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SEIZIEME

CONVERSATION:

EMILI Ε >

(rentrant avec fa mere, & pofant un paquet fur la table.)

Nous voici, maman

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heureuse

ment de retour, & nous & nos empletes en sûrété. Convenez que ces embaras de Paris font quelque chofe de terrible, ou, fi cela vous paraît trop fort, quelque chofe de bien incommode. On rifque à tout moment d'être acroché, éftropié, verfé, mis en pieces par une charete, ou d'écrafer ceux qui vont à pied. Cela mé donne des fouleurs, maman!... Si vous ne m'aviez pas dit qu'il faut avoir du courage, je vous affure que j'aurais bien peur de temps en temps.

Tome II.

K

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Moi auffi, fi la peur remédiait à quelque chofe. Mais fuppofé qu'il y eût réélement du danger, la peur ne fervirait qu'à vous empêcher de voir les moyens de vous en tirer.

EMILIE.

Vous doutez donc, maman, qu'il y ait du danger?

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LA MER E.

S'il y en a, il feréduit à peu de chose. Malgré l'extrême affluence du monde, malgré la mulüplicité des caroffes & dés cabriolets & des charétes & des pierres, & tant d'autres embaras dans les rues de Paris malgré l'étourderie, l'inattention, la témérité de ceux qui vont & vienent, en caroffe ou à pied, on entend rarement parler de quelque accident malheureux. Il faut donc. que le danger ne foit pas auffi grand qu'il le paraît.

EMILIE.

Et voilà pourquoi vous n'y faites jamais attention?

LA MERE,

Pas autrement que pour m'affurer de la fageffe de mon cocher, dont la conduite repofe fur deux principes invariables celui de n'être jamais preffé, & celui d'être le moins incommode poffible à ceux qui vont à pied. Car, quelques précautions qu'on prene, on l'eft toujours encore affez. EMILIE.

Ainfi tout ce qui vous apartient a toujours des principes?

LA MERE.

C'est que je ne connais rien de mieux, pour se tirer des embaras de Paris & de la vie.

EMILI E.

Nous voilà toujours avec une bonne provifion de foie, pour broder tout

à notre aise.

LA MER E.

Oh, très-fort à votre aife. Car vous pouvez être sûre de n'y pas travailler beaucoup ni long-temps de fuite.

EMILIE.

Maman, vous avez une dent contre mon pauvre métier.

LA MERE.

Quand vous aurez quinze ans, vous y travaillerez tant qu'il vous plaira, & ne vous en foucierez peut-être plus. D'ici à ce temps vous me permettrez de vous contrarier fur toute occupation fédentaire.

EMILIE.

En ce cas, maman, ma tante n'aura donc pas fon fac à ouvrage pour les

étrennes?

LA MERE.

Vous lui donnerez fes étrennes à pâques. Un préfent est toujours bien

reçu.

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EMILIE.

Et je lui dirai: Ma tante, prenezvous-en à maman, fi j'ai l'air si preffé avec mes offrandes.

LA MERE.

Toutes ces fortes d'iniquités, je les prendrai toujours volontiers fur

inon compte.

EMILIE.

Mais, maman, vous ne me parlez pás de ce qui vous eft arivé dans cette

boutique?

LA MERE.

Vous l'avez donc remarqué?

EMILIE.

Convenez que cette dame était bien impertinente. Elle eft entrée là comme une fole, n'a falué perfone, vous a pris la chaife qui était derriere vous, & s'eft placée entre vous & la marchande, en vous tournant le dos. Si vous n'étiez pas la prudence même,

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