On veut qu'un chien soit tel que quand il vient de naître; Pour empêcher l'Amour de croître. Vous caressez Marquès, parce qu'il est petit ; S'il devenoit trop grand, il n'auroit rien d'aimable. S'il devient trop grand, il accable. Mais j'entends que Marquès se plaint du mauvais tour Ah! vous me ruinez, vous gâtez tout, Poëte, L'Amour n'est pas trop bien auprès de ma maîtresse ; Et c'est assez pour perdre sa tendresse, En mon état de chien, j'ai l'ame assez contente Et si, pour ressembler aux dieux, A votre avis, m'en trouverai-je mieux ? Non, non, c'est trop d'honneur, je vous en remercie. Ah! mon pauvre Marquès, ce seroit grande pitié, Pour une cause si légère. Non, cela ne se peut. Fais valoir tes appas : Et loin qu'elle te soit cruelle, L'INDIFFÉRENCE A IRIS. 1678. SANS doute, belle Iris, je vous ai bien servie; Cet heureux temps n'est plus, ce temps si favorable Où vous ne saviez pas que vous fussiez aimable, Vous souffrez maintenant des gens qui vous le disent: Vous voyez chaque jour votre mérite croître ; A quoi tant de mérite sert. Vous voudrez voir si la tendresse Ne le sauroit pas mieux mettre en œuvre que moi ; Cultiver les talens d'une jeune personne, Ce n'est pas un métier à quoi je sois trop bonne ; Dirai-je tout ce que je pense? Il dit que je ne suis propre qu'à vous gâter, Et si vous le voulez écouter davantage, Aussi-bien, si son amour dure, (Et franchement j'en ai grand'peur ). La victoire pour moi n'est pas chose trop sûre; Tant de soins, de respects, sont de mauvais augure, Et m'annoncent toujours qu'il faut sortir d'un cœur. Encor si j'avois espérance Que de votre froideur on dût se rebuter Je ne voudrois pas vous quitter. 1 Mais Tircis n'est pas si-tôt las: Il a de votre cœur entrepris la conquête. Jusqu'à ce qu'à son point il vous ait amenée, Qu'il faut qu'on l'aime, ou qu'on dise pourquoi. Ainsi donc, j'aime mieux céder de bonne grace, Votre cœur est de plus une espèce de place, Je prévois qu'il faudroit le défendre sans cesse, Tout le monde l'attaquera. Il est plus à propos qu'enfin je vous le laisse, J'en veux chercher quelqu'autre où je demeure en paix. RÉPONSE D'IRIS A L'INDIFFÉRENCE. 1678. Quoi! vous m'abandonnez, hélas ! ma chere hotesse A quoi bon de mon cœur avoir pris tant de soin, Pour fuir, quand on en veut surprendre la tendresse ? Mais quel sujet encor vous force à me quitter? Montrez-lui ce que c'est que cette indifférence Plus l'ennemi vous paroît redoutable, De plus, quand vous m'aurez laissée, De n'avoir plus ni vous ni mon amant. Donnez-moi donc le temps d'éprouver sa constance, Avant qu'à vous quitter je puisse consentir ; Après cela, si vous voulez partir, Il faudra prendre patience. Souvent les amans sont trompeurs, Et malgré tous leurs soins et toutes leurs douceurs, Car dès qu'ils sont les maîtres de nos cœurs |