.

M. du Périer m'a fait voir le livre des Penfees ingenieufes du P. Bouhours, c'eft un excellent recueil des plus belles Penfées des anciens & de nos modernes, aufquelles il a donné un tour très-agréable. M. du Périer eft dans une grande colere de n'être pas parmi un fi grand nombre a'illuftres que ce Pere a cité. L

s'en eft plaint lui-même au P. Bouhours en le rencontrant dans les rues; le P. Bouhours m'en a parlé. Je tâcherai de les raccommoder.

Peu de tems après l'impreffion des Penfees ingénieufes, il parut une lettre en profe & en vers adreflée à l'Abbé de la Chambre, où ce recueil étoit extrémement loué. Bien des gens crurent qu'elle étoit du P. Bouhours lui-même, contre qui on fit cette Epigrain me affez froide.

Dans ce beau recueil de penfées
Que votre main a ramaffées,
Vous en ufez modeftement.

Vous citez les livres des autres
Sans avoir rien tiré des vôtres.
Que vous avez de jugement!

Le Seigneur Dom Auguftin Nico las, Maître des Requêtes au Parlement de Besançon, mort l'an 1695, faifoit des vers en quatre langues, en Latin, en François, en Efpagnol, & en Italien, qui feroient admirablement bons, s'ils l'étoient autant qu'il le croioit. La vérité eft pourtant que les Latins font fort peu de chose , que les François valent encore moins, & qu'il n'y a que

les Efpagnols & les Italiens qui méritent d'être lus. Encore ne faut-il pas douter que les naturels du paiïs n'y trouvaffent peutêtre bien des défauts, que nous autres François n'y fentons pas. Une chofe qui déplaît extrémement dans les ouvrages de cet Auteur, c'eft la demangeaifon perpetuelle qu'il a de s'y louer. A l'entendre il peut damer le pion aux meilleurs Ecrivains en leur langue maternelle: jufques là qu'il a eu la préfomption d'oppofer une piéce Italienne de fa façon à une de Petrarque fur le même fujet, les aiant fait imprimer toutes deux enfemble, afin que le lecteur en pût juger. Ce qu'il y a de plaifant c'est qu'après cette infulte faite à la mémoire de Pétrarque, il s'eft avifé de faire un Sonnet François à fa louange comme par une espece de réparation d'honneur. On a pris occafion là-deffus de lui faire ce rémerciment au nom de Pétrarque.

Quel eft ce zele qui t'engage
A me louer en ton langage?

Tu veux donc m'honorer de toutes les façonsą
Ah!c'étoit bien affez,pour relever mon luftre,
Que d'avoir entrepris par une audace illuftre
D'égaler en ma langue une de mes chansons

Voici l'Epitaphe qu'on lui a faite.

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Ci git Auguftin Nicolas
Auteur de la premiére claffe,
Réformateur de Vaugelas,
Rival de Virgile, & d'Horace.
Caftillan plus que Garcilas,
Toscan plus que n'étoit Bocace,
Digne favori de Pallas,

Et grand Dragoman du Parnaffe
Inftruit des affaires d'Etat,
Au Confeil & dans le Sénat,
Il méritoit le rang fuprême.
C'étoit un homme enfin ... Hola,
De qui favez-vous tout cela z
De qui je le fais? De lui-même.

On y peut joindre les vers fuivans.

Ανῶν Νικόλεων ε' μοι θράσος· οἶδε γὰρ οἷον

Αἰνεῖν Νικόλεων οἷος ο Νικόλεως.
Dicere Nicoleon non audeo: noverat unum
Unus Nicoleos dicere Nicoleon.

Pontus de Tyard Evêque de Châlon étant à la cérémonie d'un batême en qualité de Parrin, le Curé faifoit difficulté de nommer l'enfant Pontus fur ce qu'il ne connoiffoit point de Saint

de ce nom-là. Comment, lui dit l'Evêque, M. le Curé, vous ne fongez donc pas au Saint dont l'Eglife fait mention dans l'Hymne Quem terra, pontus, athera? A ces mots le bon Curé qui ne s'étoit jamais fort chargé de Latin, Monfeigneur, lui dit-il, je vous demande pardon, il eft vrai que je n'y fongeois pas. Et là deffus batiza l'enfant fous ce

nom.

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Le livre intitulé, L'Hiftoire, & plaifante Chronique du Petit Jean de Saintré eft recherché des curieux, qui ont la folie d'en donner jufqu'à 30 écus de l'exemplaire. C'est un petit in 4°, épais d'un doigt au plus, imprimé à deux colonnes le 20 Juin 1523. chez Philippe le Noir, en lettre Gothique. L'ouvra ge eft d'Antoine de la Salle Secretaire de Jean d'Anjou, Duc de Calabre & de Lorraine, fils de René dit le Bon, Roi de Naples, de Siçile, Comte de Provence, &c. Il a été écrit avec beaucoup de naïveté en 1459, quelque cent ans après les chofes dont il y eft parle. Le plus joli endroit eft celui du 58e chapitre, où Saintré, au fujet de l'honneur que le Roi Jean lui avoit fait de lui donner le commandement de 500, lances tient à quelques Seigneurs le difcours

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