fçait pas feulement de quoi il s'agit, ou qui n'en a qu'une connoiffance légère & confufe. On ne trouve en eux nulle prévention pour des opinions particulieres ; ils croient bonnement ne différer de nous que par le rit, & fe font honneur d'être auffi féparés des Proteftans, que nous le fommes. Il faut bien fe garder d'entrer en difpute avec eux. Les difputes, dit notre Missionnaire, ne pourroient qu'être inutiles & feroient même dangereuses. Elles feroient inutiles, parce que ce peuple groffier & ignorant n'a befoin que d'inftructions; mais elles feroient dangereuses, parce qu'elles les mettroient en garde contre nos inftructions & ils iroient incontinent confulter leurs Docteurs, pour apprendre d'eux les réponfes qu'ils auroient à nous faire. Leurs Doc

teurs, intéreffés à les éloigner de nous, ne manqueroient pas alors de leur faire d'affreufes peintures des Miffionnaires. Ils leur défendroient de nous recevoir chez eux, & les excitercient à nous fufciter des perfécutions & des avanies. Le Miffionnaire fage & prudent doit donc fe contenter d'infpirer au peuple l'horreur du vice, l'amour de la vertu, le défir de remplir les devoirs de fon état, & le difpofer à croire ce que l'Eglife Catholique nous enfeigne.

Pour ce qui eft des hérétiques que nous avons dit être formellement hérétiques, c'eft-à-dire, de ceux qui fçavent bien que leurs opinions ont été condamnées par l'Eglife, & en particulier par le Concile de Chalcédoine & qui, nonobftant la condamnation de leurs erreurs, y

il

perfifteront opiniâtrément faut leur mettre fous les yeux les faintes Ecritures, & les Livres des Peres Grecs qu'ils refpectent, leur faire voir avec douceur & charité les vérités qui y font établies & qui détruifent leurs dogmes hérétiques. Il faut leur faire remarquer les contradictions manifeftes de leurs nouveaux Catéchismes & Rituels , avec les anciens qui fervoient de régles à leurs Peres.

Mais comme il n'arrive que trop-fouvent que des intérêts particuliers, & des raifons de politique entrent dans le parti qu'ils ont pris, il faut démêler les véritables motifs de leur conduite; on trouvera très-fouvent particulierement dans les Prêtres & dans les Evêques, que ceux-là, dans la crainte de perdre leurs ouailles, & les profits

qu'ils en retirent ou de déplaire à leurs Evêques, ne veulent point abandonner le fchifme; & que les Evêques, pour être bien dans l'efprit de leur Patriarche, & pour en recevoir des graces, font gloire d'être attachés à fa Communion. Il faut convenir que la converfion de ces intéresfés politiques eft très-difficile; mais elle n'eft pas cependant impoffible: car nous ne fommes pas fans la confolation de voir de tems en tems des Evêques & des Curés, qui vont de bonne foi abjurer le fchifme, & fe réconcilier à l'Eglife. Romaine. Ainfi il faut, en priant beaucoup, attendre avec patience, que le grain femé en terre, y germe & vienne à maturité. Sur-rout il ne faut pas fe fâcher contre votre adverfaire, l'accufer de fchifme ou d'héréfie. Vous vous ferme

riez pour toujours la porte de for cœur ; il faut guérir votre malade avec du baume & de l'huile, & ne pas aigrir fa plaie avec du vinaigre.

A l'égard des Arméniens & Arméniennes, qui fe préfentent pour revenir à nous, il eft de conféquence de bien examiner les motifs de leur démarche pour n'y être pas trompé. Il faut fe faire bien inftruire de quelle maniere ils ont vécu, étudier les caractères de leur efprit, pour connoître s'ils ne font point légers & changeans; il faut voir comment ils écoutent nos premieres inftructions, & quels fruits ils en retirent; il faut éprouver leur conftance à demander l'abfolution de leur fchifme & de leurs erreurs, & ne la leur accorder que lorsqu'on pourra moralement s'affûrer qu'on donnera à