페이지 이미지
PDF
ePub

EMILIE.

Vous favez bien, maman, que je retiens volontiers ce que dit notre Pasteur. J'ai trouvé, comme vous, ce difcours fort beau; auffi il a fait pleurer Babet de plus belle. Monfieur le Curé l'a fini, en leur mettant la main fur la tête, & en leur disant : Que dieu vous la conferve... c'est-àdire, maman, la fanté du corps & de l'ame. Béniffez le nom de dieu & de votre bienfaitrice.

LA MERE.

C'eft ce qu'ils ont fait apparem

ment?

EMILI E.

Tout le monde a comblé Madame la Maréchale de louanges & de bénédictions; & en vérité, maman, je commence à croire qu'elle ne s'est abfentée que pour n'en être pas témoin, & pour laiffer à Monfieur le Curé le temps de faire fa commiffion.

LA MER E.

Eft-elle restée long-temps abfente?

EMILIE.

Plus d'une heure. Je fuis même partie avant fon retour, mais je l'ai rencontrée dans la rue qui revenait. Elle a fait arrêter fon caroffe, & m'a dit : Quoi, vous quitez déja la noce? Cela n'eft pas bien. Mais j'efpere vous revoir bientôt & pour plus long-temps. Ainfi, maman, atendezvous à la voir ariver ici tantôt avec toute la noce.

LA MER E.

Oh non, vous ne la verrez plus aujourd'hui; car elle fort d'ici. Tout le temps que vous avez passé chez le pere Noël après l'églife, elle l'a paffé ici. EMILIE.

Pourquoi donc m'a-t-elle dit, J'efpere vous revoir ? Et cette grâce, maman, qu'elle se propofait de vous demander ?

Ah,

LA MER E.

cette grâce! C'en eft une

qu'elle veut vous acorder.

EMILIE.

Comment donc ?

LA MERE.

Elle aura Dimanche prochain toute la noce chez elle, & elle défire que nous en foyons, vous & moi, & que nous lui menions notre Pasteur. EMILIE.

Ah, maman faifons cela. Nous aurons d'abord un agréable voyage avec notre brave Pasteur, fans compter la journée...

LA

MERE.

Qui aura bien fon prix, n'eft-ce pas? Et fi ma fanté ne me permet pas d'y aller, elle veut toujours que je vous envoie avec Monfieur le Curé & votre bonne.

EMILIE.

Et avez-vous acordé cette grâce?

LA MER E.

Comment refuser quelque chofe à une femme fi refpectable ?

[merged small][ocr errors]

Je crois, ma chere maman, que je puis prendre la moitié de la reconaiffance fur mon compte...

LA MER E

Vous penfez donc que cette journée vous amufera?

EMILIE.

Oh beaucoup ; je vous en donne ma parole avec toute confiance.

LA MER E.

Cependant il me femble que yous êtes partie ce matin pour la cérémonie, d'un air beaucoup plus gai que celui que vous en raportez.

EMILIE,

Cela peut être, maman. C'eft que

je croyais un jour de mariage beaucoup plus gai en effet.

LA MERE.

Et fur quoi fondiez-vous cette opinion?

[ocr errors]

EMILIE.

Mais maman, c'est le jour qui acomplit ce que tout le monde défire. C'est donc le cas d'être gai.

LA MERE.

Vous avez raifon. Mais en acompliffant le défir de toute une famille cet inftant fait l'époque la plus décifive de notre vie, fans nous répondre de fes fuites. Le rideau qui nous cache l'avenir s'entr'ouvre. Au ́ milieu de la joie qui nous environe nous y portons un regard inquiet : car comment fixer fans trouble, fans une terreur fecrete, ce lointain où tout eft indécis, où tout eft vague & où néanmoins tout intéreffe? Ce jour vous fait d'ailleurs contracter un engage

« 이전계속 »