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puifqu'on la conçoit en elle-même & paf elle-même; puifqu'après avoir reçu l'existence par l'action créatrice du Tout-puiffant, elle exifte en foi & par foi: en quoi elle differe des Modifications, qui ne peuvent exifter & que l'on ne peut concevoir que dans la Subftance modifiée.

II°. La Matiere eft une Subftance étendue: puifque toutes les fubftances matérielles qui fe prêtent à nos obfervations, s'offrent à nous, fous la propriété d'étendue; puifqu'à quelque inconcevable pet teffe que notre efprit réduife par la penfée, un Elément de Matiere, il conçoit encore dans cet élément plufieurs faces, dont l'une n'eft pas l'autre, dont chacune a fon étendue à part. Que doit-on affirmer des choses, finon ce que les fens nous y montrent, finon ce que l'efprit y conçoit ?

III°. La Matiere eft une Subftance impénétrable: puif que tout élément de Matiere, occupe exclufivement un efpace, auquel il répond par fes parties réelles & pofitives; fans qu'il foit jamais en notre pouvoir de lui faire perdre la moindre partie de fon étendue intrinfeque & abfolue.

Pour vous former une idée fenfible de cette étendue impénétrable: concevez d'abord un Pouce cubique d'or, fans pores & fans vides. La fomme de tous les élémens de ce Corps, réunis ou féparés, eft une étendue abfolue d'un pouce eubique : étendue qu'aucun Agent créé ne peut lui faire perdre; parce qu'aucun agent créé ne peut opérer la Compénétration des élémens de la Matiere, qui feule pourroit faire perdre à ces élémens leur étendue pofitive & intrinfeque.

Concevez enfuite un Pouce eubique d'or, où il y ait précisément une égale fomme de vides & d'élémens. La fomme de l'étendue réelle & pofitive de ce Corps, déduction faite de la fomme négative des vides, eft un demi-pouce cubique. A grands coups Tome L.

B

de marteaux, on pourra forcer ces élémens à fe rapprocher les uns des autres, à laiffer de moins grands vides entre eux. La plus grande Compreffion poffible aboutiroit à les réduire à un demi-pouce cubique d'étendue: mais elle ne pourra jamais faire enforte

cette quantité de matiere, occupe moins d'un demi-pouce cubique d'étendue.

IV. Il réfulte donc, de ce que nous venons d'obferver & de démontrer, que la Matiere, dans fon état naturel, eft toujours une fubftance étendue & impénetrable; & que la quantité de fa fubftance réelle & pofitive, eft toujours en proportion d'égalité avec fon étendue abfolue & impénétrable. C. Q. F. D.

18. COROLLAIRE. Tout élément de Matiere, exifte néceffairement en lui-même, dans un Point quelconque de l'Espace infini; & exclud pofitivement de ce point de T'efpace qu'il occupe, tout autre élément de matiere: enforte que deux élémens de matiere, ne peuvent jamais, fans une Miracle formel, exifter l'un dans l'autre & dans un même espace.

Ce que nous difons ici d'un Elément de matiere on doit le dire également d'un Corps, ou d'un affemblage d'élémens. Tout Corps occupe exclufivement un espace égal à la fomme de tous les élémens.

Quand on comprime un Corps, on force fes élémens à fe rapprocher les uns auprès des autres: on diminue la fomme des pores, parfemés entre ces élémens. Mais on ne détruit point, on ne diminue point fon étendue intrinfeque & abfolue, qu'il faut toujours diftinguer de l'étendue de fes pores ou de fes vides.

La plus grande Compreffion poffible, fi elle pouvoit avoir lieu, feroit la contiguïté totale de tous les élémens, & l'entiere ceffation des pores & des vides, dans le Corps ainfi comprimé. Mais une telle compreffion eft au-deffus des forces des Agens créés, qui

ne peuvent jamais faire perdre à un Corps, tous fes pores, tous fes vides.

19. REMARQUE. Nous ne nous arrêterons pas ici à examiner fi l'etendue de la Matiere, affecte ious fes Elémens ifolés, en telle forte que tout élément ifolé ait fon étendue à part; étendue réelle & indépendante de fon union avec un autre élément :

Ou fi cette étendue de la Matiere, nulle dans chaque Elément ifolé, devient rielle & pofitive par la réunion de plufieurs élémens; en telle forte que chaque élément ifolé foit inétendu, & qu'une fomme d'élémens soit étendue.

Cette Question, qui paroît appartenir à la Métaphyfique au moins autant qu'à la Phyfique, fera plus convenablement examinée & décidée dans le troifieme Article fuivant.

ARTICLE SECOND.

LA DIVISION DE LA MATIERE.

COMME on ne peut rendre raifon de la plupart des merveilleux Phénomenes que la Nature offre par-tout à nos regards, fans fuppofer une inconcevable divifion dans les élémens de la Matiere: il eft de la derniere importance de commencer par examiner jufqu'à quel point la Matiere eft effectivement divifée; ou de quelle étonnante petiteffe, font réellement les élémens de la Matiere. C'est par des preuves de fait ou d'expérience, que nous allons établir cette théorie.

PROPOSITION FONDAMENTALE. 20. La Matiere eft divifée au-delà de tout ce que notre imagination peut concevoir: ou bien, les élémens de la

Matiere, font d'une ténuité qui paffe tout ce que nous pouvons imaginer & comprendre.

EXPLICATION. La ductilité des Métaux, la diffufion des Odeurs, la vie des Animalcules imperceptibles, l'émanation de la Lumiere: telles font les expériences où les obfervations que nous allons choifir pour rendre bien fenfible & bien palpable, la vérité de cette Propofition fondamentale.

Nous nous attachons à celles-ci de préférence fur mille & mille autres: parce qu'elles font plus propres à fervir d'introduction générale à la Phyfique, par la lumiere qu'elles peuvent répandre fur une foule d'objets généraux de la Nature.

PREMIERE

DÉMONSTRATION:

LA DUCTILITÉ DES MÉTAUX.

LES Arts doivent leur lumiere à la Phyfique : la Phyfique tire auffi quelquefois des Arts, une lumiere nouvelle. Nous allons donner quelques momens d'attention, aux Procédés que mettent en ufage les Batteurs & les Fileurs d'or: ils nous fourniront une preuve fenfible de l'étonnante divifion de la Matiere.

21. DÉFINITION. On nomme ductilité des Métaux, cette propriété qu'ont leurs Parties intégrantes, de s'étendre fans fe défunir.

Cette propriété des Métaux, n'eft autre chofe que l'adhérence continue de leurs Parties intégrantes, laquelle fait qu'ils peuvent céder à la percuffion & à la preffion, qu'ils peuvent prendre mille formes différentes, fans qu'il y ait fracture ou folution de continuité entre ces parties: ce qui arrive, parce qu'à mesure que les parties contigues font forcées de fe féparer, il s'en trouve d'autres qui fe joignent de part & d'autre à celles qui fe féparent,

Il est très-vraisemblable que la figure des parties élémentaires des Corps ductiles, contribue principalement à leur ductilité : mais comme nous n'avons aucune connoiffance fur la forme de ces parties, on ne peut expliquer la Ductilité, d'une maniere plus particuliere.

De tous les Métaux, le plus ductile, c'eft l'Or; & c'eft fur ce métal que vont principalement se fixer les obfervations que nous allons faire en ce genre.

LES BATTEURS ET LES FILEURS D'OR.

22. OBSERVATION I. Les Ouvriers qui battent l'Or & qui le réduifent en feuilles, ont trouvé l'art de lui procurer une étendue dont l'imagination s'étonne. Le philofophe Boyle eft un des premiers qui ait fait cette remarque, qu'un grain d'Or, ou qu'une quantité d'or, qui ne pefe qu'un grain, & qui n'eft que la cinq cent foixante-feizieme partie d'une once, acquiert fous les marteaux & fous les rouleaux qui la mettent en feuille, une étendue de cinquante pouces. quarrés.

1°. La longueur d'un ponce, contient au moins deux cens parties visibles: puifqu'il y a des Inftrumens de Mathématique, où un pouce eft partagé en cent divifions, dont un oeil attentif faifit facilement les moitiés.

Donc en multipliant la longueur par la largeur une feuille d'un pouce quarré aura 40,000 mille parties vifibles dans fa furface fupérieure, & tout autant dans la furface inférieure: ce qui fait 80,000 parties vifibles..

Donc une furface de cinquante pouces, aura 4,000,000 parties vifibles. Voilà donc un grain d'or, divifé en quatre millions de parties, que l'oeil peut faifir & diftinguer.

II°. Un grain n'étant que la cinq cent foixante-feizieme partie d'une once; pour avoir le nombre de

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