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Cette circonftance jointe aux E. PAchangemens qui s'étoient faits dans VILLON. les affaires de fon pere, lequel ne fe trouvoit plus en état de l'avancer dans des Charges, où l'on ne peut parvenir qu'avec des biens confiderables, le détermina à vendre fa Charge d'Avocat General, & de revenir à Paris pour y vivre dans un état de liberté & d'independance. Si le Public y perdit, Pavillon y gagna un loifir auquel il ne s'étoit pas attendu, & dont les charmes neanmoins ne lui étoient pas indifferens.

C'eft dans cet agréable loifir, que confervant toujours la gravité d'un Magiftrat, il s'étoit établi une forte de Tribunal, dont les meilleurs efprits reconnoiffoient l'empire: avec plaifir. Il voyoit beaucoup de monde; il étoit aimé & confideré de diverfes perfonnes diftinguées par leur naiffance & par leur merite, dont il avoit toute la confiance.

Si l'ambition avoit eu quelque place dans fon cœur, il n'auroit pas manqué d'occafions pour s'avancer;, & le commerce que la beauté de fon

E. PA- efprit & l'agrément de fa converfa VILLON. tion lui procuroient avec tout ce qu'il y avoit de plus fpirituel à la Ville & à la Cour, auroit pû lui fervir à regagner ce que la fortune lui avoit ôté. Mais foit par Philofophie,' foit par une jufte crainte des perils où les grands emplois expofent un homme fage, foit enfin par l'amour du repos, qu'il avoit commencé à goûter, il ne voulut plus entendre parler de Charges ni d'emplois.

Ainfi étant appellé dans la fuite pour travailler à l'éducation du Duc du Maine, auprès duquel il pou voit fe promettre une fortune éclatante, on ne put jamais le réfoudre à s'y engager, quelques facilités & quelques agrémens, qu'on pût lui offrir. Il s'en défendit d'une maniere fi modefte & fi raifonnable, que fes amis ne purent s'empêcher d'admirer la fageffe de fes raisons.

On lui avoit fouvent dit qu'une place dans l'Academie Françoife lui convenoit extrémement, furtout depuis qu'il n'étoit plus gueres occupé: mais fa modeftie le retenoit, & les follicitations qu'il croyoit necef

faires l'avoient toujours detourné E. PA d'y penfer. Cette Academie fe trou- VILLON. vant un jour balancée entre deux perfonnes, qui partageoient les voix, & formoient deux partis qu'on ne pouvoit accorder, il arriva à l'Abbé Tallemant de parler de M. Pavillon. Il ne l'eut pas plutôt nommé, qu'il fe fit un applaudiffement general; on abandonna les deux partis auxquels on avoit paru fi attaché, & tout fe réunit en un moment en faveur d'un merite qui parut fuperieur à tout autre.

Cette élection peu ufitée étonna tout le monde, & Pavillon en fur lui-même dans une furprise extraordinaire. Mais vaincu par la maniere honnête & obligeante dont s'étoit fait un tel choix, il fut très-fenfible à l'honneur qu'il recevoit, & fon remerciment fit éclater fa reconnoiffance. Il fut reçu le 17 Septembre 1691. à la place d'Ifaac de Benferade.

La goute commença bientôt après à le retenir dans fa maifon, & à l'attacher à fon fauteuil, d'une maniere peu douloureufe à la verité,

VILLON.

E. PA- mais qui lui ôtoit la liberté de marcher. Sa chambre devint alors le rendez-vous de plufieurs perfonnes illuftres par leur naiffance, leur favoir & leur merite. Comme fa tête étoit libre & faine, il fournissoit à la conversation, y décidoit en maître, mais fans fafte, & parloit fur toutes fortes de matieres avec une facilité admirable.

La mort de M. Racine arrivée en 1699. lui procura une place dans l'Academie des Infcriptions, où malgré fon abfence involontaire, il ne laiffa pas de donner de bons confeils fur differentes productions qui en font forties.

Il mourut le 10 Janvier 1705. âgé de 73 ans, ayant confervé jufqu'à fon dernier moment fon bon fens, fes amis, & fa réputation.

Le Roi l'avoit honoré d'une penfion long-temps auparavant.

Il étoit bien fait, de grande taille, & d'une mine avantageufe, qui impofoit par elle-même, & par un air de gravité bien entendu, qui luž étoit naturel.

Sa profe & fes vers ne laissent rien

E. PA

à defirer; foit louange, foit mora-
le, foit galanterie, foit badinage, VILLON.
tout y eft parfait dans fon genre, &
a toujours un caractere honnête &
plein de retenue.

Il ne parut de lui pendant fa vie, que fon difcours de reception à l'Academie Françoife, qui fe trouve dans les Recueils de cette Academie, & qui a été imprimé feparément in-4°. en 1691. fuivant la coutume; & quelques pieces de Poefie, qu'on voit parmi les Lettres du Comte de Buffy, & dans quelques Recueils. Ce n'eft qu'après fa mort qu'on a fongé à raffembler fes Oeu

vres.

Ils parurent pour la premiere fois à la Haye en 1715. in-8°. Cette édition eft fort imparfaite; de 59 pieces qu'elle contient, il y en a près de la moitié qui ne font point de M. Pavillon; d'ailleurs on y trouve des vers omis, eftropiés, ou ajoutés mal à propos. C'est ce qui engagea Henri du Sauzet, Libraire de la Haye, qui l'avoit donnée, d'en publier une nouvelle en 1720. à la Haye in-8°. Cette feconde renferme 76

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