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MAZAEL.

Quoi ! vous avez enfin gagné cette victoire ?
Quoi! malgré fon amour, Herode a pû vous croire
Il vous la facrifie il prend de vous des loix !

SALOME.

Je puis encor fur lui bien moins que tu ne crois,
Pour arracher de lui cette lente vengeance,
Il m'a falu choisir le temps de fon absence.
Tant qu'Herode en ces lieux demeuroit exposé,
Aux charmes dangereux qui l'ont tirannisé :
Mazael, tu m'as vûë avec inquietude,
Traîner de mon deftin la trifte incertitude.
Quand par mille détours affûrant mes fuccès,
De fon cœur foupçonneux j'avois trouvé l'accès: •
Quand je croïois fon ame à moi seule renduë;
Il voïoit Mariamne, & j'étois confonduë.

Un coup d'œil renverfoit ma brigue & mes deffeins.
La Reine a vû cent fois mon fort entre ses mains;
Et fi fa politique avoit avec adreffe

D'un Epoux amoureux menagé la tendreffe ;

Cet ordre, cet Arrêt prononcé par fon Roi,
Ce coup que je lui porte auroit tombé fur moi.
Mais fon farouche orgueil a fervi ma vengeance:
J'ai fçû mettre à profit fa fatale imprudence.
Elle a voulu fe perdre, & je n'ai fait enfin

Que lui lancer les traits qu'a préparez fa main.

Tu te fouviens affez de ce temps plein d'allarmes, Lorsqu'un bruit fi funefte à l'efpoir de nos armes, Apprit à l'Orient, étonné de fon fort,

Qu'Augufte étoit vainqueur, & qu'Antoine étoit mort.
Tufçais comme à ce bruit nos Peuples fe troublerent.
De l'Orient vaincu les Monarques tremblerent.
Mon Frere enveloppé dans ce commun malheur,
Crut perdre fa couronne avec fon Protecteur.
Il fallut, fans s'armer d'une inutile audace,
Au Vainqueur de la Terre aller demander grace.
Rappelle en ton esprit ce jour infortuné ;
Songe à quel desespoir Herode abandonné,
Vit son Epouse altiere abhorrant ses approches,
Déteftant fes adieux, l'accablant de reproches,
Redemander encor en ce moment cruel,

Et le fang de fon Frere, & le fang paternel.

Herode auprès de moi vint déplorer fa peine:
Je faifis cet inftant précieux à ma haine :
Dans fon cœur déchiré je repris mon pouvoir
J'enflamai fon courroux, j'aigris fon desespoir,
J'empoifonnai le trait dont il sentoit l'atteinte;
Tu le vis plein de trouble & d'horreur & de crainte,
Jurer d'exterminer les reftes dangereux

D'un Sang toûjours trop cher aux perfides Hébreux;
Et dès ce même inftant fa facile colere,

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Déshérita les Fils, & condamna la Mere.

Mais fa fureur, encor flatoit peu mes fouhaits. L'amour qui la caufoit en repouffoit les traits De ce fatal objet telle étoit la puiffance; Un regard de l'ingrate arrêtoit fa vengeance. Je preffai fon départ, il partit. Et depuis Mes lettres chaque jour ont nourri fes ennuis. Ne voïant plus la Reine, il vit mieux fon outrage; Il eût honte en fecret de fon рец de. courage: De moment en moment fes yeux Le font ouverts J'ai levé le bandeau qui les avoit couverts: Zarès étudiant le moment favorable,

A peint à fon efprit cette Reine implacable,

Son crédit, fes amis, ces Juifs féditieux,
Du fang Afmonéen partisans factieux.
J'ai fait plus, j'ai moi-mêine armé fa jalousie.
Il a craint pour fa gloire, il a craint pour fa vie.
Tu fçais que dès long-temps en butte aux trahisons
Son cœur de toutes parts eft ouvert aux foupçons.
Il croît ce qu'il redoute, & dans fa défiance
Il confond quelquefois le crime & l'innocence,
Enfin j'ai fçû fixer fon courroux incertain
Il a figné l'Arrêt, & j'ai conduit sa main.

MAZAEL.

Il n'en faut point douter, ce coup eft néceffaire,
Mais avez-vous prévû fi ce Prêteur auftere,
Qui, fous les loix d'Augufte, a remis cet Etat,
Verroit d'un œil tranquille un pareil attentat a
Varus, vous le fçavez, eft ici vorre Maître.

En vain le peuple Hébreu prompt à vous reconnoître,
Tremble encor fous le poids de ce Trône ébranlé :
Votre pouvoir n'eft rien fi Rome n'a parlé.

Avant qu'en ce Palais, des mains de Varus même,
Votre Frete ait repris l'Autorité fuprême

Il ne peut fans bleffer l'orgueil du nom Romain,
Dans les Etats encor agir en Souverain.
Varus fouffrira-t'il que l'on ofe à fa vûë,
Immoler une Reine en fa garde reçûë ?

Je connois les Romains; leur efprit irrité
Vengera le mépris de leur autorité.

Vous allez fur Herode attirer la tempête;

Dans leurs fuperbes mains, la foudre eft toûjours prête. Ces Vainqueurs foupçonneux font jaloux de leurs droits, Et fur-tout leur orgueil aime à punir les Rois.

SALOM E.

Non, non, l'heureux Herode à Cefar a fçû plaire;
Varus en cft inftruit, Varus le confidere.
Croïez-moi, ce Romain voudra le ménager;
Mais quoiqu'il faffe enfin, fongeons à nous venger.
Je touche à ma grandeur, & je crains ma disgrace.
Demain, dès aujourd'hui, tout peut changer de face.
Qui fçait même, qui fçait, fi paffé ce moment,
Je pourrai fatisfaire à mon reffentiment!

Qui vous a répondu qu'Herode en fa colere,

D'un efprit fi conftant jufqu'au bout perfevere 2

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