Que ma Mufe ne peut fuffire A vous dire Tout ce que reflent mon cœur. J'ai placé votre AUGUSTE NOM: Elle craint que ce Livre ait le même avantage que Didon. Que Circé, que Elle s'agite, elle murmure, Et je l'ai vûč accourir ce matin, Pour m'obliger à changer de deffein. Elle avoit d'un Poëte emprunté la figure; C'étoit un bon déguisement, Un Poëte & l'Envie ont peu de difference; On y voit tant de reffemblance, Qu'on peut s'y tromper aisément. Dans leur jufte raport comment la reconnoître ? Seroit-ce à fon air fec, rêveur, pâle, affamé? A fon regard jaloux, de colére animé ? A fes affreufes dents qu'elle me fit paroître, Qu'on ne peut voir fans mal de cœur, Et dont la rouille & la longueur Font voir que peu fouvent elle trouve à repaître ? A fes grands doigts crochus : à fes ongles fi courts, Qu'il eft aifé de voir qu'elle ronge toujours? A fes difcours mordane, critiques? Non, non, ces qualitez font des plus Poëti ques: Elle me dit d'un air doux, concerté, Dans votre fort je m'intereffe : Je sçai que vous voulez prendre la liberté De dédier un Livre à l'AUGUSTE PRINCESSE Dont vôtre cœur eft enchanté: Connoiflez-vous fon goût & fa delle telle ? Finiffez, m'écriai-je, un difcours qui me bleffe: Je connois mieux que vous fon efprit, fa bonté ; J'en reçois chaque jour quelque marque nouvelle ; Et dans mes Ouvrages divers, Cette GRANDE PRINCESSE, en faveur de mon zéle, A toujours fait grace à mes Vers. Mais pour me conseiller, chez moi qui vous apelle? Ne vous en avifez plus: Tous vos raisonnemens vous feroient fuper Alus; Et vous devez compter que mon Ou vrage Aura de ma PRINCESSE un glorieux fuffrage. L'Envie à grands pas s'en alla, Ou pour mieux dire, elle vola, Pour me perdre plûtôt de vûë, Et pour tuë. ceffer d'entendre un discours qui la Avant de rentrer aux Enfers, Sans doute que cette Megére Voudra jetter fon poifon fur mes Vers: Mais quel mal pourroit-il leur faire? D'une GRANDE PRINCESSE ils ont le ferm apui; Des jaloux la cabale entiere Ne fauroit me caufer d'ennui. Va, mon Livre, le tems preffe, Va remplir tes heureux destins : De mon AUGUSTE PRINCESSE ; Si tu peux l'entretenir Tu rendras ta gloire immortelle, De mes profonds refpects, de l'ardeur de mon zéle. ǎ iiij APROBATION DU CENSEUR ROYAL. J'Ai lû par ordre de Monfeigneur le Chancelier, un Manufcrit qui a pour titre, Poëftes diverfes de Madame de Sainctonge, tome fecond, & j'ai crû que le Public ne feroit pas moins d'accueil à ce volume qu'il en a fait au premier. A Paris ce 23 Fevrier 1713. Signé, BURETTE. 1 PRIVILEGE DU ROL LOUIS par la grace de Dieu, Roi de France & de Navarre: A nos amez & feaux Confeillers les Gens tenant nos Cours de Parlement, Maîtres des Requêtes ordinaires de notre Hôtel, Grand Confeil, Prevôt de Paris, Baillis, Sénéchaux, leurs Lieutenants Civils, & autres nos Jufticiers qu'il apartiendra, SALUT.. Notre bien amé le Sieur **** Nous ayant fait expofer qu'il défireroit faire imprimer & donner au public un Ouvrage intitulé, Poëfies diverfes de Madame de Saintonge, s'il Nous plaifoit lui accorder nos Lettres de Privilege fur ce néceffaires. Nous lui avons permis & permettons par ces Prefentes de faire imprimer ledit Livre en telle forme, marge, caractere, conjointement ou féparément, & autant de fois que bon lui femblera, & de le faire vendre & débiter par tout notre Royaume, pendant le tems de fix années confécutives, à compter du jour de la datte defdites Prefentes. Faifons défenfes à toutes perfonnes de quelque qualité & condition qu'elles foient, d'en introduire d'impreffion étrangere dans aucun lieu de notre obéiffance, & à tous Imprimeurs, Libraires & autres, d'imprimer, faire imprimer, vendre, faire vendre & t |