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DIX SEPTIEME

CONVERSATION.

EMILIE.

QU'IL y a long-temps, ma chere

maman, que nous n'avons été affifes l'une à côté de l'autre, tête à tête, & que ce temps a été cruel à paffer! Mais vous voilà, grâces à dieu! hors de danger; vos forces revienent à vue d'oeil, & aujourd'hui fur-tout vous me paraiffez prefque radieufe.

LA MER E.

Il est certain que depuis plus de fix mois je ne me fuis pas fentie aussi bien... Auffi je n'ai pas voulu avoir pendant cette foirée d'autre garde à côté de moi que mon enfant.

EMILIE.

Dites votre enfant malheureux, qu'on a impitoyablement éloigné de vous. Quand vous avez été très-mal, il ne m'a pas été permis de vous voir. Quand vous avez été mieux, j'ai eu la permisfion d'entrer, mais on m'a défendu de m'arrêter & d'approcher de votre lit; de peur, ont-ils dit, de vous caufer de l'émotion & de l'atendriffement. Ce n'est que depuis huit ou dix jours qu'il m'eft permis de refter un peu, & de vous rendre quelque petit fervice. Mais, grâces à dieu! nous voici tête à tête. J'efpere que perfone n'y trou vera plus à redire, & que vous ne foufrirez pas qu'on me renvoie, quand je me présente à la porte.

LA MERE.

Vous pouvez bien juger à quel point cette féparation forcée a été cruele pour moi. Mais ne penfons plus au paffé que pour nous réjouir de

notre réunion. Ah, comme nous allons jaser ensemble!

EMILIE.

Ah non, ma chere maman. On m'a bien recommandé de ne pas vous faire caufer. Ils disent que cela pourait vous ⚫ccafioner une rechute.

LA MERE.

Ils ne favent ce qu'ils difent, ma there amie. Vous pouvez les affurer que quand j'aurai caufé une ou deux heures avec mon enfant, je me fentirai beaucoup plus en vie, qu'après avoir avalé leurs potions & tout ce qu'ils pouraient inventer, pour me rendre mes forces. D'ailleurs, je me fens trèsbien aujourd'hui. J'ai pris ce matin l'air fur ma petite terraffe, pendant que vous étiez aux Tuileries. Les premiers beaux jours du printemps font tant de bien & font fi agréables!

EMILIE.

Ah oui... Je difais: Ah, fi maman pouvait être là!

LA MER E.

Et moi, je difais: Ah, fi j'avais mon Emilie, pour m'aider à faire le tour de ma terraffe!

EMILIE

(en embraffant fa mere.) La voilà, ma chere, ma bonne mere!

LA MERE.

Mais au lieu de marcher, nous cauferons. Et pour que le grand docteur n'ait rien à dire, je ne dépenserai pas mon capital; je ne vivrai que fur

'mon revenu.

EMILIE.

Ah, c'eft vrai, il vous l'a recommandé. Ce font fes paroles; je l'entends, c'eft comme s'il parlait. Pourvu qu'il ne me reproche pas mon tête à tête !

LA MER E.

Ne craignez rien. J'ai affez de forces à préfent, pour vous défendre.

EMILIE.

De quoi parlerons-nous, ma chere

maman?

LAMER E.

Je n'en fais en vérité rien. Nous avons tant de chofes à nous dire & à nous demander réciproquement, que nous n'aurons pas fini de deux mois, & qu'il eft bien naturel que nous ne fachions par où commencer.

EMILIE.

Quel est donc ce rêve que vous vouliez me dire il y a quatre ou cinq jours, quand notre charmante amie, Madame de Ternan, vous a défendu de pérorer?

LA MER E.

Ah, ce rêve! Je m'en fouviens: il m'a fait de la peine.

EMILIE,

En ce cas, n'en parlons pas,

LA MERE.

Oh, je n'en fuis pas alarmée, à en

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