ÆäÀÌÁö À̹ÌÁö
PDF
ePub

une perfection qui coûta des larmes à toute l'affemblée.

Enfin le troifieme jour on repréfenta l'Enfant gâté & les Dangers du monde; & le fuccès fut d'autant plus éclatant, qu'on crut remarquer l'impreffion particuliere que ces deux pieces avaient faite fur les jeunes Princeffes. L'Enfant gâté leur avait déja fait faire bien des réflexions falutaires; l'impreffion des Dangers du monde fut encore plus forte. Célefte crut fe reconaître trait pour trait dans la Vicomteffe, & Reinete craignait d'approcher beaucoup du caractere faible & mobile de la Marquife. Régentine s'applaudiffait de l'heureufe idée d'avoir pour la premiere fois mêlé fans inconvénient un but utile aux frivoles amusemens de la cour; & pour la premiere fois auffi la cour applau diffait avec tranfport à une idée heureufe de fa Souveraine, fans que la

flaterie ou la complaifance y entrât pour rien.

Ces comédies charmantes étaient l'ouvrage d'une dame de la cour, célebre par les grâces de fon efprit & de fes talens. Elle s'était fouftraite à la fociété dont elle avait fait le charme, pour confacrer fon temps à un but infiniment plus intéreffant & plus noble. Il était bien naturel qu'à la cour de Régentine il fe trouvât une femme d'un mérite fi diftingué; mais perfone ne pouvait concevoir, comment une Princeffe auffi éclairée ne lui avait pas confié l'éducation de fes filles.

Quand on dit que perfone ne pouvait le concevoir, on ne prétend pas infinuer que quelqu'un y ait pensé; mais, fuivant l'ufage du pays, tout le monde fit ou répéta cette remarque, lorfque la nouvele fe répandit qu'une Princeffe, dont une Fée bien

différente des nôtres s'était plu à former l'ame pure & célefte, allait enlever cette dame à la cour de Régentine & la charger de l'éducation de fes filles, qui pour rendre le contrafte encore plus frapant, étaient auffi jumelles. La réfignation de la Souveraine de l'île heureufe, en cette occafion, ne peut encore être expliquée que par la légéreté phyfique de l'athmosphere. On dit que Capricieuse eut à ce fujet un troisieme mouvement de joie fenfible.

Les fêtes tiraient à leur fin, & les deux vieilles, pour fignaler leur générofité & fur-tout leur fenfibilité à tout ce que Régentine avait fait pour elles, voulurent fe furpaffer ellesmêmes, en dotant les jeunes Princeffes d'une infinité de qualités rares qui ne leur coûtaient rien, & dont Penfemble, fi tout avait également pris, aurait pu faire, dans le même

caractere, une bigârure très - bizâre. Capricieuse fauva les Princeffes de cet écueil, fans le vouloir, par fes contre-charmes; & le plaifir de contrecarrer fes coufines ne lui permit pas de voir dans le moment que, fans y penfer, elle préfervait ces demoifelles du danger de devenir d'ennuyeufes commeres ou d'infupportables bégueules.

Les deux vieilles, après s'être ruinées en dons, fans bourfe délier fouhaiterent de voir les jeunes Princeffes, au plutôt, en pleine jouiffance de leurs bienfaits, & perfuaderent à Régentine qu'il fallait profiter de l'affluence des étrangers, pour choisir parmi eux des époux dignes de poffeder des Princeffes fi accomplies. Le premier Médecin, craignant peut-être que ces dames ne voulutfent revenir une feconde fois pour les fêtes du mariage, prétendit que ce projet était

la feule chofe fenfée qui eût jamais pallé par la tête des deux forcieres, & qu'il fallait faire les époufailles sur le champ fans autre cérémonie.

Dans toute cette foule d'étrangers il n'y avait cependant que trois fujets dans le cas d'afpirer à la main des Princeffes; c'était le Prince Trois Etoiles, le Prince Phénix, & le Prince Colibri. Pour les définir en trois mots, on peut dire que le premier était un Prince comme il faut le fecond, un Prince comme il n'y en a point; le troifieme, un Prince comme il faudrait qu'il n'y en eût point.

;

Le premier avait perdu fon pere en bas-âge, & fon grand-pere, qui fe nommait Pacifique, s'était fi parfaite, ment tranquilifé, qu'il avait laislé tomber fes états au pouvoir d'une branche collatérale, & fait par conféquent de fon petit-fils Trois Etoiles

« ÀÌÀü°è¼Ó »