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causes primitives de tout ce qu'il y a d'action dans la Nature matérielle, de tout ce que nous préfente de phénomenes, le grand Ensemble des chofes vifibles: il faut ne point perdre de vue, ce Corol laire général de toute faine Métaphyfique, de toute vraie Philofophie; favoir, que ce font des Loix de confervation, & non des Loix de production.

Étant données ces trois Loix générales & primitives, la Nature aujourdhui existante en la fuppofant primitivement formée dans fon tout & dans toutes les parties, par l'être incréé & Créateur, pourra exifter & fubfifter à l'infini, en reftant tou jours foncierement la même.

Mais étant données ces trois mêmes Loix générales & primitives, au commencement des tems & avant la formation de la Nature aujourdhui exiftante; il n'en réfultera jamais, fans l'action formelle de l'Être créateur, une Nature femblable à celle qui fe montre à nos regards: par exemple, il n'en réfultera jamais une Terre qui fe meuve autour de fon Axe & autour du Soleil; une Terre enrichie & couverte d'une infinité d'Efpeces végétales; une Terre peuplée d'une infinité d'Efpeces animales; & ainfi du refte.

PARAGRAPHE

PREMIER.

L'INERTIE DE LA MATIERE.

74. OBSERVATION. IL eft vifible qu'il y a une action permanante, une action uniforme & réguliere, une action foumife à des Loix fixes & invariables, dans toute la Nature matérielle. Mais quelle eft & la fource & la caufe de cette action de la Nature matérielle ? C'est ce qui n'eft pas vifible de même.

1°. Le Peuple, qui communément ne voit rien audelà de ce qu'apperçoivent fes Sens, juge fans exa

men, que l'action des Corps, n'a d'autre fource, d'all tre principe, d'autre caufe efficiente, qu'une vertų propre à ces corps.

Juger ainfi, juger que les Globes célestes fe meuvent, parce qu'ils ont en eux-mêmes & par euxmêmes la vertu de fe mouvoir; que les Corps terreftres gravitent vers le centre de la Terre, parce qu'ils ont en eux-mêmes & par eux-mêmes une vertu gravitante; que la Terre produit des végétaux & des. minéraux, parce qu'elle a en elle-même & par ellemême la vertu de produire tout cela; c'eft juger que Vaiguille d'une Montre, fait fa révolution fur le cadran; parce qu'elle a en elle-même, la vertu de fe mou voir, de marquer les heures, de divifer exactement le tems, fans le fecours d'aucun reffort qui produife & qui regle fon mouvement.

II. Le Philofophe, qui ne confond pas les effets avec les caufes, qui fait que l'action de la Matiere, ne vient pas plus de la nature de Matiere, que le mouvement d'une aiguille de Montre, ne vient de la nature du métal dont elle eft formée, a cherché & dans la Matiere & hors de la Matiere, quelle peut être la Caufe efficiente à laquelle elle doit fon action, fes divers mouvemens. Deux fentimens oppofés ont été le fruit des spéculations philofophiques fur cet objet.

Parmi ces deux Sentimens, l'un vouloit que l'action de la Nature matérielle eût pour caufe efficiente, une vertu fecrete de la Matiere: c'étoit celui des Péripatéticiens; & c'eft encore celui, du Peuple & de quelques Philofophes Allemands, Sectateurs de

Leibnitz.

L'autre prétend que l'action de la Nature matérielle, a pour unique caufe efficiente, l'action permanante d'un Etre incréé & créateur, qui meut & anime perfévéramment toutes les parties de la Matiere & de la Nature, felon certaines Loix fixes & inva

riables , par lui librement établies au commencement des tems: c'eft le fentiment de Defcartes & de tous fes Difciples, de Newton & de tous fes Sectateurs; c'eft-à dire, de tout ce qu'il y a maintenant de vrais Philofophes.

III°. Selon ce dernier Sentiment, qui eft aujour dhui le plus commun, & qui eft le feul vraiment philofophique; la Matiere a en partage une Inertie abJolue & univerfelle: l'action permanante de l'Etre créaeft la Caufe efficiente de tous les mouvemens quelconques de la Matiere, de toutes les parties, de tous les compofés, de tous les principes de la Matiere: les diverfes Substances matérielles ne font que la Cause occafionnelle, ne font jamais la Cause efficiente, des actions réciproques qu'elles exercent les unes fur les autres.

« Je fuppofe d'abord, dit Voltaire dans fes Mélan≫ges de Philofophie, que l'on convient que la Ma»tiere ne peut avoir le mouvement par elle-même : il faut donc qu'elle le reçoive d'ailleurs. Mais elle

ne peut le recevoir d'une autre Matiere : car ce fe>>roit une contradiction. Il faut donc qu'une Cause immatérielle produife le mouvement. Dieu eft cette » caufe immatérielle; & on doit ici bien prendre» garde que cet Axiome vulgaire, qu'il ne faut point, recourir à Dieu en Philofophie, n'eft bon que dans » les chofes que l'on doit expliquer par les Caufes » prochaines phyfiques. Par exemple, je veux expliquer pourquoi un poids. de quatre livres, eft » contrepefé par un poids d'une livre. Si je dis >> Dieu l'a ainfi réglé: je fuis un ignorant. Mais je » fatisfais à la queftion, fi je dis que c'est parce que » le poids d'une livre, eft quatre fois éloigné du point d'appui, que le poids de quatre livres. (426)..

que

» Il n'en eft pas de même des premiers Principes. » des chofes : c'eft alors que ne pas recourir à Dieu,

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» eft d'un Ignorant. Car, ou il n'y a point de Dieu, » ou il n'y a de premiers Principes que dans Dieu, » C'eft lui qui a imprimé aux Planetes, la force par » laquelle elles vont d'occident en orient. C'est lui

qui fait mouvoir ces Planetes & le Soleil fur leurs » axes. Il a imprimé une Loi à tous les corps, par » laquelle ils tendent tous également à leur centre, » Enfin il a formé des Animaux, auxquels il a donné une force active avec laquelle ils font naître du

» mouvement ».

.75. ASSERTION I. La Matiere a une Inertie intrinfe quement inhérence à fa nature; une incapacité intrinfeque & radicale de fe donner le mouvement & l'action.

DÉMONSTRATION. Soit que l'on confulte l'Expérience, foit que l'on confulte la Raifon : il eft conftant que la Matiere n'eft qu'une Puiffance purement paffive, capable de recevoir l'action & le mouvement, incapable de fe les donner par une vertu intrinfeque qui lui foit propre.

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I. L'Expérience démontre l'inertie de la Matiere, Car un bloc de marbre, un tas de terre, une piece d'or ou d'argent, un morceau de fer ou de bois, restent immobiles au même lieu & en la même fituation, à moins qu'une caufe étrangere ne les déplace.

Donc ces fubftances, que l'on voit & dans tous les tems & dans tous les lieux n'avoir d'action & de mouvement, qu'autant que des caufes étrangeres leur en impriment, n'ont en elles-mêmes & par ellesmêmes, aucun principe intrinfeque d'action & de

mouvement.

Donc toute l'action & tout le mouvement que nous découvrons dans ces fubftances, eft un mouvement & une action qui leur font imprimés par une Caufe étrangere: quelle que foit cette caufe.

Donc , par un Jugement d'analogie, toutes les autres fubftances matérielles qui leur reffemblent n'ont également par elles-mêmes, aucun principe intrinfeque d'action & de mouvement. Or, quelles fubftances matérielles ne leur reffemblent pas; furtout dans l'hypothefe aujourdhui affez généralement reçue, d'une Matiere homogene dans ja nature, & différenciée par la feule diverfité de ses maffes & de fes configurations, dans toutes les efpeces de Corps? (143).

II. La Raifon démontre à fon tour l'inertie de la Matiere. Car quelques efforts qu'aient faits jusqu'à préfent les Athées & les Matérialistes, pour attribuer à la Matiere une action intrinfeque, capable de les difpenfer de l'influence d'un Dieu auteur & moteur de la Nature: ils n'ont jamais pu enfanter que des fyftêmes abfurdes, qui heurtent toutes les idées & toutes les notions que nous avons de la Matiere.

Quelque idée que l'on fe forme de la Matiere : on la conçoit toujours néceffairement comme une fubtance aveugle & paffive; comme une fubftance indifférente à l'action & au défaut d'action, au mouvement & au défaut de mouvement; comme une fubftance capable de recevoir toutes les modifications poffibles de mouvement & de configuration, mais incapable d'en prendre & de s'en donner aucune par elle-même.

Donc, fi l'on doit juger des chofes par les idées qu'on a des chofes, c'eft-à-dire, par le Principe fondamental de toutes nos connoiffances: il eft clair que la Matiere n'a point effentiellement l'action & le mouvement par fa nature; puifqu'on la conçoit & qu'elle exifte fans action & fans mouvement: il eft. clair que la Matere n'a point accidentellement le mouyemeni & l'action, par fon exigence intrinfeque & de fon

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